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19 septembre 2015 6 19 /09 /septembre /2015 21:11

La bannière Le Minor de la chapelle du Drennec en Clohars-Fouesnant (29).

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Voir l'article général :

Les bannières le Minor

...qui dresse la liste de 44 bannières (en 2015), et fournit les liens vers leur description détaillée.

 

"La chapelle remplace un édifice antérieur plus important datant du XVIe siècle, situé plus au nord, qui tombait en ruine. Du premier sanctuaire, ont été réutilisés l'aile d'orientation nord-sud, les encoignures et, à l'intérieur, deux fontaines et un sacraire. Dans la lancée des travaux, le chœur et la nef sont ajoutés. Le porche comporte une entrée en arc brisé surmonté d'un rouleau en accolade, coiffé d'un fleuron. Deux pinacles supportent de petites consoles sculptées. Le clocher, de type finistérien, est cantonné de huit pinacles.

 

Alar est le prénom breton correspondant à Éloi, évêque de Noyon au VIIe siècle. Si saint Éloi est surtout connu pour être le patron des orfèvres, saint Alar l'est davantage comme protecteur des chevaux. Deux pardons sont célébrés chaque année dans la chapelle. Le premier dimanche de juillet a lieu le pardon de saint Alar et la procession des chevaux. Des centaines de chevaux participaient par le passé à cette procession, à laquelle les femmes n'étaient pas admises. Le 15 août est célébré le pardon de la Vierge.

La fontaine et le calvaire, qui l'accompagne, datent du XVIe siècle, mais la pietà qui occupe la niche y a été placée vers 1880. La façon dont le Christ relève la tête n'est pas traditionnelle. De nombreux artistes ont représenté l'édifice. (Cl. M. H. 1914)

Notre-Dame du Drennec est invoquée à l'occasion des moissons, afin d'obtenir un temps favorable, tandis qu'on prie saint Alour, patron d'Ergué-Armel, afin de voir tomber sur les champs altérés une pluie bienfaisante."

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Depuis la première bannière réalisée par Pierre Toulhoat en 1953 pour l'église de Locronan grâce aux talents des brodeurs de la maison Le Minor à Pont-L'Abbé, cinq autres bannières avaient été créées jusqu'en 1965, puis près de vingt ans s'écoulèrent avant que l'association chargée de la restauration de la chapelle du Drennec ne demandent au peintre de Pierre Toulhoat un nouveau carton.

Cette bannière est donc la septième d'une liste riche actuellement, en 2015, de 45 bannières.

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1°) Face principale : Sant Alar.

Elle porte l'inscription AD SAVADUR AR CHAPEL. 1984, et, en bas, Le Minor et Toulhoat.

Je n'ai pas trouvé le bolduc de cette bannière au verso des pans brodés.

Saint Alar est représenté sur un ciel rouge frappé d'hermines, et dans la partie basse sur un fond de prairie à mille fleurs. Le personnage est un saint-évêque qui ne serait pas identifiable mais il est entouré de chevaux en liberté, de cinq cavaliers aux allures contemporaines, portant des bombes d'équitation pour quatre d'entre eux. Au premier plan, un breton en gilet de drap bleu tenant un cheval pommelé (ou seulement aubère ?) plus proche du postier breton que les autres montures. 

Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.
Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Sant Izidor / saint Isidore.

Inscriptions en breton (Notre-Dame du Drennec 1985. Saint Isidore) :

 

ITRON VARIA AR DRENNEG 1985.

SANT IZIDOR.

Saint Isidore, qui fut valet de ferme près de Madrid,  est le patron des agriculteurs, et il est représenté, comme dans toutes les chapelles bretonnes qui le vénèrent, en costume local, avec gilet, chemise, braies (bagou braz), guètres et sabots, portant une gerbe de blé et une faucille.

Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Bannière de pardon, Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

La chapelle.

 

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.
Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Chapelle Notre-Dame de Le Drennec, Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Published by jean-yves cordier - dans Bannières.
16 septembre 2015 3 16 /09 /septembre /2015 16:08

Présentation générale.

 L'église paroissiale de Kernascléden est une ancienne chapelle tréviale qui fut fondée par la famille des Rohan-Guéméné sur leur domaine, dans l'ancien diocèse de Vannes.  Le 13 mai 1430, le pape Martin V autorisa Alain IX de Rohan à y installer deux chapelains perpétuels "pour y célébrer le culte divin et y recevoir les pauvres passants". On peut penser que la construction fut commencée légèrement avant cette date, du temps d'Alain VIII et de Béatrice de Clisson. La nef fut construite alors ainsi que le transept dont la voûte de la croisée dut être terminée en 1433. À la clef de cette voûte, on remarque les armes de Jean V, duc de Bretagne, et de son épouse Jeanne de France (d.1433), fille de Charles VI. Le chœur fut construit ou reconstruit en 1453 et voûté d'ogives en 1464 d'après une inscription encore en place, que confirment les clefs des voûtes :  à la voûte de la première travée du chœur, figurent les armes des Rohan-Navarre qui sont celles de Louis II de Rohan-Guémené qui succédera à son père, Louis Ier, en 1457. À la voûte de la deuxième travée, figurent les armes des Rohan : il s'agit de Jean II de Rohan, fils d'Alain IX. À la voûte de la troisième travée, celles de François II, duc de Bretagne en 1457. Les peintures murales se trouvent à la voûte du transept nord et aux murs du transept sud ainsi qu'à la voûte du chœur. Les thèmes sont le Paradis, représenté par des anges musiciens, l'Enfer et la Danse macabre ; dans le chœur, la Vie de la Vierge et aux tympans, entre grandes arcades et formerets de la voûte centrale, la Passion du Christ.

En résumé, lLa construction dut être commencée en 1420, la nef fut construite vers 1420-1430,  le transept fut terminée en 1433, alors que le chœur commencé en 1448 fut consacré en 1453 et voûté  en 1464.

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Plan : Infobretagne : http://www.infobretagne.com/kernascleden-eglise.htm

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Le concert spirituel par les anges musiciens et chanteurs du transept nord.

La voûte en croisée d'ogive du bras nord du transept se découpe en quatre voûtains, respectivement selon le sens anti-horaire à l'est, au nord, à l'ouest et au sud : je les désignerai comme I, II, III et IV, en faisant remarquer que le voûtain IV est placé au dessus de la peinture murale de l'Ascension qui occupe le tympan (plan H) au dessus de l'arcade de la croisée du transept.

Les nervures se rejoignent sur la clef de voûte timbré d'un écu pallé d'argent et d'azur de six pièces, qui sont les armes de Rosmadec. Or, un membre de cette famille, Bertrand de Rosmadec, devint évêque de Quimper en 1417, et décéda en 1445. 

 

Chaque voûtain est occupé par deux anges dont l'un tient un instrument de musique alors que l'autre lit sur  un rouleau sa partition. Sur les quatre partitions se lisent en I le mot Patrem (soit un Credo), en II les mots Et in terra évoquant le Gloria, en III  le début d'un Sanctus, et en IV le début d'un Agnus Dei.

Si on associe à cette description celle des instruments, nous avons :

I. Voûtain est (vers le chœur) : Patrem. (Credo ?). Harpe gothique.

II. Voûtain nord : Et in terra . (Gloria). Vièle à archet lié, à 4 ou 5 cordes.

III. Voûtain ouest : Sanctus. Instrument de type gigue, à archet.

IV. Voûtain sud qui correspond à l'Ascension : Agnus Dei. Tambour à deux peaux ou à bourdon.

Il me reste à en présenter les photographies accompagnées de leur description analytique. J'en donnerai une vue d'ensemble, la vue de l'instrument et celle de la partition. Mais comme nous disposons en ligne ( Médiathèque de l'architecture et du patrimoine - diffusion RMN) des photographies du relevé par aquarelle réalisé en 1955 par

 Elisabeth FaureFonds de prises de vues du Centre de Recherche des Monuments Historiques, et que ces aquarelles sont particulièrement lisibles, j'accompagnerai mes photographies prises en 2015 de ces aquarelles d'Élisabeth Faure.

0. Vue générale (mais partielle...)

 

 

Voûtes peintes du  transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.
Voûtes peintes du  transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtes peintes du transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

I. Voûtain I à l'est (vers le chœur) : Patrem. (Credo ?). Harpe gothique.

Vue générale

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Voûtain I à l'est (vers le chœur) : Patrem. (Credo ?). Harpe . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain I à l'est (vers le chœur) : Patrem. (Credo ?). Harpe . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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La harpe gothique.

 

Cet instrument médiéval diatonique, préféré des rois et des princes, mais qui accompagne sur les routes les ménestrels, trouvères et troubadours est ici joué assis, la caisse de résonance appuyée contre le thorax, sa pointe soutenue par un genou. A l'époque, la main mélodique est la gauche (au contraire de l'habitude actuelle). La colonne  qui relie la console (où s'accrochent les cordes) au bas de la caisse de résonance, est légèrement arquée. On distingue une dizaine ou douzaine de cordes et autant de chevilles, mais aussi, sur la table d'harmonie, des pièces blanches en formes de L inversé qui doit correspondre à des "harpions", dont la barre frôle la corde, ne la touchant que lorsque la corde est pincée. Le résultat est une amplification importante du son et un timbre très particulier, "nasardant".

 

 

comparer avec l'ange de la cathédrale saint-Julien du Mans :

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Voûtain I à l'est (vers le chœur) . Harpe . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain I à l'est (vers le chœur) . Harpe . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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Partition.

Chaque rouleau tenu par les anges est décoré de motifs à l'encre noire, et comporte des lettres initiales peintes en rouge ("rubrique"), un ou plusieurs mots latins qui sont l'incipit du morceau, et au moins deux portées avec notation noire de musique mesurée (musica mensurata).

Texte : "Patrem" "Tenor". On peut penser que le mot "Patrem" appartient au deuxième verset d'un Credo  dont le texte est Credo in unum Deo, Patrem omnipotentem "Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant". En effet, la première phrase, Credo in unum Deo, était prononcée par le prêtre célébrant, et le chant ne commençait qu'à la deuxième phrase. 

Le mot "Tenor" indique qu'il s'agit ici de la partie destinée au ténor. 

La graphie est gothique, les lettres au fûts droits, réguliers, épais et serrés ont les caractères de l'écriture textura quadrata, sans  aucune courbe. Les ascendantes sont fourchues et les jambages resserrés ont des empattements en losange. Mais les lettres peintes en rouges contrastent avec ces caractères, puisqu'elles privilégient les courbes et les fûts affinés à leurs extrémités.

 

Voûtain I à l'est (vers le chœur) : Patrem. (Credo ?) . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain I à l'est (vers le chœur) : Patrem. (Credo ?) . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Les aquarelles d'Élisabeth Faure (1955).

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II. Voûtain nord : Et in terra  (Gloria). Vièle à archet, à 4 ou 5 cordes.

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Voûtain II au nord, Et in terram, chebec . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain II au nord, Et in terram, chebec . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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La viele à archet .

La viele est, en tant qu' instrument à cordes frottées par un archet, l'ancêtre du violon . Je distingue que quatre cordes (l'instrument en compte cinq habituellement). La viele est portée autour du cou par une sangle. Son manche individualisé, la tête ronde de ce manche, la forme très légèrement cintrée en huit de la caisse, la rapproche de celle qui a été reconstituée d'après un tableau de Hans Memling, mais les ouïes sont absentes à Kernascléden. 

Ursula Günther décrit "une vièle à archet à quatre ou cinq cordes, manche court et un cheviller plat et rond."

Je suis intrigué par l'archet, ou plutôt par les archets, car l'examen de mes photographies, mais aussi des aquarelles de 1955 montrent très bien deux archets, tendus après un manche assez court. Les archets doubles existent-ils ? Est-ce une erreur de restauration ? Le crin noir et épais de l'archet le plus distal passe paradoxalement sous les cordes blanches...

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Voûtain II au nord, viele à archet . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain II au nord, viele à archet . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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La partition. Et in terra. Tenor.

La partition comporte cinq parties : l'une accueille une ornementation noire et or en rinceaux, l'autre la portée musicale de la première voix (réglure de quatre lignes), la troisième les mots Et in terra , la quatrième la portée de la seconde voix, et la dernière le mot Tenor.

La première lettre rouge se lit comme un E, mais on en admirera l'élégance et l'originalité. De même, la seconde est un T, mais particulièrement travaillé.

Les mots Et in terra appartiennent , dans les Messes chantées, au deuxième verset du Gloria : Glória in excélsis Deo et in terra pax homínibus bonae voluntátis. "Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté". Comme pour le Credo, la première phrase était prononcée par le prêtre célébrant, et le chant ne commençait qu'à la deuxième phrase. Cette façon de faire, qui s'est poursuivie jusu'à la fin du Moyen-Âge, explique que ces morceaux étaient nommées respectivement Patrem omnipotentem, et Et in terra pax, plutôt que Credo et Gloria.

Les messes chantées comportent cinq parties (Kirié,  Gloria, Credo, Sanctus, Agnus Dei). Quatre seulement sont représentées ici, en raison de la division de la vôute en quatre voûtains, et il manque donc le Kirié.

La partition indique au ténor Ré mi ré sol fa mi ré : cette mélodie apparaît dans plusieurs pièces des manuscrits d'Ivrea et d'Apt.

Précisions.

a) Le Codex d'Ivrea, conservé aujourd'hui dans la salle capitulaire d'Ivrea (près de Turin), semble avoir été copié vers 1360 dans l'environnement musical dee la cour papale d'Avignon, et son contenu forme une anthologie de la musique composée pendant la première moitié du XIVe siècle. C'est donc  l'une des premières sources de musique polyphonique du XIVe. Parmi les 80 pièces, plus de la moitié sont des motets doubles , puis viennent 25 pièces de l'ordinaire de la messe (9 Gloria polyphoniques, 9 Credo polyphoniques, un Credo monophonique, 4 Kirié, 2 Sanctus et  aucun Agnus Dei,), et 15 chants profanes français. Les compositeurs ne sont pas mentionnés mais on attribue de nombreux motets à Philippe de Vitry, et 3 notets et un rondeau à Machaut.

b) Le Trésor de la cathédrale Ste-Anne d'Apt renferme des manuscrits, provenant de la bibliothèque capitulaire, sur lequel sont copiées diverses œuvres polyphoniques chantées dans le chœur. Parmi ceux-ci, le codex F-Apt 16 bis, du XIVe siècle comporte 49 œuvres dont 10 Gloria. Il aurait été écrit en Avignon entre 1400 et 1417.

http://www.diamm.ac.uk/jsp/Descriptions?op=SOURCE&sourceKey=74

c) Les autres sources pour la musique polyphonique du XIVe siècle sont quatre messes désignées par le lieu de conservation du manuscrit : les messes de Tournai, de Toulouse, de la Sorbonne (ou de Besançon), et de Barcelone. Elles sont toutes apparentées d'une manière ou d'une autre au répertoire d'Avignon conservé à Ivrea et à Apt. La Messe de Barcelone, issue de l'école pontificale d'Avignon, fut célébre à la cour des papes et en Catalogne.

d) un manuscrit fragmentaire est conservé dans les archives de la cathédrale de Gérone dans le nord-est de l' Espagne ; il renferme quatre parties de messes (Agnus Dei, Sanctus, 2 Kirié). L'Aragon et la Provence autour d'Avignon partagent un répertoire commun.

 

Voûtain II au nord, partition Et in terra . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain II au nord, partition Et in terra . Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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III. Voûtain ouest : Sanctus. Rebec.

Vue générale.

Voûtain III, à l'ouest. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain III, à l'ouest. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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Le rebec.

Ursula Günther le qualifie d'instrument "à archet du type gigue (en forme de luth) avec chevalet sur table, manche brisé à six chevilles visibles, mais cordes effacées. Son archet a une mèche courte mais un long manche".  

Comme le luth ancien des arabes, le rebec (  du nom arabe : rebab) est taillé dans une seule pièce de bois et son ventre rond lui donne une forme piriforme ; le chevillier transversal s'avère beaucoup plus efficace pour l'accord que celui des vièles médiévales. Il est tenu à l'épaule gauche . On ne voit pas de rosace sur la table d'harmonie, on distingue un cordier mais le nombre de cordes (le plus souvent trois, ou quatre) ne peut être précisé. 

Voûtain III, à l'ouest. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain III, à l'ouest. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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Partition.

On lit les mots Sanctus et Tenor, bien que les lettres initiales peintes en rouge ne soient plus assez  lisibles (mais elles l'étaient en 1955). 

Le Sanctus a été identifié par la musicologue Ursula Günther comme étant celui du manuscrit de Gérone  (Girona, Archivio capitular  de la Catedral frag. 33-2 folio 2v-3) dans la trancription de Hanna Stäblein-Harder dans Corpus Mensurabilis Musicae (CMM) 29 en 1962. Il correspond aussi au manuscrit  de la Messe de Barcelone, Biblioteca de Cataluña ms 853d folio 2v. Une concordance est aussi remarquée avec le  manuscrit F-Apt, Cathédrale Sainte-Anne, Bibliothèque du chapître,  16bis folio 11v. U. Günther signale que  "La deuxième et la troisième exclamation du Cantus avait été copiées par erreur par le scribe d'Apt n°13 au folio 11v"

Il s'agit donc d'un Sanctus bien connu tant en Provence à la cour du pape qu'en Aragon à la cour royale de Jean Ier (1350-1396) ou de son frère et successeur Martin Ier, époux de Maria Lopez de Luna.

 

 

Voûtain III, à l'ouest. Sanctus. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain III, à l'ouest. Sanctus. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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Comparaison avec le manuscrit ms 853d folio 2v. de Barcelone:

"La notation du Tenor est moins serrée que celle du Cantus, qui semble très correcte, bien que des notes isolées remplacent les deux ligatures qui figurent dans les manuscrits. Le Tenor, noté sans texte en clef de fa sur une portée de quatre lignes, commence, comme dans E-Bd853d (dernière portée), par une quaternaria, cependant, les deux ligatures cum opposita proprietate, qui devraient suivre, sont sans hampes vers le haut. Une troisième portée, où on aurait pu noter la troisième voix, est restée vide. Les quelques notes en bas ne correspondent pas à une phrase reconnaissable de la même composition, mais elles contribuent à renforcer le réalisme du rouleau. La place restée vide après la dernière note du Tenor montre que le peintre a voulu superposer deux sections musicales de même longueur. Il a du recevoir des instructions très précises à ce propos, car dans aucune source de la même époque, exception faite des pièces pour orgue, Cantus et Tenor ne se trouvent superposés de cette manière. Au contraire, le Tenor apparaît presque toujours quelques portées plus bas que le Cantus, comme on peut le constater sur le fac-similé du E-Bd853d." (U. Günther, p.110)


 

 

Sanctus, Biblioteca de Cataluña ms 853d folio 2v. reproduit par U. Günther planche XV

Sanctus, Biblioteca de Cataluña ms 853d folio 2v. reproduit par U. Günther planche XV

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Cantus du Sanctus, Biblioteca de Cataluña ms 853d folio 2v. reproduit par U. Günther planche XV

Cantus du Sanctus, Biblioteca de Cataluña ms 853d folio 2v. reproduit par U. Günther planche XV

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Les aquarelles d'E. Faure (1955) :

 

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IV. Voûtain sud qui correspond à l'Ascension : Agnus Dei. Tambour à deux peaux ou à bourdon.

Voûtain IV, au sud. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain IV, au sud. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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Le tambour.

Ursula Günther le décrit comme "tambour à deux peaux et à timbre" : le  tambour médiéval est un instrument à double peaux (dont l’inférieure comporte un timbre réglable), et se tient d’une main ou sous le bras, par poignée en corde tressée. Un système d’accordage traditionnel par bagues coulissantes sur les cordes verticales permet de modifier la tension de la peau frappée.

La musicologue en trouve la présence ici plus surprenante que celle des trois instruments à cordes, typiques des angeli citharizantes : le tambour évoque plutôt le monde des psaumes, et notamment du psaume de louanges 150 verset 4 Laudate eum in tympano et choro, Louez-le avec des tambourins et des danses !

 

 

 

 

Voûtain IV, au sud. Tambour.Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain IV, au sud. Tambour.Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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Partition. Agnus Dei.

Seuls sont inscrits les mots Agnus et Tenor.

La partition a été identifiée comme celle d'un Agnus Dei de la messe de Barcelone, folio 7v , Biblioteca Nacional de Catalunya Ms 971, 14 feuillets, http://www.diamm.ac.uk/jsp/Descriptions?op=SOURCE&sourceKey=62


 

Voûtain IV, au sud. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Voûtain IV, au sud. Transept nord, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

Comparons avec le manuscrit de la messe de Barcelone :

  • http://www.wdl.org/fr/item/14175/view/1/22/

  • http://mdc.cbuc.cat/cdm/ref/collection/partiturBC/id/9376

  • María del Carmen Gómez Muntané, 1989,   "El manuscrito M 971 de la Biblioteca de Catalunya (Misa de Barcelona)", , Bull. Biblioteca de Catalunya vol. X (1982-1984) 1986. Barcelona 1989. En ligne : https://botiga.bnc.cat/publicacions/2516_Gomez.%20Manuscrito.pdf

La Messe de Barcelone est un mélange hétérogène de pièces de la messe ordinaire. Ce serait une petite  anthologie de musique religieuse commandée par un connaisseur en Aragon, soit le roi Jean Ier, soit son successeur Martin Ier. Elle a donc été probablement écrite entre 1395 et 1410, date du décès du roi d'Aragon Martin Ier (M. Gomez). 

Tout d'abord pour la voix supérieure ou Cantus : il y a une concordance quasi parfaite des dix-sept notes, mais aussi de la graphie du A, et bien-sûr de la clef. Sans-doute les notes sont-elles un peu rebelles, à Kernascléden, à la discipline de la portée, mais si, dans le calme d'un scriptorium, copier de la musique est déjà une tache réservée à un copiste spécialisé, on doit imaginer la difficulté de copier un manuscrit, sur un plafond courbe et en pente oblique, et juché sur un échafaudage.

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Agnus Dei, Missa Barcelona Ars Nova, folio 7v, Biblioteca Catalunya M 971.

Agnus Dei, Missa Barcelona Ars Nova, folio 7v, Biblioteca Catalunya M 971.

Passons maintenant à la partie ténor : là encore, elle correspond à la première partie ténor de la messe de Barcelone. (cliquez sur la partition).

La copie est si fidèle que les notes noires qui sont traversées (coupées en deux) par le trait rouge de la portée sont reproduites sur le voûtain, coupées en deux par une ligne blanche. Enfin, la forme curieuse de la lettre T se comprend mieux lorsque l'on voit le modèle que le peintre a suivi.

Il faut être aussi attentive et spécialisée que Ursula Günther pour remarquer (p. 111) que :

"dans la séquence descendante du Cantus le quatrième motif de tierces est défiguré par un saut trop grand et au Tenor , noté sans texte comme une partie instrumentale, la ligature aurait dû se terminer par deux notes liées en forme oblique, nécessaire pour indiquer une brève finale au lieu d'une longue."

Elle ajoute ce commentaire sur le manuscrit :

"Le Tenor, dépassant en longueur la voix supérieure, s'arrête sur deux la, qui, dans la version vocale, tombent sur les deux syllabes de dei. Il s'agit d'un motif répété successivement par le Contratenor I, puis par le Cantus. Des imitations strictes ou purement rythmiques apparaissent, toujours liées à une répétition du texte, à plusieurs endroits de la composition, chaque fois montant de bas en haut sans participation du Contratenor II. Dans le manuscrit, les deux contre-ténors sont dépourvus de texte. Par contre, c'est uniquement le Contratenor II qui diffère des autres voix par sa facture plus instrumentale, à l' »exception du hoquet imitatif du long mélisme final. Des imitations semblables à ceux de l'Agnus Dei se trouvent dans le Sanctus cité auparavant. "

Partie ténor de l'Agnus Dei, Missa Barcelona Ars Nova, folio 7v, Biblioteca Catalunya M 971.Partie ténor de l'Agnus Dei, Missa Barcelona Ars Nova, folio 7v, Biblioteca Catalunya M 971.

Partie ténor de l'Agnus Dei, Missa Barcelona Ars Nova, folio 7v, Biblioteca Catalunya M 971.

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Le tympan de l'arcade méridionale : l'Ascension.

Paul Deschamps estime que cette peinture a été exécutée par le même artiste que la voûte du transept nord. On ne voit que les pieds et le bas de la robe du Christ, qui disparaît dans les nues au dessus des onze  apôtres (dont saint Jean blond et imberbe) et de la Vierge.

L'Ascension, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

L'Ascension, église Notre-Dame de Kerascléden. Photographie lavieb-aile.

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DISCUSSION.

Pour tenter de comprendre quelque chose au sujet que j'aborde ici, j'ai fait appel à quelques bases, que je proposerai ici ; gageons que les esprits chevronnés égarés sur ce blog ne s'en offusqueront pas.


Les instruments.

Les quatre instruments, harpe, vièle à archet, rebec et tambour, sont choisis non pas sur la base d'une pratique instrumentale réelle liée à la messe représentée, mais comme des exemples d'instruments propres aux concerts célestes de la riche iconographie. Madame Günther renvoie par exemple aux 32 anges de la chapelle du Palazzo di Città de Sienne par Taddeo di Bartoldo (1407), car les ensembles de quatre instruments associent 3 instruments à cordes et un instrument à percussion (tambour, cimbales, timbales, triangle):

Sasetta, 1437, polyptique de Borgo san Sepolcro.

 

La musique.

 

Elle est référencée par le site DIAMM sous la référence F-K: lien :

http://www.diamm.ac.uk/jsp/Descriptions?op=SOURCE&sourceKey=686

Elle a été analysée par les musicologues Ursula Günther et Maria Gomez.

 

 Les partitions réunissent quatre pièces, Gloria, Credo, Sanctus et Agnus Dei, d'une messe à deux voix, voix supérieure (Cantus) et Ténor sans parole. Le manuscrit copié ici, s'il existe, n'a pas été retrouvé, mais chaque pièce trouve sa source dans des musiques à trois voix identifiées par Ursula Günther dans des manuscrits aragonais de Gérone et de Barcelone, ou se rapproche d'œuvres retranscrites sur les manuscrits avignonais d' Apt ou d'Ivrea . L'ensemble est homogène, car les quatre morceaux sont liés par le même mode, le mode de Ré ou dorien. Le Sanctus et l'Agnus Dei ont aussi en commun la même mesure, temps imparfait avec prolation* mineure, et le même mouvement rythmique syncopé, incluant parfois (Agnus) "des sections syllabiques en imitations rythmiques à hoquet" et un "style mélismatique". 

* Prolation :Aux XIVe et XVe siècles, division par deux ou par trois de la semi-brève (l'équivalent de la ronde actuelle). La prolation était dite mineure lorsque la semi-brève était divisée en 2 minimes (l'équivalent de deux blanches actuelles). La prolation était dite majeure lorsqu'on divisait cette figure de note en 3 minimes. (Wiktionnaire)

Il s'agit donc d'une messe complète à trois voix d'origine aragonaise ou avignonaise, dont les fresques ne donnent que les deux parties principales sans paroles au ténor. Elle se donne peut-être dans le cadre d'une pratique à une voix et un instrument, comme peut le faire croire le duo angélique d'un instrumentiste et d'un lecteur de partition, mais la peinture n'a pas obligatoirement valeur documentaire sur la pratique musicale. En somme, les experts parlent désormais  d'une "Messe de Kernacléden" et l'étudient au même titre que la "Messe de Barcelone" ou la "Messe de Toulouse", par exemple. 

J'en rappelle les concordances qui sont les suivantes :

 

– Concordances du Sanctus:

  • 1.Apt, Cathédrale Sainte-Anne, Bibliothèque du Chapitre, 16bis, fol. 11v
  • 2.Barcelona, Biblioteca de Catalunya, BM 853c/d, n°3 fol. 2v
  • 3.Gerona, Archivo Capitular, frag. 33/II; fol. 2v-3

– Concordance de l'Agnus Dei :

  • 1. Barcelona, Biblioteca de Catalunya, BM 971 fol. 7v

– rapprochement du Credo (Patrem)

  • Kirie d'Ivrea n°27
  • Patrem Ivrea n°52
  • Sanctus  Apt n°27

​– Rapprochement du Gloria (Et in terra) :

  • Kirie I , Barcelona, Biblioteca de Catalunya, BM 971

 

 

 

Le développement de la musique polyphonique à la cour papale à Avignon est bien argumentée dès Clément V et jusqu'à Grégoire IX (1305-1377), période pendant laquelle Avignon devient le premier centre de musique polyphonique sacrée. Jean XXII avait d'abord montré son  désaccord avec les innovations musicales de Philippe de Vitry (qui avait publié vers 1320 à Paris son fameux traité Ars Nova qui modifiait la Notation musicale), mais il finit par lui témoigner son estime en le comblant de bénéfices et en l'invitant à Avignon. Cette importance de la Cité des Papes en matière musicale persista pendant le Grand Schisme (1378-1418), et la co- existence d'un pape à Rome. En 1394, le cardinal Pedro de Luna fut élu pape à Avignon.  En 1410, avant le concile de Pise,  la chrétienté resta alors partagée en trois obédiences, et si la France soutient  (avec l'Angleterre, la Pologne, la Hongrie, le Portugal, les royaumes du Nord, avec une partie de l'Allemagne et de l'Italie), le pape Jean XXIII, installé à Pise, par contre le duché de Bretagne soutient (avec des royaumes de Castille, d'Aragon, de Navarre, d'Écosse, du duché de Bretagne, des îles de Corse et de Sardaigne, des comtés de Foix et d'Armagnac)  celle de Benoît XIII en Avignon. Grégoire XII, pape de Rome est soutenu par diverses villes d' Italie et d'Allemagne. Les liens entre le duc de Bretagne Jean V et la cour du pape Benoît XIII sont donc privilégiés.

 

  Avignon est alors en rapport avec deux autres centres de la polyphonie, la cour des rois d'Aragon Pierre IV (1355-1387),  Jean Ier (1387-1396) et Martin Ier (1396-1410) et celle de Gaston Phébus (1343-1391), comte de Béarn et de Foix.  "Déjà en 1379, l'infant aragonais , le futur roi Jean Ier, avait demandé au pape [Clément VII] de lui envoyer sept chanteurs d'Avignon le chant complet de la messe d'un certain livre [.... ]. Puis, sous le pape aragonais Benoît XIII, auparavant cardinal Pedro de Luna, les liens entre la cour papale d'Avignon et la cour royale d'Aragon sont devenus encore plus étroits que sous Clément VIII" (U. Günther). En effet, le pape est alors un cousin de la reine d'Aragon, Maria  Lopez de Luna (1357-1406).

https://books.google.fr/books?id=DQ4uY3zvpA0C&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q=avignon&f=false

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L'écriture musicale.

"La notation proportionnelle des figures de notes date approximativement du XIIe siècle. Jusqu'au XIe siècle, la notation musicale n'intègre que les hauteurs par un système d'accents appelés neumes. Les neumes ne prennent pas en compte le rythme : en effet, celui-ci est supposé découler du rythme libre du texte chanté. Au cours de la deuxième moitié du XIe siècle, les neumes évoluent de manière à indiquer des durées différentes à partir de leur forme : désormais, les valeurs rythmiques sont déterminées plus rigoureusement.

Au cours des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, on emploie la notation carrée. Ce premier type de notation proportionnelle est constitué de figures noires en forme de carrés ou de losanges, et tracées à la plume d'oie — il sera définitivement associé à la notation du plain-chant. Au XVe siècle, on utilise la notation blanche : les notes sont toujours carrées, mais à côté des figures noires, apparaissent des figures blanches. Ce n'est qu'au XVIe siècle, grâce aux progrès de l'imprimerie musicale, que se généralise progressivement le système de notation actuel, appelé « notation arrondie ». " (Wikipédia)

Nous avons affaire ici à une notation noire : lisons Ursula Günther.

"Vers 1470 — datation des fresques proposée par Dominique Berthou— ce style musical, vivant à peu près entre 1370 et 1410, a été dépassé. La notation noire et le répertoire du XIVe siècle disparaissent déjà vers 1430, avec la diffusion du style nouveau, plus simple et plus harmonieux de Dufay et de ses contemporains. En outre, la notation noire n'apparaît que très rarement sur les œuvres d'art de la deuxième moitié du XVe siècle.[...] Par contre, la notation blanche se trouve souvent sur les peintures de la même époque, bien que rarement avant 1450. Dans les peintures plus anciennes, il s'agit presque toujours d'une citation d'une authentique mélodie grégorienne en notation carrée" (p. 116)

La musicologue en déduit qu'il est très probable que ces fresques "appartiennent déjà à la chapelle plus petite ou inachevée des années 1430 à 1448".

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L'origine de la musique peinte à Kernascléden.

Ursula Günther ayant montré l'origine aragonaise ou avignonaise de la Messe de Kernascleden, et ayant proposé une datation antérieure à 1450, donc sous le duc Jean Ier (1399-1442), elle fait remarquer  que le duc était le fils de la princesse espagnole, Jeanne de Navarre. Surtout, elle établit le lien entre ces données, et l'arrivée en Bretagne du prédicateur dominicain Saint Vincent Ferrier. Vincent Ferrier est né à Valence (couronne d'Aragon), et a vécu longtemps proche du cardinal Pedro de Luna, qui, devenu pape en  1394, l'appela à Avignon  et en fit son confesseur ; mais en 1416, devant les décisions du Concile de Constance, Vincent Ferrier renonça à soutenir l'antipape Benoît XIII  — dont les partisans furent écrasés par  Sigismond de Luxembourg — et à reconnaître le pape romain. C'est alors, en 1417, que le duc Jean V appela Vincent Ferrier en Bretagne afin d'évangéliser le duché. Sillonnant toute la Bretagne pendant deux ans, il se rend notamment à Josselin, où le vicomte de Rohan Alain VIII possède son château. Peut-être précha-t-il aussi à Kernascléden ?

Les relations entre le duc Jean V et le vicomte Alain VIII de Rohan (dont les armoiries timbrent les voûtes de la chapelle) et Avignon, et le royaume d'Aragon passent donc par Vincent Ferrier, qui décéda à Vannes en 1419. Il est bien connu que Jean Ier était très soucieux de musique sacrée. Mais Dom Lobineau mentionne que Vincent Ferrier était très attentif à la pratique musicale, se faisant accompagné dans ses missions par un orgue, chantant la messe et composant des hymnes dont il imposait le chant à ses fidèles. 

Madame Günther propose donc d'imaginer que la messe de Kernascléden "peut avoir été copiée d'après un manuscrit ou un rouleau qui avait appartenu à Vincent et que ses admirateurs croyants ont choisi comme modèle de la musique céleste". Ce serait même peut-être Vincent qui aurait été à l'origine de la célèbre Danse macabre de Kernascléden, peint dans le même transept que le Concert des anges : ce serait là le support idéal d'une prédication de conversion opposant les affres terribles de l'Enfer (au sud) avec les béatitudes des Cieux (au nord). Elle suggère même de reconnaître le dominicain parmi les personnages de la danse macabre. Le manuscrit musical aurait donc été apporté en Bretagne par Vincent Ferrier et ses cinq compagnons. Mais elle veut bien admettre que ce manuscrit a pu être apporté d'Avignon ou d'Aragon par "un peintre, un pèlerin, ou plutôt vec la dot d'une princesse espagnole mariée en Bretagne", comme "Jeanne de Navarre, Jeanne de Navare dite La Jeune, et Yolande d'Anjou, fille de Louis II, duc d'Anjou et roi de Sicile et de Yolande d'Aragon".

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Document : Vincent Ferrier en Bretagne.  J.C. Cassard, 1999.

 

 

"L’initiative [de sa venue] revient sans conteste au duc Jean V (1399-1442) : Jean Bernier témoigne être allé sur son ordre porter un message à Vincent par trois fois alors que le dominicain se trouvait en Auvergne puis dans la France moyenne – au Puy-en-Velay, à Bourges, enfin à Tours. Angers constituera son ultime étape dans le royaume : il y passe un mois complet puis, descendant le fleuve sur une barge, il arrive à Nantes le 8 février 1418, accueilli sur la rive par l’évêque de la ville entouré de son clergé. De là il prend la route vers Vannes.

Les étapes de son périple breton

A chaque halte, le même scénario se répète dans ses grandes lignes. Attendu par les notables de l’endroit, Vincent Ferrier leur apparaît au détour du chemin chevauchant une ânesse ou une mule de médiocre valeur : son humble monture est en harmonie avec l’image qu’il véhicule, celle d’un humble clerc au service des pauvres et de l’Eglise. En général il descend chez un bourgeois de l’endroit quand il n’y a pas pour l’abriter un couvent de son ordre (comme à Nantes, Dinan et Rennes) ou quelque autre maison de réguliers (bénédictine comme Saint-Sauveur de Redon où il effectue deux séjours de huit jours chacun, les prieurés Saint-Nicolas de Ploërmel et Saint-Martin de Josselin ; ou cistercienne comme Prières, où il descend à la demande expresse de l’abbé). L’entrée d’un visiteur aussi insigne draine la foule des dévots et des badauds, qui se retrouvent encore plus nombreux à l’heure du sermon annoncé : le héraut du roi d’Angleterre est seul à avancer un chiffre, 30 000 personnes à Rennes, très exagéré, mais partout il faut beaucoup d’espace libre pour contenir la foule. La Grande Place de la ville est réquisitionnée à Dinan, un cimetière puis la place devant la cathédrale à Nantes, l’espace découvert entre la maison des frères Prêcheurs et les murailles à Rennes, etc. Partout on a installé auparavant une haute chaire à prêcher montée sur des tréteaux amovibles, un “ tabernacle ” voire un “ théâtre ” – et ce jusque dans des bourgs aussi modestes que Theix et Questembert, mais il lui arrive aussi de parler à l’intérieur des murs de la clôture d’un monastère, comme à Redon ou à Prières, ouvert ou non aux laïcs de l’endroit pour l’occasion. A suivre les témoins, il se serait adressé au peuple chaque jour ou presque.

[...]

L’orateur sacré : L’art de la prédication cléricale atteint son plein développement au XVe siècle : maître Vincent en incarne aussi bien les vertus que les tares. Il s’agit d’abord d’un grand spectacle mis en scène avec soin, orchestré dans un crescendo dramatique. Le prêche s’inscrit, tel un morceau de choix, dans le cours d’une messe solennelle célébrée par le prédicateur avec ses aides. L’attente du grand moment se prolonge ainsi, au chant des psaumes, tandis que les fidèles s’impatientent : une fois l’auditoire suffisamment “ chauffé ”, maître Vincent escalade avec peine les tréteaux qui lui serviront de piédestal, et le spectacle commence.

[...] Bon connaisseur des choses de la chaire, dom Yves, l’abbé cistercien de Notre-Dame de Lanvaux, fait part de son admiration devant la technique consommée du Valencien : “ Lorsqu’il parlait des vices ou des peines de l’Enfer, il paraissait terrible et sévère, si bien que beaucoup de ceux qui l’entendaient étaient saisis de terreur ; mais lorsqu’il parlait de Dieu, des vertus et des joies du Paradis, il paraissait doux et miséricordieux, en sorte qu’il ramenait ses auditeurs les plus rudes à la dévotion et les poussait à la contrition ”.

[...] Les thèmes directeurs de ces interminables harangues sont quelquefois signalés, mais aucun texte complet de sermon prononcé en Bretagne ne nous est parvenu. On remarque que Vincent n’innove guère en apparence dans ses thèmes et son enseignement : se contentant de rappeler les grandes lignes du credo chrétien et les fins dernières de l’homme, il annonce aux pécheurs quel sort épouvantable sera le leur pour les siècles des siècles s’ils ne viennent pas à résipiscence immédiate et n’amendent pas leur vie alors qu’il en est encore temps, apprend aux bons chrétiens respectueux du clergé et fidèles à leurs obligations morales qu’ils connaîtront bientôt les joies béatifiques... Rien de bien original dans tout cela, sinon la qualité de la prestation jouée par un acteur au summum de son art. A regarder de plus près les dépositions qui disent un mot du contenu de ses prêches (une vingtaine), l’essentiel de ses homélies paraît en fait dévolu à une sorte de catéchèse élémentaire."

 

La peinture.

"La gamme des couleurs est distribuée avec un goût exquis. Sur un fond de rose éteint se détachent les silhouettes des anges avec leur robes ou leurs chapes aux teintes variées, vert lumineux, rouge ardent, jaune ou chamois, leurs chevelures dorées et leurs visages comme poudrés à l'excès et d'une blancheur d'autant plus éclatante qu'ils sont encadrés de larges auréoles d'une tonalité très soutenue et cerclées de noir, enfin de longues ailes ocellées imitant les plumes de paon. Ces anges et la scène de l'Ascension ont été exécutés par le même artiste. Ce sont les mêmes visages larges sans modelé, trop blancs, et seuls les yeux font deux taches dans ces figures blafardes et fort peu expressives. mais cet ensemble  plein d'attrait et d'originalité. On ne trouve pas d'œuvres à quoi on puisse le comparer."  (Paul Deschamps, 1957). 

Dominique Berthou remarquera aussi que le style de l'Ascension et des peintures des anges musiciens est différent de celui des autres peintures du chœur : elle constate la physionomie très particulière des personnages, au visages large à pommettes saillantes, aux yeux fendus, au nez épaté et aux sourcils marqués, ce qui l'amène à suggérer que l'artiste a pu faire appel à des modèles ...locaux.

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La chapelle de la Vierge de la cathédrale du Mans. Une source ?

La voûte de la chapelle de la Vierge de la cathédrale Saint-Julien présente un concert céleste de 47 anges peints sur un fond rouge profond. Commandée par l'évêque Gontier de Baigneux évêque du Mans de 1367 à 1385, cette peinture disparue sous un badigeon au XVIIIème siècle, fut redécouverte en 1842, et  restaurée seulement en 1995 : elle a pu être méconnue par les auteurs de référence de l'église de Kernascléden. Présentons la brièvement. Parmi les instruments à cordes se trouvent la harpe antique, la mandore, le psaltérion, la vielle à bras, la vielle à roue, le monocorde, parmi les instruments à vent, la buisine (ou trompette), le cor, la cornemuse, la flûte double, la chalémie, l'orgue à main, et pour les instruments à percussion, les cymbales, le tambour, le trépié (ou triangle), le hodret et enfin le très rare «eschaquier d'Engleterre» dont parle Guillaume de Machaut (1284-1377), typique du XIVe siècle puisqu'il qu'à cette date et disparaît dès le XVe siècle. Quant aux anges qui ne jouent pas d'un instrument, ils présentent le répertoire musical distribué selon plusieurs types de documents : des phylactères sur lesquels on peut lire des textes latins en l'honneur de la Vierge Marie et qui correspondent souvent à la première phrase d'une pièce musicale; des rouleaux de parchemin comportant, en plus du texte en latin, une notation musicale (notation carrée) comme le font également les Codices que les anges tiennent ouverts.

 

Document. Un article d'André Mussat.

 

"Le Congrès archéologique de Cornouaille en 1957 publia une notice de P. Deschamps sur Kernascleden essentiellement consacrée à l'iconographie des célèbres fresques, sur lesquelles le peintre Maurice Denis avait en 1910 dit son émerveillement (Théories, p. 125). L'étude stylistique reste à faire, mais Mme Ursula Günther, professeur de musicologie à l'Université de Göttingen, a apporté récemment des éléments très nouveaux sur lesquels il convient de revenir. Rappelons d'abord que cette chapelle tréviale (aujourd'hui église paroissiale) est une fondation de la famille des Rohan sur les terres desquels elle se trouve, exactement dans le domaine des Rohan-Guéméné et dans l'ancien diocèse de Vannes (contrairement à ce que le Congrès de Cornouaille pourrait faire croire). En 1430, le pape Martin V autorisa Alain IX de Rohan à y installer des chapelains. A la clef de la croisée du transept figurent les armes du duc Jean V et son épouse Jeanne de France (f 1433). Le chœur fut construit ou reconstruit en 1453 et voûté d'ogives en 1464 d'après une inscription encore en place, que confirment les clefs aux armes du duc et des Rohan, Louis II de Rohan- Guéméné et Jean II de Rohan, vicomte du Porhoët.

 "Les peintures murales se trouvent à la voûte du transept nord et aux murs du transept sud ainsi qu'à la voûte du chœur. Les thèmes sont le Paradis, représenté par des anges musiciens, l'Enfer et la Danse macabre ; dans le chœur, la Vie de la Vierge et aux tympans, entre grandes arcades et formerets de la voûte centrale, la Passion du Christ. P. Deschamps ne proposait point de datation et s'en tenait à ce que les textes et l'inscription laissaient entrevoir. Il remarquait seulement « Les peintures de la voûte du bras nord du transept durent être exécutés après celles du chœur puisqu'elles constituent la suite du récit ». Or, Mme Günther apporte des repères nouveaux fort intéressants. C'est la regrettée Geneviève Thibault qui en 1970-1971 ouvrit le dossier. En 1976, notre collègue de Göttingen put le reprendre. Il s'agissait, comme cela avait été fait à l'oratoire du château des d'Harcourt à Montreuil-Bellay, dans le Saumurois, d'identifier la musique que chantaient les anges du transept nord. Une savante analyse aboutit à des conclusions précises : il s'agit de musique espagnole. Dans chaque voûtain, deux anges : l'un tient un instrument de musique et l'autre, un rouleau sur lesquels se lisent le début d'un Sanctus, d'un Agnus Dei ; un Et in terra évoque le Gloria, et Patrem le Credo. La comparaison de ces textes, de leurs modes de notation permet de dire qu'il s'agit d'une messe complète d'origine espagnole ou avignonnaise. Elle est proche en effet de textes aragonais connus aussi à Avignon (le pape Benoît XIII, en 1394, était un cardinal aragonais). Même si le chant de toutes les parties n'est pas indiqué, il semble que la messe soit une messe à trois voix, le peintre gêné par le manque d'espace étant passé d'une partie à l'autre. Mme Günther fait alors remarquer que « vers 1470 le style musical vivant à peu près entre 1370 et 1410 a été dépassé. La notation noire et le répertoire du xive siècle disparaissent déjà en 1430. » Elle est extrêmement rare dans les œuvres d'art de la seconde moitié du siècle, ce qui tendrait à admettre que ces peintures ont été exécutées peu après l'érection du transept dans les années 1430.

"Comment expliquer cette origine aragonaise ? Notre collègue retient deux hypothèses. D'abord, la venue dans le Vannetais en 1417-1419 du dominicain espagnol Vincent Ferrier protégé de Benoît XIII, mort à Vannes après une prédication pleine de violence infernale qui remua les foules bretonnes comme elle l'avait fait dans la Catalogne troublée de ce temps. Vincent fut enterré dans la cathédrale de Vannes, où vint le rejoindre à sa demande en 1433 la duchesse Jeanne de France. Le duc envoya à Rome un procureur pour obtenir la canonisation du dominicain. La présence de ce dernier en 1418 à Josselin et Guémené, dans les 13**terres des Kohan, est attestée. Mme Günther remarque que les thèmes de la Danse macabre, de l'Enfer et du Paradis musical « correspondent parfaitement à, la pensée de Vincent Ferrier », les Dominicains ayant peu à peu abandonné à cette époque l'interdiction de 1242 de la polyphonie dans leurs offices. Notre collègue mentionne sans beaucoup la retenir, une autre hypothèse, celle des alliances des Rohan ou même du duc. Charles de Rohan-Guéméné, dont les armes sont à la clef du transept sud, était le fUs de Jean Ier de Rohan et de sa seconde épouse (1386) Jeanne de Navarre la Jeune. Le duc Jean V était le fils de la troisième femme de Jean IV, Jeanne de Navarre, fille de Charles le Mauvais. On pourrait cependant ajouter à cette remarque que Jeanne de Navarre la Jeune, était la sœur de Charles le Noble dont le mausolée fut édifié dans la cathédrale de Pampelune par un sculpteur tournaisien. R. Coufîon (Bulletin monumental, 1967, II, p. 167) l'a judicieusement comparé au cénotaphe du connétable de Clisson et de son épouse à Josselin. Les Rohan, par leurs alliances et leur rôle politique, s'inscrivent dans le mouvement artistique international. Les peintures de Kernascleden ne sont pas un fait isolé. La vie de saint Mériadec au chœur de Stival, près de Pontivy, les fresques disparues de Notre-Dame du Roncier à Josselin dans la chapelle privative de Sainte-Marguerite et dans une chapelle nord où se trouvait une Danse macabre, enfin l'étonnante découverte récente du lambris du chœur de Notre-Dame de Carmes en Neuillac avec des anges musiciens (Bulletin monumental, note B. Mouton, 1984/1, p. 95), tous les décors montrent une remarquable diversité des artistes, leurs niveaux fort différenciés, ce qui confirme les études sur Kernascleden. Je noterai enfin que le thème du Paradis musical est bien connu dans le principat breton aussi bien dans les réseaux des fenêtres flamboyantes qu'à des endroits inattendus comme, à Saint- Armel de Ploermel, cet ange au luth admirablement représenté sur l'entrait qui surplombe le sanctuaire. Les anges du chœur de Notre-Dame de Carmes chantent des musiques notées à la gloire de la Vierge.

  "Les remarques musicologiques de Mme Günther obligent à une nouvelle réflexion sur la chronologie de Kernascleden. P. Deschamps avait remarqué à juste titre la ressemblance de style de la voûte du transept nord et de la scène de l'Ascension, peinte sur le tympan entre la grande arcade nord de la croisée et le formeret de la dite voûte. Cela est certain : même façon d'envelopper les silhouettes en grandes courbes liées entre elles, mêmes visages arrondis, mêmes auréoles ornées. Or cette main ne se retrouve pas dans les scènes des tympans du chœur : la manière est plus sèche, plus anguleuse dans les draperies, par exemple dans la Montée au Calvaire, la Crucifixion ou la Résurrection. Le goût de la narration pittoresque du drame est affirmé par la multiplication des détails réalistes des hommes d'armes en particulier. La technique est aussi différente puisque la Passion est peinte directement sur le mur alors que l'Ascension est exécutée sur un mortier comme la voûte proche. L'œuvre du transept nord n'est pas non plus de la main de l'artiste exceptionnel qui exécuta sur les voûtains du chœur la Vie de la Vierge. Effets de perspective, association du carrelage et de fonds architecturaux, finesse des traits de pinceau des figures et des vêtements, diversité enfin des mises en scène, tels sont les caractères d'un peintre très au courant de l'art de son temps. La finesse d'exécution n'est pas sans rappeler tel vitrail de Louvigné-de-Bais alors que la recherche de la perspective fait penser aux vitraux de Lantic (1464). Toutes ces remarques — et il en faudrait bien d'autres — confrontées à ce que nous apprend la lecture de la musique angélique amènent à se demander si le thème iconographique du Paradis, de l'Enfer et de la Danse macabre ne fermait pas un ensemble iconographique cohérent, exécuté dans les années 1440 avec d'ailleurs une extrême diversité de mains. Cette date nous rapprocherait soit du souvenir des prédications de l'Espagnol et des manuscrits qu'il aurait pu apporter, soit des alliances navarraises de Jean V et de Charles de Rohan-Guéméné. L'Ascension pourrait être considérée en soi comme l'introduction du Paradis ou bien en fragment, en rapport avec le décor du chœur antérieur à celui de 1453- 1464. Tous les problèmes ne sont certes pas résolus et ne peuvent l'être que dans une reprise d'ensemble des questions du décor peint. Mais les remarques musicologiques de Mme Ursula Günther sont capitales : exemple heureux de ce que peuvent s'apporter des lectures d'oeuvres à partir d'approches différentes. " André Mussat. 

  En 1976, la musicologue Ursula Gunther a étudié l'origine des partitions tenues par les anges.  En 1993, Gérard Lomenec'h a écrit un livre, Chantres et Menestrels à la Cour de Bretagne, attirant l'attention sur ces découvertes. En 1996, Agnès Brosset a dirigé l'enregistrement de la Messe de Kernascléden par  le groupe vocal féminin Colortalea , et Gérard Lomenec'h a composé le livret d'accompagnement du CD édité aux Editions du Layeur sous le titre Musique sacrée au temps de Ducs. Saint Vincent Ferrier et la messe de Kernascléden. 

 Composition du CD :Escalibur (Coop Breizh) CD866 [CD]  1 Introduction (Anon., Barcelona 971) 2. Kyrie (Suzay, Apt MS no. 37 16bis). 3 Gloria (Anon., Ivrea, no 52) Credo (Anon., Gerona F ZV 3 EG no. 4). 4 Sanctus-Benedictus (Anon., Barcelona 971)  5. Agnus Dei (Anon., Barcelona 971).  Libre Vermel de Montserrat. : 56' 11".  

 

 

 

 

SOURCES ET LIENS.

 

— Anexo:Fuentes musicales de la Edad Media de España 

  • https://es.wikipedia.org/wiki/Anexo:Fuentes_musicales_de_la_Edad_Media_de_Espa%C3%B1a
  • https://es.wikipedia.org/wiki/Anexo:Fuentes_musicales_de_la_Edad_Media_de_Espa%C3%B1a#Gerona.2C_Archivo_Capitular.2C_frag._33.2FII

APEL (Willi), 1998,  La notation de la musique polyphonique 900-1600 Ed. Mardaga,

https://books.google.fr/books/about/La_notation_de_la_musique_polyphonique_9.html?id=BLPwI2rW71kC&redir_esc=y

Notation : http://www.unige.ch/lettres/armus/music/devrech/notation/pr_en_savoir_plus_f.html

http://photo2breizh.eklablog.com/l-harmonie-du-style-gothique-flamboyant-breton-a-kernascleden-a114159320

Photographies du relevé par aquarelle réalisé en 1955 par Elisabeth FaureFonds de prises de vues du Centre de Recherche des Monuments Historiques 1996/089-Relevés de peintures murales, Ministère de la Culture (France) - Médiathèque de l'architecture et du patrimoine - diffusion RMN

 CASSARD (Jean-Christophe), 1999. "Un Valencien en Bretagne au XVe si`ecle : Vincent Ferrier (1418- 1419)". Triade (Galles-Ecosse-Irlande), 1999, pp.167-174.

— DESCHAMPS (Paul), 1957, "Notre-Dame de Kernascleden", Congrès Archéologique de France vol. 115, Société Française d'Archéologie, pp. 102-113.

 — FERRARO  (Séverine ), 2012, "Les images de la vie terrestre de la Vierge dans l’art mural (peintures et mosaïques) en France et en Italie Des origines de l’iconographie chrétienne jusqu’au Concile de Trente ", Thèse Pour obtenir le grade de Docteur de l’Université de Bourgogne en Histoire de l’art médiéval Le 8 décembre 2012 UNIVERSITÉ DE BOURGOGNE Ecole Doctorale LISIT UMR ARTeHIS

https://halshs.archives-ouvertes.fr/tel-00841816/file/these_D_FERRARO_SEVERINE_2012_Annexes.pdf

— — GOMEZ MUNTANÉ (Maria del Carmen), 1989,   "El manuscrito M 971 de la Biblioteca de Catalunya (Misa de Barcelona)", , Bull. Biblioteca de Catalunya vol. X (1982-1984) 1986. Barcelona 1989. En ligne : https://botiga.bnc.cat/publicacions/2516_Gomez.%20Manuscrito.pdf

GOMEZ MUNTANÉ (Maria del Carmen), 1985, Quelques remarques sur le répertoire sacré de l'Ars nova provenant de l'ancien royaume d'Aragon, Acta Musicologica, Vol. 57, Fasc. 2 (Jul. - Dec., 1985), pp. 166-179. la page 173 fait mention de Kernascléden. : 

https://www.academia.edu/11453154/Quelques_remarques_sur_le_r%C3%A9pertorire_sacre_de_lArs_nova_provenant_de_lancien_royaume_dAragon

GOMEZ MUNTANÉ (Maria del Carmen), 2001, La música medieval en España, https://books.google.fr/books?id=adrDo2AvfDMC&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

— GUILBAULT (Julien) 1997, « Les anges musiciens de la cathédrale du Mans » dans 303, Arts, recherches et créations, La Revue des pays de la Loire, LU, 1er trimestre 1997, p. 124-137. 

— HOPPIN (Richard H.) 1991, La musique au Moyen Âge, Volume 1, Editions Mardaga, 1991 - 854 pages

https://books.google.fr/books?id=DQ4uY3zvpA0C&dq=manuscrit+ivrea&hl=fr&source=gbs_navlinks_s

— LOMENEC'H (Gérard ), 1993, Chantres et ménestrels à la cour de Bretagne, Editions Ouest-France, 1993. 

— LOMENEC'H (Gérard ), 2000 ,Musique sacrée en Bretagne au temps des Ducs. : Saint Vincent Ferrier et la messe de Kernascléden  Editions du Layeur, 2000. 

 MUSSAT (André), 1965,"Ursula Günther, Les anges musiciens et la messe de Kernascleden", dans Les sources en musicologie, actes des Journées d'études de la Société française de musicologie (1979), Éd. C. N. R. S., 1980. Bulletin Monumental, Volume 143 pp. 195-196

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bulmo_0007-473x_1985_num_143_2_4098_t1_0195_0000_3#

 SUBES (Marie- Pasquine),1998,  « Un décor peint vers 1370-1380 à la cathédrale du Mans », Bulletin Monumental  Volume 156 pp. 413-414. 

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bulmo_0007-473x_1998_num_156_4_1850000 

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15 septembre 2015 2 15 /09 /septembre /2015 08:25

Iconographie de saint Christophe : Semur-en-Auxois (c.1372).

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Dans le but de documenter ma thématique de l'iconographie de saint Christophe, je procède ici à un vulgaire copié-collé de la photographie et du commentaire du Musée municipal de Semur-en-Auxois, qui conserve une peinture murale provenant de la Collégiale.

Cet article s'intègre donc dans la série suivante :

Lien : http://www.musees-bourgogne.org/les_musees/musees_bourgogne_gallerie.php?lg=fr&id=42&theme=&id_ville=&id_gallerie=55369

"Attribué à Jean De Bruges
Fresque déposée
Fin XIVe siècle
Provient de la Collégiale de Semur-en-Auxois
Inv. 989.16.1
Musée de Semur en Auxois 

C’est en 1977, à l’occasion de la restauration du retable de l’Arbre de Jessé que fut découverte l’exceptionnelle peinture murale représentant Saint Christophe dans le bas-côté septentrional du choeur de la collégiale Notre-Dame de Semur-en-Auxois. Cachée à une date inconnue par le retable du XVIe siècle, la peinture se trouvait à proximité de l’entrée de la porte des Bleds, emplacement qui confirme son rôle prophylactique à destination des fidèles. 
La haute stature de saint Christophe portant sur ses épaules l’Enfant Jésus se dessine sur un fond vermillon orné de petits motifs de « S » opposés. Deux éléments rocheux encadrent le cours d’eau où nagent plusieurs espèces de poissons, dont une anguille enserrant le pied du saint. Dans la partie inférieure, un bandeau avec des motifs décoratifs aux extrémités contient une inscription aujourd’hui presque illisible qui devait évoquer le culte du saint. 
Le soin accordé aux détails, le souci de naturalisme évident, la vivacité des coloris et l’expressivité des personnages font de cette peinture une œuvre de toute première importance dans la production picturale en Bourgogne. Les motifs décoratifs répétés sur le fond se retrouvent dans les manuscrits enluminés réalisés dans l’entourage du roi Charles V et permettent d’attribuer cette œuvre à un artiste de tout premier plan. 
Fabienne Joubert avance le nom de Jean de Bruges, artiste flamand au service du roi à partir de 1368 : l’œuvre semuroise est en effet très proche d’une autre œuvre de l’artiste, les cartons réalisés pour la tenture de l’Apocalypse d’Angers. On retrouve le même sens du naturalisme dans les physionomies, les musculatures, les mouvements et la représentation des drapés dans ces deux œuvres. Outre ces analogies de style, les mentions d’un « hanequin le pointre » et d’un « jehan le pointre de bruges » dans les registres de la cour des comptes de Dijon en 1371 et 1372 peuvent venir corroborer cette hypothèse d’attribution. Jean de Bruges a pu travailler pour le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, frère du roi Charles V, en ce dernier tiers du XIVe siècle, et le suivre dans ses déplacements à Montbard et à Semur-en-Auxois. 
Aujourd’hui conservée au musée municipal, l’œuvre souligne la qualité et l’excellence de la création artistique en Auxois à l’époque médiévale, ce que confirme également la production sculptée. "

 

L' inscription, difficile à déchiffrer,  doit être comprise comme :

Christofori sancti speciem quicumque tuetur

Illa namque die nullo languore tenetur

« Quiconque voit l'image de saint Christophe

n'est tenu ce même jour par aucune maladie »

 

La documentation disponible repose sur l'article de Fabienne Joubert, en ligne par Persee

— JOUBERT (Fabienne) 1992 Le Saint Christophe de Semur-en-Auxois : Jean de Bruges en Bourgogne ? Bulletin Monumental Volume 150 pp. 165-177  

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bulmo_0007-473x_1992_num_150_2_4431

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13 septembre 2015 7 13 /09 /septembre /2015 14:51

L'exposition Giacometti aux Capucins de Landerneau, Fonds Hélène et Michel Leclerc. Quelques photos de mes coups de cœur.

Jusqu'au 25 octobre 2015.

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Voir dans ce blog :

L'exposition Miro de 2013 à Landerneau I :

L'exposition Miro de 2013 à Landerneau II

L'exposition Miro de 2013 à Landerneau III

​L'exposition Miro de 2013 à Landerneau IV

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De Giacometti, tout le monde connaît l'Homme qui marche, qui lui est emblématique.

Alberto Giacometti . "L'Homme qui marche" I, 1960. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.
Alberto Giacometti . "L'Homme qui marche" I, 1960. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "L'Homme qui marche" I, 1960. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Mais je ne connaissais pas "La Femme qui marche" . Elle ne marche d'ailleurs pour ainsi dire pas, rien à voir avec les grandes enjambées du précédent ; et rien n'a voir non plus avec la Gradiva du Vatican chère à Freud et qui soulève allégrement son talon. 

La statue de Giacometti a moins de précipitation, plus de prudente gravité, elle avance timidement un pas comme pour le poser sur un tapis rouge,  presque aussi hiératique que l'égyptienne Isis. Mais cette adolescente  connaît déjà l'habile déhanché et la cambrure féline.

 

Alberto Giacometti . "La femme qui marche" 1932, version de 1936. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "La femme qui marche" 1932, version de 1936. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Alberto Giacometti . "La femme qui marche".  1932, version de 1936.Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.
Alberto Giacometti . "La femme qui marche".  1932, version de 1936.Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "La femme qui marche". 1932, version de 1936.Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Alberto Giacometti . "La femme qui marche" .  1932, version de 1936. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "La femme qui marche" . 1932, version de 1936. Bronze. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Le 12 septembre, Cécilia Braschi avait donné une conférence "Copier pour mieux voir ; Giacometti et les artistes du passé",  qui soulignait les relations entre la pratique par Giacometti de la copie des œuvres d'art les plus diverses, et sa tentative d'atteindre, par ce dialogue, la représentation la plus authentique du monde, et du visage. En particulier, Giacometti s'est inspiré des portraits du Fayoum , avec leur stricte frontalité, leur regard de face fixant l'éternité, leurs couleurs ocre et bistres. Avec, dans cette fascination pour les portraits funéraires de l'Égypte romaine, la hantise de la mort.

 

 

Alberto Giacometti . "Tête d'homme sur socle", plâtre peint, vers 1949-1951 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.
Alberto Giacometti . "Tête d'homme sur socle", plâtre peint, vers 1949-1951 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "Tête d'homme sur socle", plâtre peint, vers 1949-1951 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Hantise de la mort aussi dans les œuvres suivantes :

Alberto Giacometti . "Tête sur tige", plâtre peint, 1947 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "Tête sur tige", plâtre peint, 1947 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Alberto Giacometti . "Le Nez", 1947, bronze . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti . "Le Nez", 1947, bronze . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Alberto Giacometti ."Tête-crâne", plâtre , 1934 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Alberto Giacometti ."Tête-crâne", plâtre , 1934 . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Et c'est la même hantise du mort et du vif indissociable dans les noces du regard et de l'orbite  des multiples portraits et têtes sculptées.

 

"Tête d'homme (Lotar I)", vers 1964-65, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Tête d'homme (Lotar I)", vers 1964-65, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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"Giorgio Soavi", 1963, huile sur toile, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Giorgio Soavi", 1963, huile sur toile, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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"Jacques Dupin" (détail), 1965, Huile sur toile, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Jacques Dupin" (détail), 1965, Huile sur toile, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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"Grande tête", 1960, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Grande tête", 1960, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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"Diego, portrait au col roulé", vers 1954, bronze, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Diego, portrait au col roulé", vers 1954, bronze, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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Pour atteindre l'essence de l'être humain, en rendre la meurtrissure ontologique, il faut que sa peau devienne semblable aux murs de l'atelier du 46 rue Hippolyte-Maindron, qu'elle soit blessée par le poinçon,  flagellée par le pinceau, tatouée par le crayon, flétrie par les couleurs qui dégoulinent, qu'elle devienne confuse, hétérogène, avec ses graffiti et ses repeints, ses éclats et ses écailles.

"Tête de femme (Flora Mayo), 1926, bronze, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Tête de femme (Flora Mayo), 1926, bronze, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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"Nu debout sur socle cubique", 1953, et "Femme de Venise V," 1956, plâtre peint, Alberto Giacometti .. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.
"Nu debout sur socle cubique", 1953, et "Femme de Venise V," 1956, plâtre peint, Alberto Giacometti .. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"Nu debout sur socle cubique", 1953, et "Femme de Venise V," 1956, plâtre peint, Alberto Giacometti .. Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

Comme nous sommes loin de la Femme-cuillère aux flancs féconds et aux lignes épurées !

"femme cuillère" 1927, plâtre, Alberto Giacometti  . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"femme cuillère" 1927, plâtre, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"femme plate II", vers 1928-1929, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

"femme plate II", vers 1928-1929, Alberto Giacometti . Landerneau, septembre 2015, photographie lavieb-aile.

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12 septembre 2015 6 12 /09 /septembre /2015 08:12

Iconographie de saint Christophe : le vitrail (vers 1520) de l'église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant (29).

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Les transepts de l'église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant sont éclairés par deux vitraux du début du XVIe siècle, dont, au sud, en baie 2, la verrière qui nous intéresse.

Haute de 2,30 m et large de 1,00 m, elle comprend deux lancettes trilobées et un tympan à un oculus et deux écoinçons.

Elle résulte d'un don du seigneur de Botigneau. En 1505, la seigneurie appartenait à l'écuyer Pierre de Botigneau, et en 1541 à son fils Jean. En 1665, la terre de Botigneau fut vendue à Jean de Penfentenyo. Les seigneurs de Botigneau sont fondateurs de l'église paroissiale, et aussi des chapelles Saint-Jean et Saint-Guénolé qui leur appartenaient privativement ; ils possédaient leur tombe dans le chœur, et leurs armoiries d'azur à l'aigle éployée d'or à deux têtes becquées et membrées de gueules dans les deux vitraux éclairant chacune des chapelles latérales. Les vitraux du transept ont sans-doute été déplacés depuis ces chapelles.

La lancette de gauche est consacrée à une Vierge de pitié. La lancette de droite représente saint Christophe portant l'Enfant. Un soubassement porte une inscription signalant la restauration de Lucien-Léopold Lobin, qui dirigeait alors l'atelier de verrier de Tours, fondé rue des Ursulines par son père Julien-Léopold. Cette intervention a été financée par les Penfeunteniou de Cheffontaines, qui y ont fait apposer leur blason en sommité. Le tympan porte donc les armes de leur ancêtre l'évêque Christophe de Penfeunteniou [Penfentenyo] de Cheffontaines, qui usurpe ici un chapeau de cardinal.

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Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Authenticité des verres.

Roger Barrié en propose le schéma suivant : les zones hachurées sont celles qui sont restaurées.

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Schéma d'authenticité de la baie 2 de l'église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant d'après R. Barrié 1977 : en hachuré les verres restaurés.

Schéma d'authenticité de la baie 2 de l'église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant d'après R. Barrié 1977 : en hachuré les verres restaurés.

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Lancette A : Vierge de pitié.

1,80 m  x 0,43 m.

Selon le Corpus Vitrearum, "les panneaux sont peu restaurés mais le fond de paysage urbain [évoquant Jérusalem] est moderne". Selon R. Barrié, "le tiers inférieur du panneau du bas, tout le fond rouge, les rochers derrière la Vierge et quelques parties de son vêtement bleu sont modernes. Il ne fait pas de doute que c'est à cette occasion [de la restauration par Lobin] que la carnation du corps du Christ, en verre légèrement blanchâtre, fut ravivé par application de sanguine."

On comparera ces panneaux à ceux de la baie 0 de la chapelle de Lannélec à Pleyben pour constater que le même carton a été repris ici, à la même échelle.

Voir

     Vierges allaitantes VII Chapelle Notre-Dame de Lannelec à Pleyben. Chapel Itron Varia Lanneleg. Les vitraux

 mais le vitrail de Clohars-Fouesnant, qui a été estimé dater de 1525 par Roger Barrié qui se fonde sur les armoiries, se place sous un dais Renaissance plus tardif que la niche gothique de Lannelec : cela confirme que le vitrail de Lannelec date du tout début du XVIe siècle. A cette date, Hervé de Lezongar est à la fois recteur de Pleyben et de Clohars-Fouesnant, ce qui rend logique la circulation des cartons ou des artistes entre les deux chantiers.

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Pietà,  baie 0 de la chapelle de Lannélec à Pleyben

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Vierge de pitié, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Vierge de pitié, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Lancette B : Saint Christophe.

"panneau supérieur bien conservé, panneau inférieur complété en 1870", Corpus Vitrearum.

Saint Christophe est représenté selon tous les canons de l'iconographie du XV-XVIe siècle, traversant le fleuve, les jambes – dans l'eau jusqu'au mollet– dirigées vers la gauche tandis que le corps se vrille pour présenter le tronc de face et que le visage se tourne vers le haut et la droite, c'est-à-dire vers l'Enfant. Tout aussi conventionnelle est la posture de l'Enfant-Jésus, blond, nimbé, tenant le globe crucifère qui le désigne comme Sauveur du Monde, et bénissant de la main gauche (c'est la seule atypie, car la bénédiction s'effectue de la main droite). Le front du saint porte un bandeau (jaune d'argent) traditionnel ; la robe verte est serrée par une ceinture blanche.  La couleur rouge du manteau est également une tradition, de même que son pan emporté par le vent et l'élan vers la droite.  Le pan du manteau pourpre de Jésus est, avec une certaine incohérence expliquée par les impératifs du dessin, emporté dans le sens inverse. 


 

Le bâton qui aide le passeur dans sa progression trace une diagonale vers le haut et la gauche, parallèle à l'effort du corps entre la jambe gauche et le bras droit. On sait que le Christ, qui vient de dévoiler son identité au géant terrassé par le poids insolite du gamin, est en train d'annoncer, pour renforcer Christophe dans sa foi, que ce bâton reverdira une fois qu'il sera rentré chez lui.

  Bref, nous trouvons ici une image semblable à celle élaborée dans les enluminures des livres d'Heures, puis les statues et les vitraux, mais ce vitrail en donne un parfait exemple. Cette iconographie rassemble toute son énergie dans l'échange des regards, qui concentre dans ce rapport invisible tout le mystère de la conversion ; or, à Clohars-Fouesnant, l'intensité et l'éloquence de cet échange sont parfaitement rendus. Le visage de Reprobus (l'ancien nom du géant mercenaire avant qu'il ne devienne Christo-phorus, "porteur du Christ") mélange la surprise avec la confiance, tandis que l'attitude attentive du Christ porte avec elle toute la capacité de Jésus de susciter cette adhésion à le suivre. Ce saint protecteur des passages, transitions, seuils, ponts, des voyages et des pèlerinages est aussi le saint de la rotation radicale de l'âme (latin verto, versus "tourner"), de la con-version, du boule-verse-ment, du chavirement de l'être après une rencontre, après un face-à-face avec une épiphanie ou manifestation du divin. Christophe porte non seulement l'Enfant, il porte aussi avec lui toutes les scènes de rencontres individuelles du Christ  avec un interlocuteur (souvent une interlocutrice) dans les Évangiles, qui sont des rencontres de tutoiements et de regards.

Ce n'est pas sans émotion qu'après avoir écrit ces lignes, j'ai lu le texte de Roger Barrié qui écrit : "Autour du point essentiel que constitue la rencontre des regards de l'homme et de l'enfant, la scène s'organise selon deux obliques symétriques, accentuées par les masses symétriques du mantelet de l'enfant et de la cape du saint."... Puis, je découvre que cet auteur a lui aussi remarqué que ces pans de vêtement sont d'habitude situés du même coté. Et quelques lignes plus loin, il constate la bénédiction christique donné de la main gauche, et l'attribue "peut-être à l'inversion due à l'adaptation réalisée pour le carton du vitrail".

 Soucieux d'établir une filiation entre l'art de la peinture sur verre en Bretagne et les relations économiques de l'ancien duché avec la Flandre, il étudie l'iconographie dans les gravures germano-flamandes "qui véhiculèrent les modèles iconographiques affectionnés un peu avant 1500" :

"La royauté de l'enfant tenant le globe du monde surmonté d'une croix, par ailleurs attestée dès le XIVe siècle dans la miniature, s'affirme à partir de 1460 dans les estampes allemandes, telles celles du Maître de Saint-Sébastien de Cologne. Peu après cette date apparaît aussi une disposition qui rejoint, avec saveur, celle de la "sacra conversazione" : au beau milieu de la rivière, le saint tourne la tête vers l'enfant qui se fait reconnaître, comme le montre les gravures du Maître de Saint Jean-Baptiste, du monogrammiste E.S de Constance, et celle, plus tardive, du monogrammiste HS de Nuremberg. Enfin, c'est entre 1480 et 1503 que des maîtres plus tournés encore vers les Flandres que ceux de l'Allemagne du sud, le  monogrammiste néerlandais  FVB et Israhel van Meckenem de Westphalie ajoutent un autre trait de pittoresque : la brise soulève et fait bouillonner un pan du mantelet de l'enfant ainsi que la cape du saint...Le vitrail exploite donc toute la richesse picturale du thème tel qu'il arrivait au début du XVIe siècle dans les pays de l'Ouest".

Cette réflexion aux conclusions si proches des miennes a suivi un autre chemin que ma récolte d'exemples bretons et français du thème de saint Christophe, et vient donc la compléter à bon escient.

En effet, cette réussite graphique n'est pas le seul intérêt de ces panneaux. Par leur date estimée (v. 1520), ils précèdent de peu le vitrail de Roncherolles de la cathédrale de Beauvais (1522), et leur thème peut procéder du culte rendu par Anne de Bretagne à saint Christophe, culte dont témoigne tant ses livres d'Heures (Grandes Heures, 1503-1508) que le linteau du château d'Amboise (1493). A Saint-Armel de Ploermel, le vitrail de saint Christophe est plus précoce (1480). A Tonquédec, le vitrail représentant Jeanne du Pont présenté par saint Christophe date de 1470. A Forêt de Bercé (Pruillé-l'Eguillé, Sarthe), on le trouve sur une verrière de 1525. Mais à Semur-en-Auxois, dès les années 1375, le modèle est déjà attesté, en peinture murale, par un artiste flamand au service de Charles V, Jean de Bruges. On voit que "la brise soulevant le pan du mantelet" n'a pas attendu les artistes allemands de la fin de XVe siècle.

 


On notera l'absence de poissons et de monstres aquatiques nageant dans la rivière à Clohars-Fouesnant ; on peut parier que ceux-ci étaient présents dans la verrière d'origine. 



 


 

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Saint Christophe,  Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Saint Christophe, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Les dais architecturés.

En 1977, ils ont retenu l'attention de Roger Barrié, qui préparait alors sa thèse sur les vitraux de Cornouaille. En effet, il les a rapproché judicieusement de ceux de la chapelle Sainte-Barbe au Faouët (56) et de ceux de la chapelle Saint-Exupère de Logispar à Dinéault (29), ces derniers étant conservés au Musée Départemental Breton de Quimper.

Les baies de Sainte-Barbe datent de 1510-1515, ceux de Dinéault de c.1530.  

Les personnages sont figurés devant des tentures damassées (à Dinéault), ou devant le ciel (à Clohars-Fouesnant et au Faouët), dans des niches à coquilles surmontés de dais à putti musiciens, alors que les socles sont, à Dinéault, ornés de médaillons de têtes à l'antique.

A Clohars-Fouesnant, Roger Barrié décrit page 32 ces dais ainsi :

"L'entablement de l'arc triomphal est couronné d'une coquille cernée d'un rang d'oves et d'un ruban de billettes dont les extrémités s'enroulent sur elles-mêmes ; le tout terminé par un fleuron non éclos. La guirlande végétale, dont le motif central est ici une fleur, prend naissance dans deux oculus percés au dessus des piles et présentant un réseau losangé de vitrerie. Le claveau de l'arcature surbaissée, démesurément allongé aussi, est orné d'une étroite fenêtre aveugle et aux épaules très resserrées ; la conjonction de cette réminiscence de la grammaire gothique et du décor à l'antique tel qu'en abuse naïvement la Première Renaissance indique l'influence du décor lombard, normale au demeurant à partir de 1500, sur les modèles européens qui ont pu influencer le peintre verrier".

Dans les trois cas, les anges associés en encadrement deux à deux jouent en bas de la cornemuse, et en haut de la flûte à bec. Ils sont installés à califourchon sur un motif de feuilles d'acanthes liées

Ce motif d'acanthes constitue l'élément de base de la décoration du Jugement dernier de Plogonnec, de l'Arbre de Jessé de Kerfeunten, de la Pentecôte de Sainte-Barbe du Faouët, etc..

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Clohars-Fouesnant, Dais de la lancette A, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Clohars-Fouesnant, Dais de la lancette A, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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Clohars-Fouesnant, , Dais de la lancette B, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

Clohars-Fouesnant, , Dais de la lancette B, Baie 2 (vers 1520), église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant, photographie lavieb-aile.

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A Dinéault (Musée Breton de Quimper).

 

Ange joueur de cornemuse, Dinéault, dais de droite, in Roger Barrié 1977.

Ange joueur de cornemuse, Dinéault, dais de droite, in Roger Barrié 1977.

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Au Faouët, chapelle Sainte-Barbe :

 

Le Faouët, dais du vitrail de la Transfiguration, chapelle sainte-Barbe.

Le Faouët, dais du vitrail de la Transfiguration, chapelle sainte-Barbe.

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Le Faouët, dais du vitrail de la Transfiguration, chapelle sainte-Barbe.

Le Faouët, dais du vitrail de la Transfiguration, chapelle sainte-Barbe.

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Roger Barrié, en soulignant les rapprochements entre les vitraux de Dinéault, de Clohars-Fouesnant et de Sainte-Barbe du Faouët, suggérait d'y voir le témoignage de l'activité d'un atelier de peinture sur verre en Cornouaille vers 1535.

Mais l'étude des vitraux de Bretagne crée un vaste réseau de citations, de ré-emplois de cartons, de correspondances historiques et héraldiques qui enrichit et densifie cette réflexion en la faisant rayonner vers de nombreuses autres paroisses. La Pietà de Clohars-Fouesnant reprend un carton de la chapelle de Lannélec en Pleyben. La Transfiguration de Sainte-Barbe de Faouët est reliée à celle de l'église de Plogonnec. Les Passions des maîtresses-vitres de Plogonnec ou de Genguat se retrouvent dans d'autres églises du Finistère. La présence de lettres souvent énigmatiques peintes sur les galons des robes et manteaux des personnages se retrouve à Plogonnec, à Sainte-Barbe du Faouët, à Kerfeuten, à Confort-Meilars, etc.. Ce réseau réunissant les verrières bretonnes en rend la découverte passionnante.

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SOURCES ET LIENS.

ABGRALL (Chanoine Jean-Marie), 1906,  Notices du diocèse de Quimper, 

http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/files/original/68e44d4982e68d65583712db5573df22.pdf

— BARRIÉ (Roger), 1978, Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle, Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper : Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper  ; sous la direction d' André Mussat / [S.l.] : [s.n.] ,  Thèse, Université de Haute Bretagne, Rennes. 

— BARRIÉ (Roger), 1977, "Un atelier de peinture sur verre en Cornouaille vers 1535", in Le vitrail breton. Arts de l'Ouest, numéro 3 (Centre de recherches sur les arts anciens et modernes de l'Ouest de la France, U. E. R. des arts, Université de Haute-Bretagne, Rennes)

BARRIÉ (Roger), 1976 Les verres gravés et l'art du vitrail au XVIe siècle en Bretagne occidentale. In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 83, numéro 1, 1976. pp. 35-44.

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_...

— BARRIÉ (Roger), 1989, "Le vitrail breton et les Flandres" in  Edité par Musée Départemental Breton

 

BRISAC ( Catherine) 1978, "Le vitrail breton. Arts de l'Ouest, numéro 3 (Centre de recherches sur les arts anciens et modernes de l'Ouest de la France, U. E. R. des arts, Université de Haute-Bretagne, Rennes)"  Bulletin Monumental Volume   136 pp. 370-371  

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bulmo_0007-473x_1978_num_136_4_5758_t1_0370_0000_2

—  http://fr.slideshare.net/fouesnant/au-detourdesparoissesfouesnantphpk-uxynl

Pierre tombale des Botigneau dans le transept nord : http://fr.topic-topos.com/pierre-tombale-clohars-fouesnant

— Déploration du XVIe siècle, transept nord : http://fr.topic-topos.com/la-deploration-clohars-fouesnant

— Christophe de Penfentenyo (1512-1595) (Christophorus a capite fontium) , Ministre Principal de l'Ordre des Frères mineurs observants, archevèque de Césarée, évêque auxiliaire de Sens (1578),  : http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http%3A%2F%2Fwww.wikitau.org%2Findex.php5%3Ftitle%3DChristophe_de_Cheffontaines

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Published by jean-yves cordier - dans Saint Christophe.
3 septembre 2015 4 03 /09 /septembre /2015 21:29

La carte du ciel étoilé peinte par Hans Mielich en 1570 pour le duc Albert V de Bavière en illustration du motet Laudate Dominum d'Orlando de Lassus.

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Cette carte se trouve au folio 157 du luxueux manuscrit des Sept Motets Pénitentiels et du Motet Laudate Dominum, conservé par la Bayerische Staatsbibliotek de Munich sous la référence Bußpsalmen mit der Motette Laudes Domini (Chorbuch, Bd. 2) Bayerische Staatsbibliothek BSB Mus.ms. A II.

Source de l'image :

Noir et blanc : http://bildsuche.digitale-sammlungen.de/index.html?c=viewer&bandnummer=bsb00035009&pimage=188&v=150&nav=&l=de

Couleur : http://imslp.nl/imglnks/usimg/8/85/IMSLP368403-PMLP594987-d-mbs_mus._ms_a_2.pdf

Cette page illustre deux versets du psaume 148 mis en musique pour chœur polyphonique à cinq voix par Roland de Lassus dans son motet Laudate Dominum de caelis. L'ouvrage a été réalisé entre 1565 et 1570. Chaque page est enluminée par Hans Mielich.

Cette page bleu-nuit m'est apparue comme étant la plus belle d'un ensemble en tous points splendide, mais j'ai constaté qu'elle donnait l'occasion de découvertes passionnantes sur l'astronomie de l'époque, et sur la place de cette science à la cour du duc Albert V de Bavière, commanditaire des quatre volumes de ce manuscrit.

Je révèle d'emblée les conclusions de mon enquête sur la source astronomique de cette enluminure : il s'agit selon toute vraisemblance de l' Astronomicum Caesarum de Pierre Apian, imprimé en 1540 à Ingolstadt (donc dans le duché de Bavière). Ce que je vais tenter de démontrer à ceux qui auront la patience de me suivre.

 

I. DESCRIPTION.

– Texte de la partition (copiée par Jean Pollet) : [Laudate eum sol et ] luna laudate eum omnes stellae et lumen. Laudate eum caeli caelorum : 

Il s'agit d'un extrait des versets 3 et 4 du Psaume 148 "Louez-le, soleil et lune ! Louez-le, vous toutes, étoiles lumineuses ! Louez-le, cieux des cieux " qui convie toute la création à rendre grâce à Dieu "car il a commandé, et ils ont été créés".

Pour rendre compte de la force cosmique de ce poème biblique, Hans Mielich, peintre et miniaturiste de Munich, crée la première enluminure certes à visée esthétique, mais basée sur des données scientifiquement exactes d'une carte céleste. Il modifie les figures (qui, dans une carte d'astronomie, tournent selon les secteurs du ciel) afin qu'elles soient toutes disposées tête en haut. 

 

– Enluminure :

a) On trouve les 12 signes du cercle  zodiacal.

Aquarius:  Capricornus ; Sagitaris ; Pisces ; Scorpio ; Taurus ; Gemini ;Virginis ;Conser [Cancer] ; Leo ; Aries ; Libra . On peut y ajouter Ophiuchus ou Serpentaire, ou classer cet astérisme dans la liste suivante.

b) on y trouve  les 36 constellations décrites par Ptolémée dans son Almageste.

Piscis Notius;  Coronaria Borealis ; Ara [Autel] ; Centaurus ;  Aquila ; Delpho ; Equus Minor ; Pegasus ; Cetus ;  Lupus  ;  Cap Meduse [Caput Medusae = Persée];  Deltocon [Deltoton =Triangle];  ; Andromeda ; Casiopea ; Cepheus ; Erichtonius [Cocher] ; Ursa Minor ; Plaustrum Ursa Maior ;    ; Draco ; Cignus ; Lira ; Via Lactea ;  Hercules ; Corona ;  Crines Berenices ; Rosa Triches  ;  Bootes [Bouvier] ;  Eridanus ; Crater [Coupe] ;  Orion ; Lepus ; Canus Maior ;  Procion [Canis minor] ; Hidra ; Argonavis et, dessinées mais non nommées ou de façon illisible : la Flêche ; Corvus le Corbeau ; et Crater.

c) et on y trouve le nom de 13 étoiles au moins :

  • Acarnar dernière étoile de l'extrémité australe d'Eridan, nommée par les arabes : Ākhir an-Nahr ou Fin de la rivière, آخر النهر 
  • Alkor ou Alcor: nom de l'étoile qui double Mizar ou Mirza dans le milieu du timon du Chariot  (ou de la queue de la Grande Ourse Ursa Major) ; seuls les observateurs dotés d'une bonne acuité visuelle distinguent le caractère double de la deuxième étoile du Chariot et discernent le cavalier Alcor (80 U.Ma.),  et le cheval Mizar (ζ U.Ma.). Selon une légende, cette capacité était l'un des critères de sélection des archers de Charles Quint. Son nom dériverait de l'arabe et signifierait "le cavalier". 
  • Angentenar : étoile d'Eridan (tau d'Eridan), nommée par les arabes (ʿArjat an-Nahr = "courbe de rivière")
  • Alioth :  de la Grande Ourse : de l'arabe Al-Jawn الجون  "le cheval noir "Jean" "  
  • Arcturus ou α Bootis :  étoile la plus brillante de la constellation du Bouvier 
  • Caicula pour Canicula, autre nom de Sirius.
  • ​Cernix pour  Ceruix/Cervix, étoile de la constellation du Lion, nommée en 1540, avec Dorsum. Journal for the History of Astronomy, Volume 18, 1987, page 118
  • Dorsum : étoile de la constellation du Lion : cf Cervix.
  • Dubhé : Alpha de la Grande Ourse :  de l'Arabe dubb, « l'ours », de la phrase ظهر الدب الأكبر Dhahr ad-dubb al-akbar, voulant dire « le dos du Grand Ours ».
  • Lanx Mer[idionalis] :  ou "plateau sud de la Balance " ou Lanx Australis : alpha Librae,  étoile de la constellation de la Balance (Libra) s'opposant avec Lanx Borealis, et portant actuellement le nom de Zuben Elgenubi. Ce dernier nom provient de l'arabe, الزبن الجنوبي « Al Zuban al Janubiyyah », signifiant « la pince sud du Scorpion » . Zuben Elgenubi est également nommée Kiffa Australis ou Elkhiffa Australis, une version latinisée de la phrase arabe « Al Kiffah al Janubiyyah », « Le plateau sud » (de la Balance).  Nom cité par James Cheyne De priore astronomiae parte, seu de sphaera, libri duo,1575 page 23.
  • Rigel ; Beta Orion
  •  Spica  ou l'Épi :  α Virginis, est l'étoile la plus lumineuse de la constellation de la Vierge.
  • Yed : étoile d'Ophiucus, nommée par les arabes 

 

– Dans le deuxième volume de ce manuscrit, le médecin et bibliothécaire Samuel Quickelberg décrit chaque page dans un commentaire qui développe, depuis le début du Motet en folio 153, un paralléle entre le psaume 148 et la Vision des quatre Bêtes du Livre de Daniel :

"Livre de Daniel 12 :3 qui autem docti fuerint fulgebunt quasi splendor firmamenti et qui ad iustitiam erudiunt multos quasi stellae in perpetuas aeternitates Les hommes qui auront eu de la sagesse resplendiront alors comme le firmament, ceux qui auront amené un grand nombre à être justes brilleront comme les étoiles, à toujours et à jamais. "

Il ne donne donc aucun renseignement sur les données astronomiques représentées ici.

http://daten.digitale-sammlungen.de/~db/0003/bsb00035013/images/index.html?id=00035013&groesser=&fip=eayaenyztsxdsydeayaqrsqrseayawxdsyd&no=1&seite=295

 

Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157 (partie supérieure), document Bibliothèque Nationale de Bavière

Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157 (partie supérieure), document Bibliothèque Nationale de Bavière

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Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157 (partie médiane), document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157 (partie médiane), document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157 (partie supérieure), document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157 (partie supérieure), document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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II. DISCUSSION.

La peinture de 48 constellations et surtout la mention de 13 noms d'étoiles permettent-elles  de préciser quelles ont été les sources d'informations de Hans Mielich pour peindre cette représentation du ciel étoilé ? Il faut d'abord rappeler que l'astronomie fait partie des grands sujets d'intérêt à la fois pour les savants humanistes, mais aussi pour les puissants, qu'ils soient rois ou empereurs, papes ou évêques, ducs, comme en Bavière, ou banquiers, comme Hans Fugger à Augsbourg.

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1. Rappel historique des connaissances astronomiques. 

Au IIIe siècle av. J.C., le grec Aratos de Soles a décrit dans un poème astronomique et météorologique,, Les Phénomènes ou Phaenomena, dans lequel il fixe la plupart des noms de constellations. Il y décrit la catastérisation, transformation d'un objet ou d'un être (héros de la mythologie) en astre ou en constellation. 

Au IIIe siècle av. J.C. le grec Eratosthène de Cyrène écrit Les Constellations, ou Catastérismes,  Il y décrit 753 étoiles. Ce directeur de la bibliothèque d'Alexandrie décrit toutes les constellations visibles dans l'hémisphère nord (42 principales et 6 constellations secondaires), ainsi que les planètes, donnant la première liste des constellations classiques sous une forme, une origine et un dessin canoniques. Ératosthène a posé ainsi les fondements de la nomenclature et de la distribution des constellations qu'on utilise encore, presque inchangée, aujourd'hui, en décrivant le contexte imaginaire et visuel de sa genèse, son iconographie et sa mythographie. 

 

Vers l'an  10 av. J.C., le poète et astrologue latin Marcus Manilius  écrivit un poème didactique en cinq livres sur l'astronomie ancienne et l'astrologie: les Astronomica. Le Livre I décrit le ciel et ses étoiles.Le concept astrologique de maisons astrologiques (que Manilius appelle templa), utilisé des siècles durant pour tirer des horoscopes à partir de la configuration des planètes dans le zodiaque, apparaît pour la première fois dans les Astronomica.

"Deux manuscrits des Astronomica des xe siècle et xie siècle ont été conservés jusqu'à aujourd'hui grâce aux soins des couvents ; ils sont conservés aujourd'hui, l'un à Bruxelles, l'autre à la Bibliothèque de Leipzig. L'ouvrage, inconnu des savants, fut redécouvert près de Constance en 1416-17 par Le Pogge (Poggio Bracciolini) , dans les intermèdes du concile de Constance, en même temps que le De rerum natura de Lucrèce. L’editio princeps des Astronomica a été préparée en 1473 à Nuremberg par l’astronome Regiomontanus à partir de ce manuscrit très endommagé. Ce texte fit par la suite l'objet d'émendations de Joseph Juste Scaliger, dont l'édition parut d'abord en 1579 à Paris avant d'être réimprimée en 1600 à Leyde." (d'après Wikipédia)

 Le grec Claude Ptolémée au IIe siècle ap. J.C. donne la première description des constellations .

"La compilation exhaustive de constellations la plus ancienne que l'on connaisse remonte à Ptolémée, au IIe siècle ; dans les Livres VII et VIII de son Almageste, il groupa  1 022 étoiles en quarante-huit constellations et en définit les positions. Cette œuvre sera la base de travail des astronomes occidentaux jusqu'à la fin du Moyen Âge. Elle ne comprend cependant que des étoiles visibles d'Alexandrie où Ptolémée faisait ses observations.

En plus des douze constellations du Zodiaque, Ptolémée en inventorie trente-six . Les quarante-huit constellations inscrites par Ptolémée dans son Almageste seront utilisées pendant plus de 1 000 ans en Occident sans aucun changement ni ajout . Mis à part l'immense Navire Argo, découpé plus tard en trois puis quatre constellations, les constellations de Ptolémée seront toutes adoptées sans modification par l'UAI, qui en définira cependant les contours précis. En effet, les délimitations des constellations n'ont pas été fixées à l'époque antique, seule l'appartenance des étoiles brillantes l'ont été. Par la suite, Johann Bayer puis John Flamsteed recensèrent des étoiles moins brillantes dont ils décidèrent de la constellation d'appartenance.

L'Almageste (du grec puis de l'arabe, al-majisṭī (المجسطي ) "le Grand (traité)") de Ptolémée passa dans les mains des astronomes arabes qui complétèrent ses observations, ajoutant quelques constellations qui ne sont plus utilisées actuellement, rallongeant certaines (comme l'Éridan) afin de mentionner des étoiles visibles depuis les latitudes plus australes que celle d'Alexandrie.

L'Almageste étant un ouvrage alors perdu en Europe, les astronomes occidentaux n'en obtinrent des copies que dans la dernière partie du Moyen Âge, à partir de traductions de l'arabe en latin, en même temps qu'un certain nombre d'observations des astronomes arabes." (d'après Wikipédia)

Voir :

  • l'édition abrégée en latin Epytoma Ioannis de Monte Regio in Almagestum Ptolomei par Johannes Müller, dit Regiomontanus en 1496 à la demande du cardinal Bessarion : : https://archive.org/stream/EpytomaIoannisd00Regi#page/n1/mode/2up
  • de une édition de 1515 (Petrus Liechtenstein à Venise) conservée à Vienne Hw 42. : http://www.univie.ac.at/hwastro/rare/1515_ptolemae.htm

42 des 48 constellations de Ptolémée sont présentes dans le Poeticon astronomicon attribué jadis à Hyginus (mais qui est postérieur à Ptolémée). Son édition imprimée en 1475 sera suivie  par celle de Ratdolt en 1482 avec des illustrations sans véracité astronomique. 

Les travaux arabes datent à partir du IXe siècle.

  • Abu Ma'shar http://www.wdl.org/fr/item/2997/  ... http://www.wdl.org/fr/item/2998/

    Ja‘far ibn Muḥammad al-Balkhī (787–886), connu sous le nom d'Abū Ma‘shar, vivait à Bagdad au IXeme siècle.. Il devint l'auteur le plus important et le plus prolifique en matière d'astrologie au Moyen Âge. Son propos intégrait et élargissait les études d'érudits plus anciens d'origine islamique, perse, grecque et mésopotamienne. Ses œuvres furent traduites en latin au 12ème siècle et, grâce à leur large diffusion sous forme de manuscrit, elles eurent une grande influence sur les érudits occidentaux. Le livre des "Fleurs astronomiques" ou Flores Albumasari, Flores astrologiae, est la première édition du  Kitāb taḥAwil sini al-Alam (également connu sous le nom de Kitâb al-Nukat) telle que traduite en latin par le traducteur du XIIeme siècle Johannes Hispalensis (Jean de Séville). Le texte porte sur la nature d'une année (ou mois ou jour), telle que déterminée par l'horoscope, et a été conçu comme un manuel pratique pour l'instruction et la formation des astrologues. Le livre inclut de nombreuses illustrations de planètes et de constellations. L'impression a été effectuée par Erhard Ratdolt, un célèbre imprimeur pionnier d'Augsbourg, en Allemagne qui, avec deux compatriotes, a fondé une imprimerie en partenariat à Venise en 1475. Kitab al-Mudkhal al-Kabīr (Grande Introduction) est son œuvre la plus importante et la plus fréquemment citée par les érudits occidentaux. Elle contient une théorie astrologique sur la nature de l'influence de la lune sur les marées et fut l'ouvrage majeur sur ce sujet durant le Moyen Âge. Introductorium in astronomiam Albumasaris Abalachi octo continens libros partiales, parue à Venise en 1506, est la traduction de 1140 en latin par Hermann de Carinthie, tout d'abord imprimée par Erhard Ratdolt à Augsbourg, en Allemagne, en 1489. La vignette de titre gravée sur bois d'un astronome au visage noir et lisant les étoiles avec un astrolabe et un compas est l'une des représentations les plus connues d'un astronome de la Renaissance. 

  • C'est l'époque du calife Al-Mamoun à Bagdad et de son astronome Al-Farghani, de même que de  la conception de l'astrolabe.
  • Al-Battani (850-929) dit Albatenius rédige un catalogue de 489 étoiles. On lui doit la première utilisation de la trigonométrie dans l’étude du ciel. C’est une méthode beaucoup plus puissante que celle, géométrique, de Ptolémée. Son œuvre principale est « Le livre des tables », composé de 57 chapitres. Traduit en latin au 12ème siècle par Platon de Tivoli (en 1116), il influencera beaucoup les astronomes européens de la Renaissance.

  • Al-Soufi (903-986) ou Azophi est un astronome perse, qui traduit des ouvrages grecs dont l’Almageste et améliore les estimations des magnitudes d’étoiles. 
  • Al-Khujandi (≈940-≈1000)  est astronome et mathématicien perse.
  • Ibn Al-Haytam (965-1039) dit Alhazen né à Bassorah
  • Al-Biruni (973-1048)  l’un des plus grands savants de l’islam médiéval, originaire de Perse.
  • Ali Ibn Ridwan (988-1061)

Du 11ème au 16ème siècle :

  • Al-Zarqali (1029-1087) dit Arzachel Mathématicien, astronome et géographe né à Tolède en Espagne. Il conçoit des astrolabes, et établit les « Tables de Tolède », qui furent utilisées par les grands navigateurs occidentaux comme Christophe Colomb, et serviront de base aux « tables alphonsines ».

  • Omar Khayyam (1048-1131) Connu pour sa poésie, il s’intéresse aussi à l’astronomie et aux mathématiques. Il devient directeur de l’observatoire d’Ispahan en 1074.
  • Al-Tûsî (1201-1274) Astronome et mathématicien fit construire et dirigea l’observatoire de Maragha.

Les astronomes perses du XVe siècle. Al-Kashi et le ZijUlugh Beg (1394-1449).

Dans les années qui suivirent une éclipse de lune à laquelle il assista en 1406 à Kashan, Al-Kashi (1380-1439) rédigea les Khaqani zij (Tables du grand khan). Ulugh Beg, petit-fils de Tamerlan et fils du Shah de Perse, accède au trône en 1447. Il invita al-Kashi à Samarcande en 1420, année de l'ouverture de la médersa qui porte son nom. Al-Kashi joua un rôle important dans la conception de l'observatoire de Samarcande, inauguré vers 1429, et de ses instruments d'astronomie. Les travaux menés par Ulugh Beg, Qadi-zadeh Roumi (1364-1436), al-Kashi et quelque soixante autres savants aboutirent à la publication des "Tables sultaniennes" (Zij-é solTâni, en persan), parues en 1437 mais améliorées par Ulugh Beg jusque peu avant sa mort en 1449. Les données des Khaqani zij y furent bien sûr utilisées. La précision de ces tables restera inégalée pendant plus de 200 ans, et furent utilisées en occident. Elles contiennent les positions de plus de 1 000 étoiles. Leur première traduction date d’environ l’an 1500, et fut réalisée à Venise.(d'après Wikipédia)

Des noms arabes sont alors données aux étoiles. Refusant les noms poétiques ou légendaires, Ulugh Beg utilise des périphrases permettant de situer l'astre dans la constellation. Quelques exemples de noms d'origine arabe : Algol : l’ogre .  Aldébaran : le serviteur, la suivante • Algenib : l’aile (de Pegase), le flanc • Alioth : la queue grasse • Alnitak : la ceinture • Altaïr : le vautour ou l’aigle volant • Albireo : l’oiseau • Alcor : le golfe, le cheval noir, le taureau • Bételgeuse : l’épaule du géant • Dubhe : l’ours • Dénébola : la queue du lion • El Nath : le coup de corne • Enif : le naseau (de Pégase) • Caph : la main • Déneb : la queue • Formalhaut : la bouche du poisson • Megrez : la racine de la queue • Merak : le bas ventre • Mirfak : le coude • Mizar : la robe • Phecda : la cuisse • Rigel : le pied • Saïf : l’épée • Véga : le vol de l’aigle, le vautour qui s’abat .

Les  Tables alphonsines.

Ce sont des tables astronomiques composées par ordre d'Alphonse X, roi de Castille en 1263-1276 par une équipe de lettrés, connue comme École de traducteurs de Tolède. Elles contiennent les positions observées des corps célestes à Tolède depuis le 1er janvier 1252, année du couronnement du roi Alphonse X, avec une précession de 17°8 par rapport aux positions de Ptolémée. Une traduction en latin fut réalisée à Paris vers 1320-1321 par Jean de Murs et Jean de Lignères et un mode d'emploi ou Canon fut écrit par Jean de Saxe en 1327.La première édition imprimée des tables alphonsines est apparue à Venise en 1483. Une seconde édition à Venise en 1492 introduit dans le Catalogue 29 nouveaux noms d'étoiles en arabe.

L'influence des Tables s'est fait sentir dans toute l'Europe à travers une révision française du début du XIVe siècle, et leur utilisation s'est poursuivie jusqu'à la Renaissance. Les tables alphonsines ont fait l'objet de plusieurs éditions, dont une des plus appréciées était celle de Paschasius Hamelius, professeur au Collège de France à Paris, qui a été publiée en 1545 et 1553.

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2. Les représentations du ciel étoilé.

Elles évolueront depuis les illustrations poétiques des constellations sans prétention de respect du positionnement des étoiles vers les atlas célestes (ou cartographie stellaire, ou uranographia) liée à l'astrométrie.

a) Traduction des Phénomènes d'Aratus.

Alors qu'à l'époque de Ptolémée ont été réalisées des représentations des constellations sur des globes célestes,  des manuscrits en latin illustrant la traduction des Phaenomena d'Aratus comportent des cartes du ciel avec les 48 constellations.

Ainsi le Ms Harley 647 de la British Library, folio 8 : Orion

http://www.bl.uk/catalogues/illuminatedmanuscripts/record.asp?MSID=6561

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Ms Harley 647 de la British Library, Folio 10v-11r : Piscis et Perseus 

 

b) Les manuscrits arabes.

Je citerai le  Kitâb suwar al-kawâkib al-thâbita (Catalogue des étoiles fixes) d' Abd al-Rahmân al-Sûfi, consultable sur Gallica réf. BnF, département des Manuscrits, arabe 2489. " Référence durant des siècles dans le monde islamique, ce traité d’astronomie a été composé par l’éminent astronome al-Sûfi en 965 à la cour d’Ispahan, sur la demande de l’émir bouyide ‘Adud al-Dawla. Il décrit les constellations en s’inspirant du système grec de Ptolémée, adapté en arabe au IXe siècle, selon lequel les sept « planètes », la Lune, Mercure, Vénus, le Soleil, Mars, Jupiter et Saturne, tournent autour de la Terre, située au centre du cosmos. Une huitième sphère est composée d’étoiles fixes, dénommées ainsi car la distance entre elles, quel que soit l’endroit où l’on se place, reste inchangée. AI-Sûfi décrit quarante-huit constellations, représentées chacune par une figure identifiable. De nombreuses copies illustrées du Catalogue ont été diffusées entre le XIe et le XVIIIe siècle.
Ce manuscrit, copié sous les Seldjoukides, suit les modèles grecs en les modifiant un peu : chaque constellation est dessinée à l’encre noire sous deux angles, selon que l’astronome la voit dans le ciel ou sur le globe terrestre. Les points rouges représentent les étoiles. Au verso du feuillet 70, Andromède est représentée avec un poisson, élément emprunté au ciel des anciens nomades arabes."  
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8406151k   

La constellation d'Andromède Bnf arabe 2489 folio 70v :http://expositions.bnf.fr/islam/grand/isl_018.htm

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c) Le manuscrit de Vienne de 1440.

http://www.atlascoelestis.com/MS%205415fol168%20Pagina.htm

Cette œuvre d'un anonyme est conservé à la Bibliothèque nationale d'Autriche à Vienne  sous le code MS 5415. Ce sont deux feuillets dont l'un, le  folio 168 r , est un Planisphère boréal pour le ciel du nord et l'autre, le folio  170 r pour le ciel du sud, est presque carré, ses côtés mesurant 31 cm par 28,5.  

 Les noms des constellations sont y portées en latin  tandis que pour les noms des étoiles  prévalent ceux d'origine arabe.

  L'origine de ces deux pages manuscrites, datant de 1440, est  inconnue mais les chercheurs suggèrent le nom de Johannes von Gmunden (environ 1384 à 1442), astronome et mathématicien autrichien, en raison des  affinités de ces planches avec un catalogue d'étoiles définitivement attribué à Johannes von Gmunden, et recueilli dans le même manuscrit MS 5415 Folio 217 à 251. Ce catalogue d'un relevé de l'année 1424 des coordonnées de 1025 étoiles ptolémaïques selon la version de Gérard de Crémone, semble copié d'une version des Tables alphonsines puisque  les longitudes sont majorés par précession par rapport au positions ptolémaïques de 18° 56' soit 1°48' par rapport aux données des Tables alphonsines.

L'auteur du manuscrit de Vienne aurait utilisé un catalogue récent, le Khaqani Zij écrit par l' astronome de Samarcande al-Kashi. Le lien possible entre le manuscrit de Vienne et le travail des astronomes de Samarcande est en outre soutenu par l'utilisation des noms arabes de nombreuses étoiles, dont certains sont utilisés ici pour la première fois en Occident (liste selon P. Kunitzsch 1986)

α UMi : Alrubaca

α UMa : Dubhe

η Uma : Elkeid & Bennenazc

γ Dra : Rasaben

α Cep : Alderaimim

α Lyr : Wega

α Cyg : Denebabigege

α Cas : Scheder

α Per : Alchemb

α Oph : Rosalaugue

α Tau : Aldebaran

β Gem : Rasalgense

β Leo : Denebalezeth

α Sco : Cabalatrab

γ Cap : Denebalchedi

α PsA : Fomahant

α Cet : Menkar

ζ Cet : Batenkaiton

β Cet : Denebcaiton

α Ori : Beldelgenze

γ Ori : Bellatrix

β Ori : Algebar, Rigel.

Τ2 Eri : Angentenar

θ Eri : Acarnar

κ Pup : Markeb

α Hya : Alphart

α Crt : Alhes

γ Crv : Algorab.

L'écliptique est divisé en segments d'une trentaine de degrés dont l'alternance est mis en évidence par la couleur des encoches, le premier noir puis le second rouge;curieusement le calcul de degrés à l'intérieur des segments est mesurée par une progression rare des six par six.

 

Le Manuscrit de Vienne,  est sans doute plus informatif et plus original que les planisphères de 1503 et 1515 qui vont suivre, comme en témoigne la présence de la Voie Lactée, du cercle équatorial et des cercles polaires, la corrélation des positions stellaires avec la référence de la grille, la numérotation de chacun six degrés, le nom des étoiles et l'originalité de la représentation du style des constellations. Tous ces éléments combinés ensemble en font un archétype à partir de laquelle même  Durer ne pourrait s' abstenir de s'inspirer pour réaliser ses deux cartes les plus connues (D'après Felice Stoppa).

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d) Deux manuscrits de 1503.

Il s'agit de deux formats carrés de 67 cm de coté, conservés maintenant au Germanisches Nationalmuseum de Nuremberg sous la référence n°. 5576 Hz et  5577 Hz, Un cartouche rectangulaire dans le coin supérieur droit de l'hémisphère Sud mentionne Konrad Heinfogel pour la position des étoiles.

Il s'agit certainement un précurseur de l'œuvre de Dürer qui sera présentée infra, car elle partage la même régle de la grille de référence, utilise la même projection, par rapport aux planches de Dürer ;cependant, elle est enrichie par la présence des projections des deux cercles polaires, alors que manque la figuration de la Voie Lactée. L'interprétation stylistique des constellations, très schématique et rigide, est dans certains cas très naturaliste, comme par exemple le cratère dans l'hémisphère Sud représenté comme une baignoire en bois, ce qui ne donne pas l'impression que l'auteur pourrait être  Durer. Cependant la paternité lui est attribué par certains historiens de l'art, qui voient des similitudes entre les images allégoriques entourant les cartes avec les œuvres tardives de l'artiste. (D'après Felice Stoppa)

Selon Felice Stoppa, il est plus probable que ce soit là le travail de mise en place technique fait par le mathématicien et l'astronome Heinfogel, que Durer utilisera pour réaliser ses xylographies de 1515.

 

https://heavenastrolabe.wordpress.com/2010/11/06/the-starred-sky-in-science-and-art-the-early-fifteenth-century-representations-of-the-ptolemaic-stars-catalogue/

 

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d) Albrecht Dürer, 1515, Imagines coeli septentrionales et meridionales, deux gravures du ciel nocturne, l'une pour le ciel du Nord et l'autre pour le ciel du Sud.

http://www.atlascoelestis.com/durer.htm

 Les deux gravures reproduisent en stéréographie polaire convexe les projection de deux voûtes étoilées représentées par des cercles de 35 cm, ayant comme centre la projection de leurs pôles écliptique et comme circonférence la projection de l'écliptique. 

Les  cartes célestes des hémisphères nord et sud d' Albrecht Dürer  gravées en 1515  étaient très précises pour leur époque, combinant exactitude de starométrie avec les figures de la constellation classiques. Elles mélangent les sources anciennes et modernes,  intégrant des informations de Aratus, de Ptolémée, de  Marcus Manilius  et Al-Soufi, dont les portraits apparaissent dans les coins  de la carte de l'hémisphère Nord (Aratus Cilix, Ptolemeus Aegyptus, M. Manilius Romanus et Azophi Arabus)  . Dürer était en fait un astronome passionné, et possédait  un observatoire au sommet de sa maison à Nuremberg.  

La carte nord est la plus riche en étoiles, et elle est la seule à comporter les constellations du zodiaque, indiquées par leur nom et leur symbole astrologique. La carte sud comporte   les constellations d' Argonavis , Centaurus, Canis, Canis minor et bien sûr d'Orion, bien visible au dessus de l'horizon dans l'hémisphère nord en hiver. Dürer a réalisé ces cartes sous le patronage de l'empereur Maximilien Ier et du cardinal Matthäus Lang von Wellenburg de Salzbourg, en coopération avec l'astronome royal de Maximillien, le cartographe, mathématicien et historien de la cour Johannes Stabius (1460? 1522) et l'astronome Konrad Heinfogel (de 1455 à 1517) de Nuremberg, qui a fait les calculs astronomiques. Le blason du cardinal Lang, qui deviendra plus tard prince-archevêque de Salzbourg, figure en haut à gauche de la carte sud. Les blasons de  Dürer, de Stabius et de Heinfogel se trouvent en bas à gauche de la carte, et on lit l'inscription Ioann Stabius ordinavit, stellas Conradus Heinfogel posuit la circumscripsit de Albertus Dürer.

 

Les constellations, toutes nommées, sont dessinées  comme  vues de l'extérieur du ciel (de projection convexe). Le Cygne y est encore nommé Avis, ("Oiseau") dans la tradition d'Aratus. Les étoiles ne sont pas nommées, mais sont identifiés par un numéro suivant l'Almageste de Ptolémée. Les coordonnées et le placement des étoiles sur les plaques ont été traités par deux astronomes de l'époque, Stabius et  Heinfogel.

Les planches, qui se servent du Manuscrit de Vienne de 1440 comme source, ont eu l'avantage de constituer la première représentation imprimée et donc à large diffusion du ciel alors connu. Le document est remarquable par sa clarté le rendant très facile à consulter et à mémoriser.

Une autre version de ces cartes sera gravée par Dürer en 1527.

Dürer, 1515, Imagines coeli Septentrionales cum duodecim imaginibus zodiaci, Norimberga 1515 ,

 https://www.rijksmuseum.nl/en/collection/RP-P-OB-1493

 

http://www.atlascoelestis.com/durer.htm

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DÜRER 1515, : Imagines coeli Meridionalis, gravure sur bois, Munich, Staatl.graph.Sammlung 

https://www.rijksmuseum.nl/en/collection/RP-P-OB-1494

 

http://www.raremaps.com/gallery/enlarge/33676op

http://www.atlascoelestis.com/durer.htm

 

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e) Peter Apian, ciel nocturne en une seule carte.

Pierre Apian, né vers 1495, a été professeur de sciences mathématiques à l'Université d'Ingolstadt en Bavière de 1527 jusqu'à sa mort en 1552. Il a publié deux versions d'une carte céleste décrivant les 48 constellations ptolémaïques, dont le dessin se ressent fortement de l' influence des gravures de Dürer.

La première, parue en 1536 à Ingolstadt, fut imprimée sur un feuillet isolé de 42 x 30 cm sous le titre Imagines syderum coelestium et avec l'emploi de caractères gothiques pour le titre et certains noms. Toutes les constellations sont montrées comme si elles étaient vues sur un globe céleste, avec une disposition inversée par rapport aux vues habituelles. 

 La seconde, en 1540, faisait partie de l'Astronomicum Caesareum d'Apian. Les dessins sont strictement identiques, mais le titre et les noms figurent en caractères romains, la plupart des figures sont peintes en couleur, mais surtout, on y trouve deux nouveaux noms arabes absents de l'épreuve de 1536 : Angentenar en Eridan (près d'Acarnar qui était déjà indiqué en 1536) et Yed en Ophiucus. De même, deux nouveaux noms latins apparaissent, ceux des étoiles Dorsum et Ceruix de la constellation du Lion (Leo).

 

 

 

Outre ces deux versions d'une même carte, Pierre Apian avait publié en 1533 une autre carte dans deux ouvrages sortis de son imprimerie d'Ingolstadt, son Horoscopion generale, et son Instrument Buch. On n'y trouve, à des fins didactiques, que les constellations de l'écliptique, du Taureau au Scorpion, mais son intérêt vient de la présence de figures inhabituelles : trois femmes face à une autre femme assise sur un sofa (au lieu de la Petite Ourse) ; un berger avec un chien et un mouton (au lieu de Céphée); quatre dromadaires en entourant un plus jeune ; et un anneau de plume entourant deux étoiles à leur base. Ces images de tradition non ptolemaïque viennent du Livre des constellations (vers 964 ap. J.C) d'Al-Sufi, nommé Azophi par Apian comme Dürer déjà en 1515. (d'après Paul Kunitzscht, 1987)

https://books.google.fr/books?id=FdZfAAAAcAAJ&pg=PT22&dq=Angentenar&hl=fr&sa=X&ved=0CEUQ6AEwBmoVChMIhsXbmbjfxwIVAWsUCh2fGQd4#v=onepage&q=Angentenar&f=false

 

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: http://collections.rmg.co.uk/collections/objects/551748.html

 

 

 

 

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DISCUSSION.
 


Après cette longue présentation, il est temps de revenir à l'enluminure d'Hans Mielich. De nombreux arguments montrent que le peintre de la cour du duc Albert V à Munich s'est inspiré directement de la carte qui figure dans l'Astronomicum Caesarum de Pierre Apian publié en 1540. Certes le peintre n'a pas eu la prétention de livrer un document à usage astronomique, et il a conformé les astérismes aux exigences de mise en page autour des deux encarts de la partition musicale. Mais en s'inspirant des figures de la Carte céleste la plus récente alors disponible, et en en respectant scrupuleusement la nomenclature, il a flatté l'intérêt de son commanditaire Albert V pour l'astronomie, tout en intégrant cette science dans l'hommage à la création rendu par le  Motet. Les paroles du psaume 148 "Louez-le Seigneur, soleil et lune, Louez-le, vous toutes étoiles lumineuses ! Louez-le, cieux des cieux !" intègrent, sous l'effet de cette utilisation par Mielich d'un document scientifique, la connaissance humaine à ces louanges des astres. En outre, par le biais de la catastérisation, par lequel les héros antiques accédaient à l'immortalité en étant projetés comme figure d'une constellation, c'est tout le monde mythologique pré-chrétien qui se trouve intégré dans ce chant de louanges. Ou encore, c'est la façon dont l'homme s'est approprié le ciel étoilé en le rendant familier par les figures de son imagination qui "rend louange au Créateur", ou, en d'autres termes plus laïques, qui  célèbre le génie créatif et poétique humain, et participe à l'émotion et à l'expansion de l'âme de celui qui contemple le firmament,.

Dans une splendide synthèse, le manuscrit réunit dans une même image le génie de la poésie biblique, celui de la musique polyphonique de Roland de Lassus et de l'école franco-flamande, le talent de calligraphie de Jean Pollet, la tradition miniaturiste de Bruges-Gand, et le talent personnel de Hans Mielich, par l'aboutissement d'un travail d'équipe animé par les grands collectionneurs passionnés d'arts et de sciences que furent Hans Fugger, Samuel Quickelberg, le duc Albert V de Bavière et la duchesse Anne d'Autriche.

Les arguments qui permettent d'affirmer que Hans Mielich s'est strictement inspiré de la carte de Pierre Apian de 1540 sont nombreux.

  •  Proximité de la date de conception et réalisation de l'enluminure (1565-1570) avec la date de parution de l'Astronomicum Caesarum.
  • Proximité du lieu d'édition de l'ouvrage, à Ingolstadt, avec celui de fabrication du manuscrit, à Munich. Avant Albert IV, le duché de Bavière était divisé en Bavière-Munich, Bavière-Ingolstadt et Bavière-Landshut mais le duché fut réunifié en 1505.  Ingolstadt, échue aux Wittelsbach, devint en 1472 la première université de Bavière.

  •  Intérêt du duc Albert V pour tous les arts, les collections (livres, cartes, monnaies) et les sciences, ce qui l'amena plus tard à racheter la bibliothèque de Hans Fugger d'Augsbourg. On peut penser que l' Astronomicum Caesarum figurait dans la bibliothèque ducale. L'ouvrage est d'ailleurs conservée actuellement par la  Bayerische Staatsbibliothek avec un ex-libris Ex electorali bibliotheca serenissimorum utriusque Bavariae ducum et les armoiries au collier de la Toison d'or (il est numérisé VD16 A3075)

  • Relations privilégiées entre Raymond Fugger et Pierre Apian, mais surtout, relations très argumentées entre Philippe Apian, fils de Pierre, et le duc Albert V. En 1568, Philippe Apian a réalisé la première carte de la Bavière. 

  • L'argument essentiel, nécessaire et suffisant, est la parfaite concordance entre les deux cartes, tant dans les caractéristiques des figures des constellations (simplement transformées par l'art supérieur du peintre), que dans les noms des constellations et des étoiles, y compris dans certains détails qui, parce qu'ils sont anecdotiques, sont d'autant plus signifiants.

Faire la liste des concordances entre les deux cartes est un jeu passionnant, car il donne accès à une connaissance approfondie de l'astronomie de la Renaissance et aux influences arabes, mais la règle de ce jeu s'avérant unique et constante (Mielich a suivi Apian dans tous les détails), je vais flâner en m'arrêtant là où bon me semble.

J'ai fait largement appel dans cette mise en parallèle aux images et au travail de Felice Stoppa sur  www.atlascoelestis.com

 http://www.atlascoelestis.com/apianus%20013.htm

 

 

 

Pierre Apian, Carte céleste 1540, Astronomicum Caesarum page 18, http://www.atlascoelestis.com/Zagrebelsky/Astronomicum%20Caesareum[1].pdf

Pierre Apian, Carte céleste 1540, Astronomicum Caesarum page 18, http://www.atlascoelestis.com/Zagrebelsky/Astronomicum%20Caesareum[1].pdf

Eridanus

Dans le fleuve Eridan nage une femme nue. Mielich indique le nom de la constellation, Eridanus, et celui de deux étoiles, Acarnar et Angentenar. Si Acarnar figurait sur la carte d'Apian de 1536, par contre Angentenar ne figure que sur la carte de 1540 : confirmation que Mielich a eu accès à la carte de l'Astronomicum Caesarum. Cette femme est une féminisation de Phaéton, le fils du Soleil qui perdit le contrôle du char de son père. Voici comment Ovide, dans le Livre II de ses Métamorphoses (324), raconte la fin du drame :

 "Phaéthon, dont les feux consument la blonde chevelure, roule en se précipitant, et laisse, dans les airs, un long sillon de lumière, semblable à une étoile, qui, dans un temps serein, tombe, ou du moins semble tomber des cieux. Le superbe Éridan, qui coule dans des contrées si éloignées de la patrie de Phaéthon, le reçoit dans ses ondes, et lave son visage fumant."

 

 

Chez Pierre Apian (1540):

http://www.atlascoelestis.com/apianus%20013.htm

 

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Eridanus, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Eridanus, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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Eridanus, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Eridanus, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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CASIOPEA, Cassiopée. CEPHEVS, Céphée. ERICHTONIVS, l'Aurige ou Erichton.

— Cassiopée  : Apian écrit Cassiopea, mais Mielich écrit Casiopea. Chez le peintre de Munich, la reine Cassiopée prend l'allure d'un enfant nu, potelé et joufflu, tenant une palme dans la main droite et levant le bras gauche, les seuls indices de sa royauté étant que son front est ceint d'une couronne et qu'il est assis sur un trône qui flotte dans la Voie Lactée. Son époux Céphée, qui lui fait face, semble lui présenter un miroir.

Apian écrit dans son Astronomicum Cassiopeam deinceps intuere, Throni, Sellae, Siliquastri nomen obtinentem, astrum pectori inest, Ghaldaeis Scheder dicitur, Sydus hoc semper conspicuum manet.

"Elle fut anciennement nommée Throni, Sellae [la Chaise ou le Trône] , ou Siliquastri (la Gousse ?). L'étoile de sa poitrine est dite  Scheder par Ghaldaeis (?)."

Citée par Aratus de Soles dans ses Phénomènes ["Devant Céphée tourne avec le ciel la malheureuse Cassioppée, qui paraît à peine dans une nuit éclairée par la lune, car les étoiles peu nombreuses dont elle est parsemée ne la font pas beaucoup apercevoir, celles de ses étoiles qui sont comme les deux moitiés d'une traverse qui tient une porte fermée en dedans, représentent ses bras étendus et élevés de chaque côté, comme si elle déplorait le sort de sa fille".], puis par Ptolémée dans l'Almageste, la constellation représente la reine Cassiopée dans la mythologie grecque, femme de Céphée et mère d'Andromède, à côté desquels elle se trouve. Elle est placée sur un trône (Germanicus, Hyginus), et placée de telle sorte qu'elle se couche renversée, et la tête la première , comme pour punir son impiété, dit Hyginus. Sa position sur un trône la fit appeler la femme du trône (Bayer, Germancus César), et même simplement le Trône (Pline). On la nomme aussi la Chaise (Hyginus) : car elle présente la forme d'une chaise renversée, et d'une clef (Théon). On lui donna donc encore les noms de Cathedra mollis, Mulier sedis, Siliquastri, Siliquastrum, Seliquastrum, Sella, Solium, Sedes regalis, Thronos, Cathedra, Canis, Cerva, Mulier habens palmam de libutam (Tables Alphonsines) ,Domina sellae. 

Ulugh-Beg appelle l'étoile de la poitrine, Dat al chursa; celle du milieu du trône Caph al chadib. La suivante de la poitrine prend aussi le nom de Sadr ou Setier; par corruption, Scheder et Schedar, Zedaron. Riccioli lui donne une espèce de verge ou de palme, et une ceinture. Nonnus lui donne l'épithète d'infelix, ainsi qu'Aratus. (Dupuis).

 

http://www.atlascoelestis.com/apianus10%20cost.htm

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— Cepheus : http://www.atlascoelestis.com/apianus%2004%20cost.htm

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— Erichtonius

http://www.atlascoelestis.com/apianus%2012%20cost.htm

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Persée, Erichton, Cassiopée, Céphée ;  Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Persée, Erichton, Cassiopée, Céphée ; Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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Bootes (Bouvier)

Il tient chez Mielich trois chiens par de longues laisses, comme dans la carte d'Apian. Paul Kunitzsch y voit un élément précursur de Canes Venatici qui sera élevé au rang d'une constellation propre un siècle et demi plus tard par Hevelius. Sur la carte de 1533, Apian fait figurer deux chiens, tenus par de courtes laisses dans la main droite. Mielich s'est bien inspiré de la carte de 1540. Mais il a inversé le geste, et le Bouvier lève ici la main droite, alors que la lance et les chiens sont tenus à gauche.

Curieusement, Apian parle dans son texte non de chiens mais de trois ânesses : sicut ex tribus, quae sinistrae debentur,  tres asellas. Asella , "petite ânesse", est un diminutif d'asina. Voir Kunitz 1986 Peter Apian und Azophi :

https://www.yumpu.com/de/document/view/7493094/peter-apian-und-azophi/19

 

Par Pierre Apian 1540 :http://www.atlascoelestis.com/apianus%20013.htm

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Bootes, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Bootes, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Orion.

Il porte un casque (un Morion !). il semble chevaucher ou emjamber le Lièvre. Mielich nomme l'étoile Rigel, comme Apian.

Celui-ci écrit que les trois étoiles alignées qui forme la ceinture d'Orion sont communément nommées Bâton de Jacob (Sancti Jacobi baculum). En effet, on nomme "bâton de Jacob" l'albalestrille, ancien instrument mesurant les angles en astronomie. Or, l'alignement des trois étoiles de la ceinture d'Orion à partir de Sirius mène droit vers Aldébaran.

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Chez Pierre Apian (1540) http://www.atlascoelestis.com/apianus%2034%20cost.htm : 

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Orion, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Orion, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Argonavis.

C'est pour moi la figure la plus belle de l'enluminure de Mielich, et ce navire des Argonautes semble tracer son sillage muet dans le silence de la nuit comme s'il transportait nos rêves. L'allure générale, l'emplacement en bas de la page, la situation relative par rapport à Hydra et l'inscription ARGONAVIS viennent bien d'Apian, mais le peintre a fait du vaisseau une galère portant le pavillon du royaume de Jérusalem, comme si elle participait dans les Cieux à une croisade pour la défense du Royaume de Dieu sur terre. Surtout, il a inversé la poupe et la proue : ce qui correspondait à un gouvernail tribord surmonté d'une porte devient chez Mielich peu ou prou l'éperon de la trirème, surmonté d'un canon ; le château arrière d'Apian devient un groupe de cabanes ; seize rames frappent l'eau ; deux mâts verticaux sont enverguées de voiles latines. Bref, Hans Mielich a peint ici une galère méditerranéenne (Vénitienne) contemporaine, telle qu'on la trouvait vers 1550, et qui se caractérise par "leur forme de fin fuseau, long de 35,50 m pour une largeur de 7,50 m,c par leur tirant d’eau de 1,25 m, et leur voilure latine de 320 m². Son étrave porte une sorte de rostre jouant le rôle d’éperon ; elle est armée de six canons dont quatre de chasse. Deux cents hommes à bord, 20 marins, 80 soldats, 100 rameurs, sous la férule du redoutable comite. Certains d’entre eux ne sont pas des condamnés mais des volontaires appelés bonnevoglies. La Galère  navigue à la voile lorsque le temps le permet, mais en cas de calme plat ou d’action de guerre, elle marche à la rame, maniée par les galiots de la chiourme. Sur cette Galère vénitienne on ne compte qu’un seul rang de rameurs. Sa silhouette est superbe, élégante et racée, montrant sur l’arrière le salon luxueux réservé au capitaine et appelé tabernacle. " (source ici)

Galère par Pierre Puget vers 1655.

Le "tabernacle" surmonté d'un lanternon est couvert de draps d'or frappés au centre d'un médaillon avec un animal dressé sur ses pattes arrières (Lion de Venise ?)

 

 

Par Pierre Apian 1540 : http://www.atlascoelestis.com/apianus%2039%20cost.htm

Argonavis, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Argonavis, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Equus minor.

Juste devant Pégase, peint comme un  cheval blanc, Mielich a figuré un cheval bai, réduit à sa moitié antérieure qui émerge de nuées ; cet astérisme ne comporte que quatre étoiles, deux à la tempe et au front, et deux près du museau. On lit la mention EQVVS MINOR. Là encore, nous trouvons (mais sans le talent de l'enlumineur) la même disposition chez Apian. La constellation du Petit Cheval Equuleus est aujourd'hui composée de trois étoiles de magnitude faible.

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Apian 1540 http://www.atlascoelestis.com/apianus%2017%20cost.htm

 

 

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Al-Ṣūfī (903-986), :Kitāb Ṣuwar al-kawākib

 

 

Al-Ṣūfī, Kitāb Ṣuwar al-kawākib  (ca1010), Oxford,  http://bodley30.bodley.ox.ac.uk:8180/luna/servlet/detail/ODLodl~23~23~124045~142506:Equus-minor,-the-lesser-horse---Con

Al-Ṣūfī, Kitāb Ṣuwar al-kawākib  (ca1010), Oxford, http://bodley30.bodley.ox.ac.uk:8180/luna/servlet/detail/ODLodl~23~23~124045~142506:Equus-minor,-the-lesser-horse---Con

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Equus Minor,  Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Equus Minor, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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LIRA, la Lyre.

Hans Mielich a une façon bien curieuse de représenter la constellation de la Lyre, dans laquelle les astronomes grecs reconnaissaient une kithara, équivalent à peu près à notre lyre. Car nous voyons ici un oiseau-lyre, ou plutôt un oiseau-violon. Mielich n'a rien inventé, et il a copié Apian qui avait copié Dürer :

 

Voici ce qu'écrit Paul Kunizscht :

"Une attention particulière doit être portée à la Lyre, placée directement en dessous des « Cinq Chameaux » sur la carte de 1533, car elle est dessinée comme un gros oiseau avec un instrument de musique ressemblant à une viole devant son ventre. Nous sommes ici aussi en présence d'une influence arabe : l'étoile alpha Lyrae est appelée par les arabes al-nasr al-waqi (devenu notre Vega !), communément traduit en latin par Vultur cadens, « L'Aigle chûtant ». Par conséquent, ici, la figure d'un aigle est dessinée (figure qui, à la base, est arabe), auquel est ajouté un instrument de musique afin de restituer l'idée classique de Lyre. Mais ce n'est pas une invention d'Apian. Exactement la même représentation de la Lyre avait été donnée auparavant par Dürer en 1515, et elle est purement répétée par Apian tant dans sa carte du ciel de 1540 que dans sa carte « extraordinaire » de 1533. Dürer, à son tour, n'avait pas compris le mot Lyre dans le sens classique du mot, mais avait pris plutôt l'instrument comme l'instrument à cordes nommé « lira » par les italiens contemporains de la Renaissance, ou plus complétement « lira da braccio », de la famille des violons. Ainsi il conçut la figure de la Lyre comme une combinaison extraordinaire de l'ancienne conception arabe, et de la lira da braccio de la Renaissance italienne. Johannes Bayer reprit une figure similaire dans son Uranometria de 1603 pour la Lyre, mais il dessina l'instrument comme une lyre réelle, et non comme la lira de la Renaissance. »

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Chez Pierre Apian (1540) avec l'orthographe LYRA : http://www.atlascoelestis.com/apianus%2008%20cost.htm

 

 

 

 

 

 

 

La Lyre, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

La Lyre, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

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Ursa Major et Ursa Minor. Grande Ourse et Petite Ourse.

VRSA MAIOR.

.Comme dans la carte d'Apian de 1540, Mielich a donné comme nom de la constellation de la Grande Ourse celui d'URSA MAIOR PLAVSTRVM.

De la même façon encore, il a précisé la position de 22 étoiles environ (Apian en compte 27) en différenciant les 7 étoiles principales par des astérisques plus grandes, et les 15 autres par des astérisques plus petits.

Mais il a donné le nom de quatre étoiles ; outre  DUBHE  (α UMa), ALKOR (80 UMa), ALIOTH  (ε UMa), il a placé le nom  DORSUM entre les deux pattes. Or, cela correspond à une copie sans dicernement de la figure d'Apian, car Dorsum appartient en réalité à Leo, le Lion, qui figure chez Apian juste en dessous de la patte postérieure de l'Ourse.

 

Par contre, Mielich n'a pas indiqué le nom de Benenatz, η UMa.

Apian, dans son texte, donne les noms de la constellation (Ursa maior, Arctos maior, Plaustrum maius, Hamaxa, Helice, Calisto, Maior septentrio), puis ceux de quelques étoiles comme Alioth, Benenatz ou Benenaim. Il précise que l'étoile du milieu de la queue (celle qui double Mizar, qu'il ne cite pas) est nommée par les Arabes Alcor "c'est-à-dire, le petit cavalier" (quam Arabes Alcor, id est, parvum equitem vocant), et la faiblesse de taille et d'intensité de cette étoile est à l'origine d'un proverbe arabe qui dit "Tu vois Alcor, et tu ne vois pas la pleine lune" , autrement dit, tu vois le détail minuscule, et tu ignore le motif principal, tu t'interesses à des bagatelles, et non aux faits majeurs.

Adagium. Vidisti alcor, sed non lunam plenam. Ultra has insidere videtur ad huc mediae caudae stella minutissima quaedam, quam Arabes Alcor, id est, parvum equitem vocant, imbecillioribus non adeo aciebus obvia, unde adagium natum apud Arabes, vidisti alcor, sed non Lunam plenam. 

Kunitz discute page 122 de ce proverbe qu'il donne sous la forme "Je lui montre [l'étoile] al-suha, et il me montre la Lune", dont le sens devient alors différent.

Alkor est nommée par les Arabes  سها (Suha), ce qui signifie soit la «l'oubliée» ou «la négligée».

Plaustrum signifie en latin (Gaffiot) "charriot", mais aussi "en Astronomie : Constellation du Chariot." avec une citation du Livre X des Métamorphoses d'Ovide, vers 447  flexerat obliquo plaustrum temone Bootes

 

 VRSA MINOR , la Petite Ourse, est figurée par Mielich à l'envers, les deux ourses étant tournées dans le même sens (les deux casseroles ayant le manche dirigé vers la droite) alors que ces formes sont inversées chez Apian, et dans le ciel. Mielich a privilégié la cohérence artistique de son enluminure en représentant toutes les figures horizontalement face au lecteur.

 Mielich n'indique pas l'étoile polaire  (α Ursae Minoris ) à l'extrémité de la queue de la Petite Ourse, alors qu'Apian indique Stella polaris, et le nom arabe Alrukaba.

 

 

http://www.atlascoelestis.com/apianus%2001%20ursa%20minor%201.htm

 

http://www.atlascoelestis.com/apianus%2002%20ursa%20Major.htm

 

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Ursa Major et Ursa Minor, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

Ursa Major et Ursa Minor, Hans Mielich, 1570, enluminure de la partition du Motet Laudate Dominum de Roland de Lassus, Mus. Ms. AII folio 157, document Bibliothèque Nationale de Bavière.

 Rosa Triche et Crines Berenices .

Sous les pieds d'Hercule, Mielich a peint une fleur à cinq pétales, avec au dessus une inscription à demi-effacée où je crus lire SOSA, et en dessous une autre inscription TRICHE. 

A la gauche de cette fleur, des étoiles peu distinctes reçoivent le nom de CRINES BERENICES.

La comparaison avec la carte d'Apian permet de rétablir le sens de la peinture, car il faut lire Rosa désignant la fleur, et Crines Berenices Triche devant un astre dessiné par une sorte de soleil centré par un point.

"Rosa" Rosa apparaît pour la première fois dans la carte d' Apian de 1536: Imagines Syderum Coelestium . 

Apian écrit dans Astronomicum Caesarum sous le titre en marge Rosa. Triches. : 

Videntur etiam aliae stellae juxta Leonis caudam, e quibus altera Triches, altera Rosa dicitur. Triches nebulosa est, quae crines Berenices quoque dicitur, Trichasenim graeci crines vocant. Oritur 9 augusti, 27 septen. Occidit, Rosa 18 august, 15 novembris occidit

 

Je tente de traduire par :

"D'autres étoiles se voient près de la queue du Lion, qui sont appelées l'une Triches, et l'autre Rosa. Triches est une nébuleuse, dite aussi "Crines Berenices", ou "Trichas" par les grecs. Elle apparaît le 9 août et disparaît le 27 septembre, et Rosa apparaît le 18  août et disparaît le 15 novembre. "

 

Selon Hyginus, la reine Bérénice avait fait vœu d'offrir sa chevelure à Aphrodite si son époux Ptolémée III revenait vivant de sa lutte contre Séleucos II. L'offrande fut faite en 243 av. J.C., mais la chevelure disparut dès le lendemain et, devant la colère du roi,  l'astronome de la cour, Conon de Samos, annonça que l'offrande avait tellement plu à la déesse qu'elle l'avait placée dans les cieux ; il montra au couple royal un amas d'étoiles qui est maintenant appelé Coma Berenices, la Chevelure de Bérénice. Auparavant, l'astérisme était considérée, notamment par l'Almageste de Ptolémée, comme l'extrémité de la queue du Lion.

Les étoiles les plus visibles de cet amas de faible amplitude constituent le diadème de Bérénice, sa couronne.

 

 

 

:

http://www.atlascoelestis.com/Pietro%20Apiano.htm

 

Rosa,  Triche et Crines Berenices.

Rosa, Triche et Crines Berenices.

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SOURCES et LIENS.

— compilations de sites et liens : http://www.staff.science.uu.nl/~gent0113/celestia/celestia.htm

— Société d'Astronomie de Rennes : http://www.astro-rennes.com/index.php

https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_constellations 

APIAN (Petrus),1540, Astronomicum Caesareum Apian, Petrus Ingolstadii, 1540 : Deutsches Museum, München Signatur: 1927 C 4 : http://dx.doi.org/10.5079/dmm-63

 http://www.atlascoelestis.com/Zagrebelsky/Astronomicum%20Caesareum[1].pdf

http://daten.digitale-sammlungen.de/~db/0008/bsb00084760/images/index.html?id=00084760&groesser=&fip=xdsydeayaxdsydxdsydyztsxdsydqrs&no=4&seite=1

 APIAN Petrus, FRISIUS Rainer Gemma 1553, La Cosmographie de Pierre Apian, Docteur Et Mathematicien Tres Excellent: traictant de toutes les Regions, Pais, Villes, & Citez du monde, Gaultherot,- 140 pages

https://books.google.fr/books?id=xdFZAAAAcAAJ&printsec=frontcover&hl=fr#v=onepage&q&f=false

APIAN (Petrus), Cosmographia, Bontius, 1553.

http://echo.mpiwg-berlin.mpg.de/ECHOdocuView?url=/permanent/library/PUBSU9QD/index.meta&start=51&pn=25

— ARATUS, Phaenomena, Manuscrit du 9ème siècle, traduction d'Aratus par Tullius Cicéron avec des extraits de l'Astronomica d'Hyginus, Diocèse de Reims : British Library London, Ms Harley 647, 22 figures en pleine page des constellations

http://www.bl.uk/catalogues/illuminatedmanuscripts/record.asp?MSID=6561

http://www.kristenlippincott.com/assets/Uploads/MSS-DESCRIPTIONS-CiCERO-London-BL-Harley-647-9-Feb-2012.pdf

— CAIOZZO (Anna) 2003, Images du ciel d'orient au moyen âge: une histoire du zodiaque  et de ses représentations dans les manuscrits du Proche-Orient musulman Presses de l'Université Paris-Sorbonne https://books.google.fr/books?id=X4bvch-aC4cC&dq=kit%C3%A2b+suwar+al-kaw%C3%A2kib+al-th%C3%A2bita&hl=fr&source=gbs_navlinks_s

— STOPPA (Felice) : http://www.atlascoelestis.com/durer.htm

 

— HUNT (Patrick), 2012,: "Albrecht Dürer’s 1515 Imagines Coeli Star Charts" , Electrum Magazine, July 20, 2012) http://www.electrummagazine.com/2012/07/albrecht-durers-1515-imagines-coeli-star-charts/

 — KANAS ( Nick)  Star Maps: History, Artistry, and Cartography https://books.google.fr/books?id=bae3LP4tfP4C&pg=PA91&lpg=PA91&dq=names+of+stars+islamic+1540&source=bl&ots=ui_D4iJMJA&sig=l8UAfi9zLVWTmLEZUi3J77S5nMI&hl=fr&sa=X&ved=0CDsQ6AEwA2oVChMI3rDwmJDYxwIVARIUCh0jnAoz#v=onepage&q=names%20of%20stars%20islamic%201540&f=false

 

 KUNITZSCH ( Paul), 1987, « Peter Apian and Azophi - Arabic Constellations in Renaissance Astronomy » Journal for the History of Astronomy, Vol.18, NO. 2/MAY, P.117,

http://adsabs.harvard.edu/full/1987JHA....18..117K

— KUNITZSCH ( Paul), 1986, : "Peter Apian und Azophi. Arabische Sternbilder in Ingolstadt im frühen 16. Jahrhundert". München: Verlag der Bayerischen Akademie der Wissenschaft 1986

https://www.yumpu.com/de/document/view/7493094/peter-apian-und-azophi/27

 

 KUNITZSCH ( Paul), 1986, The Star Catalogue Commonly Appended to the Alfonsine Tables,  Journal for the History of Astronomy, Vol.17, NO. 49/Mai, P. 89. http://adsabs.harvard.edu/full/1986JHA....17...89K
 

— Sur Philippe Apian : 

http://www.ensba.fr/presentations-collections/Allemagne16e/version_sans_JS/Philippus_Apianus.html

http://irfu.cea.fr/Sap/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast.php?id_ast=2617

— Sur Pierre Apian :

http://www.atlascoelestis.com/ApianusPaginabase1.htm

— Astronomie arabe : http://www.astrosurf.com/quasar95/exposes/astronomie_arabe.pdf

Al-SUFI : 'Kitāb ṣuwar al-kawākib (al-thābitah) :

http://bodley30.bodley.ox.ac.uk:8180/luna/servlet/view/search?q=Title=%22Kit%C4%81b%20S%CC%A3uwar%20al-kaw%C4%81kib%20(al-th%C4%81bitah)%20[Book%20of%20pictures%20of%20the%20(fixed)%20stars]%22&os=400

– Noms d'étoiles : 

Sites consultés :

http://www.constellationsofwords.com/Fixedstars.htm

https://www.pa.msu.edu/people/horvatin/Astronomy_Facts/star_names/starsA.htm

http://datab.us/i/List%20of%20Arabic%20star%20names

http://www.constellation-guide.com/constellation-list/libra-constellation/

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Published by jean-yves cordier - dans Hans Mielich
2 septembre 2015 3 02 /09 /septembre /2015 22:31

Présentation.

La baie n°3 occupe le bras nord du transept et mesure 4,80 m de haut et 1,50 m de large. Constituée de 3 lancettes trilobées et d'un tympan à 7 ajours, elle est consacrée aux scènes du martyre de sainte Barbe.

Datation : 1510-1515.

Comme les autres baies, les lancettes sont divisées au 2/3 de leur hauteur  par un meneau horizontal en deux niveaux. On décrit trois registres historiés, surmontés d'un registre de dais architecturés. Les lancettes sont nommées A, B, C de gauche à droite.

 

Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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I. REGISTRE INFÉRIEUR.

Lancette A : deux donatrices.

Panneaux modernes par Hucher en 1888 (signature et date)

 

Une donatrice porte les armoiries de Trégain au lambel à trois pendants. Elle est suivie d'une autre donatrice agenouillée. Ces dames sont présentées par une sainte tenant la palme du martyre, qui pourrait être sainte Barbe.

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Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B: Vierge à l'Enfant au chapelet.

Vierge couronnée par deux anges, et tenant un chapelet (?)

 

Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C : sainte Barbe présente un couple de donateurs.

Le donateur porte un tabard aux armes des Trégain ; son épouse porte une jube aux armes parti de Trégain et La Bouëxière. La tête de la donatrice a été refaite dans la seconde moitié du XVIe siècle.

Si l'identification des armoiries des donateurs est vraisemblable, les personnages eux-mêmes et la date de leur alliance est inconnue. Le costume de la donatrice indique le milieu du XVIe siècle et la mode en vogue sous Catherine de Médicis (Inventaire).

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Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

 

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Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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REGISTRE MÉDIAN.

Registre très remanié, dont les scènes se chevauchent par suite de collages défectueux.

Lancette A.

 

Mort du père de sainte Barbe frappé par la foudre

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Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B. Décollation de sainte Barbe.

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Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C (détail).

 
Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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REGISTRE SUPÉRIEUR.

Lancette A. Attroupement : bourreaux ?

 

Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Détail : verre rouge doublé gravé à la molette.

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Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Dais architecturé de la lancette A.

Il privilégie la grisaille, seulement rehaussé de jaune d'argent sur les chevelures et les instruments de musique. Quatre sortes de putti en forment les éléments remarquables : deux musiciens (une musette pastorale (?) et un instrument courbe dont l'extrémité est entourée de boules) ; un angelot central ; et, en haut, peut-être un Hercule.  

Dais architecturé de la lancette A. Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturé de la lancette A. Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B. Montée de sainte Barbe au ciel.

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Verre rouge doublé gravé 

Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Le corps de sainte Barbe transporté aux cieux par les anges, Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Le corps de sainte Barbe transporté aux cieux par les anges, Lancette B, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C. Attroupement : bourreaux ?

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturé de la lancette C.

Ce dais est très différent de celui de la lancette A ce qui suggère une profonde réorganisation des panneaux lors de restaurations.

Il comporte un arc Renaissance à caissons.

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Dais architecturé, lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturé, lancette C, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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TYMPAN.

Réseau historié et armorié figurant deux anges tenant des écus et 

Armoiries .

Ajour supérieur : Armes des Bouteville pleines (refaites).

Deuxième rang :

à gauche : Ange  (buste refait) portant un écu mi -parti de Bouteville et du Chastel.

à droite : ange portant les armoiries de Trégain au lambel à trois pendants d'azur (refaites)

Rang inférieur :

dans les ajours latéraux, deux anges tenant des phylactères avec des inscriptions en lettres gothiques : TE DEUM LAUDAMUS TE DOMINUM CONFITEMUR (panneau 4) et GLORIA IN EXCELSIS DEO (ET IN TERRA) PAX HOMINIBUS .

Ajours centraux : Ecu parti Trégain - La Bouëxière. Ecu parti Trégain -? (verre blanc)

 

Tympan, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Tympan, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.
Tympan, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan, Baie 3, Transept nord, chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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SOURCES ET LIENS.

Le Faouët et Gourin, inventaire topographique, Secrétariat d'État à la Culture, Paris, Imprimerie Nationale 1975. .

GATOUILLAT (Françoise), HEROLD (Mchel), 2011, "Les vitraux de Bretagne", Corpus Vitrearum VII, Presses Universitaires de Rennes, 

— LENA (Laurent), 1989, Le Faouët, la Chapelle Sainte Barbe : Son histoire, 1489-1989 

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Published by jean-yves cordier - dans Le Faouët.
1 septembre 2015 2 01 /09 /septembre /2015 19:38

Les vitraux du XVIe siècle de la chapelle Ste-Barbe du Faouët (56) : III. Le vitrail de sainte Barbe, en baie 1.

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— Pour les autres vitraux de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët,, voir :

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— Pour une présentation détaillée de la Légende de Sainte Barbe, voir :

La chapelle Notre-Dame de Lannelec à Pleyben. Deuxième partie : Sainte-Barbe .

— Pour le culte de sainte Barbe contre la foudre, voir :

— Statues de sainte Barbe : elles sont innombrables.

— Vitraux de la Vie de sainte Barbe :

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Présentation.

La chapelle Sainte-Barbe est éclairée par six baies, dont quatre (baies 1 ; 2 ; 3; et 6) ont conservé leur verrières d'origine, installées entre 1512 et 1515 lors de sa construction commanditée par le seigneur du lieu, Jean de Bouteville. 

AncreAncreAncreAncre Placée à gauche de l'autel près d'une statue de sainte Barbe, la baie 1 mesure 4,80 m de haut et 1,40 m de large et est divisée en trois lancettes (A, B, C)  coiffées d'un tympan à sept ajours et écoinçons.Chaque lancette est divisée au tiers supérieur par un meneau, cloisonnant le niveau inférieur avec  le niveau supérieur qui reçoit des  dais architecturés. Le niveau sous-jacent, lui-même composé  de deux registres est consacré en partie basse aux donateurs et à la Vierge, et en partie haute à des scènes de la Vie de sainte Barbe.

Le vitrail a été restauré dès la seconde moitié du XVIe siècle, puis au XIXe siècle, avant la restauration menée en 1882-1888 par l'atelier Hucher du Mans, qui a créé entièrement le panneau de la Vierge. Au XXe siècle, il a été restauré par l'atelier Hubert de Sainte-Marie à Quintin (22)

 

Plan de la chapelle Sainte-Barbe dans l'Inventaire topographique page  286 : la baie 1 correspond ici à Nord II

Plan de la chapelle Sainte-Barbe dans l'Inventaire topographique page 286 : la baie 1 correspond ici à Nord II

Il forme, comme ce plan le montre, un ensemble en triptyque encadrant l'hémi-hexagone qui fait ici office de chœur, centré par l'autel. A droite de l'autel se trouve la statue de la Vierge, et à gauche, sur un socle portant des armoiries, celle de sainte Barbe. Des œufs d'autruche votifs y sont suspendus, en lien avec les boules de feu créés par les éclairs, puisque la sainte est invoquée pour protéger de la foudre.

 

Le chœur de la chapelle Sainte-Barbe et les baies 1, 0 et 2.  Le Faouët, photographie lavieb-aile.,

Le chœur de la chapelle Sainte-Barbe et les baies 1, 0 et 2. Le Faouët, photographie lavieb-aile.,

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Statue de sainte Barbe, XVIIe siècle, bois polychrome.

h. 1,66 m. "Chevelure retenue par un voile, debout, vêtue en costume Louis XIII (hongreline et jupe ample) et d'un manteau drapé, tenant une palme de martyre dans la main droite. Tour en demi-relief plaquée contre le mur." (Inventaire régional, 1975).

L'"hongreline" est défini par le CNRTL comme "Justaucorps cintré, pincé aux hanches, fendu un peu au-dessus de la ceinture, porté par les officiers d'infanterie jusqu'au milieu du XVIIe siècle; sorte de camisole à grandes basques portée par les femmes".  On la décrit aussi comme une courte veste à basques, ou comme "un corsage ajusté, à longues basques flottantes, porté sur la jupe par les femmes du peuple ou de la campagne", ou " un manteau ou une redingote descendant à mi-cuisse, généralement garni et / ou doublée de fourrure développé et popularisé sous le règne de Louis XIII depuis la Hongrie ou l'Allemagne. La hongreline a été porté à la fois par les militaires et par  les civils."

 On peut noter aussi le pendentif en cœur enflammé porté par le collier de grosses perles.  

 

 

Statue de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Statue de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Baie 1 , verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Baie 1 , verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Baie 1 , verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Baie 1 , verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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REGISTRE INFÉRIEUR : DONATEURS ET VIERGE.

La présence de ces donateurs nécessite un rappel historique et héraldique.    

La chapelle est construite à 178 mètres d'altitude sur une plateforme à flanc de la falaise de Roc’h ar marc’h bran, en surplomb de la rivière Ellé (100 mètres plus bas), du XVIe siècle au XVIIIe siècle avec les principaux travaux réalisées de 1489 à 1512. Selon la tradition locale, elle est le résultat du vœu d'un seigneur de Locmalo, Jean de Toulbodou, qui, pris dans un orage à cet endroit lors d'une chasse, promit d'édifier un lieu de culte à sainte Barbe s'il échappait à la foudre. Le lendemain Toulbodou achète le terrain au baron du Faouët, Jehan de Bouteville, et fait entreprendre sa construction à partir du 6 juillet 1489. (Wikipédia)

la "tradition locale" est authentifié par l' acte de donation du terrain (6 juillet 1489) et par l'inscriptiion en caractères gothiques en relief de la console d'une statue placée sur le mur est du bras sud du transept :

Le comecem[ent] ceste cha / pelle fut le VI iour de / juillet lan mil CCCC IIII XX neuff

"Le commencement de cette chapelle fut fait le sixième jour de juillet de l'an 1489". (les tildes du o et du e de "comecement" sont presque détruits). La console semble avoir été brisée, car le rouleau est tenu par deux anges dont on ne voit que la main et la robe.

 

 

 Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Inscription de fondation, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Inscription de fondation, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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La chapelle n'a pas reçu, comme toutes celles de la région, une charpente et une couverture en bois, mais une voûte en pierre sur croisées d'ogives. A la croisée des ogives de la voûte du chœur, cinq anges présentent des écussons aux armes des Bouteville d'argent à cinq fusées de gueules rangées en fasce, des Toulbodou "d'or semé de feuilles de houx de sinople", et de leurs alliés les Talhouët "d'argent à trois pommes de pins de gueules". A la clef de voûte du carré du transept, les cinq fusées de gueules des Bouteville est entouré d'une guirlande de feuillages et de fruits tenue par quatre angelots. La clef de voûte du bras sud du transept  présente aussi le blason des Bouteville. Mais celle du bras nord du transept, ce blason est tenu par un ange de belle taille , et un phylactère court autour de lui, portant cette inscription :

 

Lan : mil Vcts XII fut faicte ceste voute.

"L'an 1512 fut faite cette voûte."

C'est ainsi que l'on peut dater les vitraux toujours placés après l'achèvement de la couverture d'un édifice, entre 1512 et 1515.

 

Clef de voûte du bras nord du transept, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Clef de voûte du bras nord du transept, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

La famille de Bouteville.

Si Jean de Toulbodou, dont les armoiries sont d'or semées de feuilles de houx de sinople est le fondateur de la chapelle, les droits prééminenciers de celle-ci étaient détenus par la famille de Bouteville, et ce sont donc leurs armoiries qui y sont principalement visibles.

Les Bouteville (ou Boutteville) sont originaires de Normandie. Puis ils se scindèrent en une branche anglaise qui, sous le nom de Botfield, conserva le  blason, et une branche bretonne qui suivit Pierre de Dreux lorsque celui-ci fut nommé duc de Bretagne en 1213, et adoptèrent les armoiries d'argent à cinq fasces de gueules. Ils alors devinrent seigneurs du Faouët par alliance, et y disposèrent d'un château. Le château fort des Boutteville au Faouët, que le chroniqueur médiéval Jean Froissart qualifie de « petit fort », fut assiégé en 1342 par les troupes du roi d'Angleterre Édouard III pendant la guerre de Succession de Bretagne. Une garnison anglaise s'y installa mais le château fut successivement repris par les partisans de Charles de Blois et de Jean de Montfort. À la fin de la guerre, le château était ruiné et les seigneurs du Faouët firent de leur manoir à Le Saint leur résidence principale. Ils ne se réinstalleront dans la petite ville qu'au milieu du xvie siècle. 

Les Bouteville seront toujours de fidèles alliés des ducs de la dynastie des Montfort. Ils en seront récompensés en figurant parmi les chambellans de la cour ducale sous le duc François II et en étant honorés du titre de barons par la duchesse Anne.

 

  • Hervé, sénéchal de Ploërmel et Broërec en 1270, est sans-doute celui qui épousa l'héritière du Faouët.
  • ... 
  • Jean I de Bouteville, seigneur du Faouët, marié à Andrée de la Rivière
  •  Jean II, marié en 1373 à Jeanne de Quélen
  •  Jean III, marié à Isabeau de Penhoet. En 1420, il prit les armes pour délivrer le duc Jean V, amlors prisonnier des Penthiève. En 1427, il fut capturé par les anglais au Mont Saint-Michel
  •  Jean IV  (1405 -, marié à Alix de Coetquénan (fille d'Olivier de Coëtquenan et de Blanche de Cornouaille). Armoiries des de Coetquénan : d'azur au chateau d'or.
  • Jean V de Bouteville, seigneur du Faouët et de Barrégan, vicomte de Coetquénan, chambellan du duc François II, est celui qui vendit en 1489 l'emplacement de la chapelle Sainte-Barbe. Il épousa Marie de Quimerc'h le 28 novembre 1453. Marie de Quimerc'h ou de Kerimerc'h (1445 -), est la fille de Charles, seigneur de Kerimerc'h (1415 - 1485). Ils eurent onze enfants dont Catherine et Louis. 
  • Louis de Bouteville (- 18 mars 1539), épousa le 19 janvier 1498 Jeanne du Chastel (fille d'Olivier du Chastel et de Marie du Poulmic). La famille du Chastel porte fascié d'or et de gueules de six pièces.
  • Yves de Bouteville (aveu du 4 juin 1542), marié avec Renée de Carné. Il commandait en 1546 le ban et l'arrière-ban de l'évêché de Cornouaille .
  • Jeanne de Bouteville,  dame du Faouët, vicomtesse de Coëtguenan †1572 , mariée en secondes noces en février 1559 avec Claude, marquis de Goulaine, 1512-1579  seigneur de Goulaine, baron de Blaison, chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, né le 12 février 1512 - Raix (16), décédé le 24 avril 1579 - Le Saint (56) à l’âge de 67 ans , inhumé  à la chapelle Notre-Dame en Le Saint (56) et fils de Christophe de Goulaine et de Claude de Montjean. Claude de Goulaine  mourut avant la Ligue. 

et  Yves, abbé de Langonneten 1518 † 1536.

Les successeurs à la seigneurie du Faouët. Goulaine et du Fresnay.

  La famille Goulaine succède aux Bouteville, par alliance, à partir de 1559.Les Goulaine étaient une famille noble ancienne, citée lors de la septième croisade (1248). Au cours des Guerres de religion, les Goulaine ont combattu dans les rangs de la Ligue catholique :Gabriel, sieur de Goulaine, à la tête de cinquante lanciers, et son frère Jean, baron du Faouët, ont conquis le château de Trogoff (Plouescat) et celui de Kérouzéré (Sibiril) en 1590.

Blasonnement : Mi parti d'Angleterre et de France (mi-parti de gueules à trois léopards d'or passant l'un sur l'autre et d’azur à trois fleurs de lys d'or 

  • Claude de Goulaine (cf. supra.
  • Jean de Goulaine, baron du Faouët, ardent ligueur, prit part à l'attaque de Kerouzeré (Sibiril) en 1590, fit sa soumission en 1598, et vivait encore en 1615.
  •  Gabriel de Goulaine épousa Claude de Nevet, et mourut sans postérité. 

La baronnie du Faouët sera rachetée par Sébastien du Fresnay, conseiller du roi au Parlement de Bretagne avant 1644. 

Armoiries des voûtes, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.
Armoiries des voûtes, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.
Armoiries des voûtes, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.
Armoiries des voûtes, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Armoiries des voûtes, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A : Sainte Barbe présentant la donatrice et ses filles.

Tête de sainte Barbe en partie restaurée. 

La robe de la donatrice porte en alliance les armes des Bouteville et celles des Du Chastel. Cette partie a été refaite, et le restaurateur a donc pris le parti d'identifier les donateurs comme étant Louis de Bouteville et son épouse Jeanne du Chastel, les seigneurs du Faouët à la date de la création des vitraux. On retrouve ces armes en alliance parmi les blasons de la voûte.

 La difficulté tient par exemple du fait que je ne retrouve pas de généalogie précisant les différents enfants de Jeanne du Chastel, hormis Yves de Bouteville, et que je ne peux vérifer si elle donna naissance à des (deux) filles. Les auteurs du Corpus Vitrearum écrivent à propos de la donatrice "peut-être Jeanne du Chastel".

La donatrice porte la coiffure que porte Anne de Bretagne dans son portrait par Bourdichon dans les Grandes Heures (vers 1508). Celle-ci set constituée de trois éléments, un premier bonnet de tulle plissé puis une sous-coiffe rouge à galon or, et enfin un voile au galon enrichi de pierreries (cabochons noirs certis d'or).

Comme Anne de Bretagne, Jeanne du Chastel et ses filles portent aussi un collier près du cou au dessus d'une encollure carrée. Autre point commun, les manches très larges laissant apparaître une sous-manche rouge, plissée et resserré sur le poignet. Enfin, la posture est la même, à genoux devant le prie-dieu où un livre d'Heures est ouvert, les mains jointes et le regard fixé vers un objet de dévotion (la Vierge à l'Enfant dans le cas présent).

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La robe de Jeanne du Chastel, celles de ses filles et celle de la sainte patronne ont le même élément pectoral en bustier échancré à la taille, et on retrouve ce détail vestimentaire sur sainte Catherine dans le portrait des Grandes Heures de Bretagne (supra). Ici, il est de drap fin (soie ?) entièrement frappé d'un décor, brodé ou damassé, et comporte au centre une bande alternant des médaillons ovales à quadrilobes et des paires de boutons. 

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 la donatrice (Jeanne du Chastel ?) et l'une de ses deux filles, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

la donatrice (Jeanne du Chastel ?) et l'une de ses deux filles, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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L'analyse de la partie inférieure de la robe de la donatrice est difficile, car la photographie a été prise sous le vif éclairage intérieur de la chapelle, qui met en évidence la mise au plomb mais casse le jeu de la lumière extérieure sur le verre coloré. On voit néanmoins la bande verte du tissu damassé recouvrant le prie-dieu, la bande de six à huit rectangles horizontaux correspondant sans-doutes à l'alternance des  fasces rouges et or des armoiries des du Chastel, et la bande de trois losanges rouges correspondant, à parti, aux fusées de gueules des armoiries des de Bouteville.

Sainte Barbe nimbée, aux longs cheveux blonds, tient son attribut principal, la tour à trois fenêtres, métaphores de la sainte Trinité. (la chapelle comporte une tour identique, avec ses trois étroites ouvertures). Elle porte au dessus d'une robe dorée serrées par une ceinture, et du curieux pourpoint déjà décrit, un manteau bleu à capuchon blanc, attaché par un fermail rouge et or.

Sainte Barbe présentant la donatrice (Jeanne du Chastel ?) et ses deux filles, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Sainte Barbe présentant la donatrice (Jeanne du Chastel ?) et ses deux filles, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B : Saint Fiacre présentant le donateur .

 

panneau inférieur refait.

On compte cinq enfants, dont un blond, derrière le donateur. Puisque les filles étaient groupés derrière la donatrice, ce sont en toute logique ici des garçons. Si on considère qu'il s'agit de Louis de Bouteville, le couple Louis et Jeanne auraient eu (au moins) sept enfants. 

Louis de Bouteville est à genoux devant son prie-dieu, tourné face à la Vierge, revêtu de son armure dont il a posé le casque à panache. Au dessus de cette armure, il porte le tabard à ses armes, blanc à losanges rouges, soit d'argent à cinq fusées de gueules rangées en fasce. Sa coupe de cheveu à raie centrale  est celle d'un gentilhomme du début du XVIe siècle sous le règne de Louis XII, avant que François Ier n'adopte et n'impose en 1521 la barbe, et une coupe plus libre.

Saint Fiacre présente les donateurs. Pourquoi lui ? Bien-entendu en raison du culte privilégié que les seigneurs de Bouteville lui rendaient depuis Jean III de Bouteville, en fondant une chapelle et un hôpital en 1436. Le saint patron des jardiniers, et surtout le saint thaumaturge guérisseur des hémorroïdes et autres tuméfactions ficoïdes se reconnaît évidemment à sa bêche (dont le tranchant est toujours distinct de la base du fer), mais aussi à son scapulaire et à sa bure qui témoigne de son statut de moine. Son visage barbu est-il dû à une réfection ?

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Saint Fiacre présentant le donateur (Louis de Bouteville ?), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Fiacre présentant le donateur (Louis de Bouteville ?), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Saint Fiacre présentant le donateur (Louis de Bouteville ?), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Fiacre présentant le donateur (Louis de Bouteville ?), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C : Vierge à l'Enfant et serpent.

 Gattouillat et Hérold écrive page 291 : "Vierge à l'Enfant réalisée lors de la restauration de la verrière en 1887 par l'atelier Hucher (date et signature) qui s'inspire de la disposition du registre inférieur de la baie 2 et vice versa". Elle est nimbée et couronnée, et foule un serpent volumineux aux écailles grisâtres.

L'enfant, tenu sur le bras droit,  tient un fruit jaune à quartier ou à côtes (agrume ? grenade ??).

Inscriptions :

 LUAP. DRABI/ G. LUAP. DR (Je n'ai pas trouvé d'interprétation de ce qui peut être la signature du verrier).

AVE MARIA répété sur le galon du manteau.

En toutes petites lettres qui fait hommage à l'humble discrétion du restaurateur, on peut lire sur le socle l'inscription RESTAURÉ PAR LA FAB(rique) DU (Car)MEL dU MANS PAR MM. HUCHER ET FILS SUCCRS EN 1887.

Vierge à l'Enfant (XIXe), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Vierge à l'Enfant (XIXe), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Vierge à l'Enfant (XIXe), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Vierge à l'Enfant (XIXe), verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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REGISTRE SUPÉRIEUR : VIE DE SAINTE BARBE.

 

 

 

Registre supérieur, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre supérieur, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette A : Sainte Barbe enfermée dans sa tour est  visitée par un ange.

Le vitrail a connu quelques restaurations, comme la partie inférieure de la scène, ou une partie de la tête de l'ange.  On remarquera la meurtière à trois  

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Ce panneau m'évoque celui du lambris de Neuillac où un ange remet à sainte Catherine un onguent pour soigner ses blessures :

http://www.lavieb-aile.com/article-les-lambris-gothiques-de-n-d-des-carmes-a-neuillac-une-superbe-surprise-109714066.html

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Sainte Barbe emprisonnée dans sa tour est visitée par un ange, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Sainte Barbe emprisonnée dans sa tour est visitée par un ange, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B. Le père de sainte Barbe lui demande l'explication des trois fenêtres percées dans la tour. 

 

Scène moderne.  

Inscription sur le galon du père : --QAB : MC : OR BICMIOU ---O--B/ ---DIO

(déchiffrée par l'Inventaire MRO (Q?) IB : M CORBIC MIO... ).

Les auteurs de l'Inventaire Régional de 1975 interprètent ce panneau comme "sainte Barbe et son père lui montrant la tour dans laquelle elle doit être enfermé", mais je propose d'y voir plutôt le moment où, déjà enfermée, elle témoigne de sa foi dans le dogme de la sainte Trinité en faisant percer dans sa prison une troisième fenêtre. Bien que j'ai donné dans un article précédent le récit détaillé de la Légende, j'en rappelle le résumé disponible sur Wikipédia :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Barbe_la_grande_martyre

 

  "Sainte Barbe aurait vécu au milieu du iiie siècle après Jésus Christ en Bithynie (pan nord-ouest de l'Anatolie) sous le règne de l’empereur Maximien. Son père, Dioscore, aurait été un riche édile païen d'origine phénicienne. Un jour, son père décida de marier Sainte Barbe à un homme de son choix; elle refusa et décida de se consacrer au Christ. Pour la punir, son père l’enferma dans une tour à deux fenêtres, mais un prêtre chrétien, déguisé en médecin, s’introduisit dans la tour et la baptisa.

Au retour d’un voyage de son père, Barbe lui apprit qu’elle avait percé une troisième fenêtre dans le mur de la tour pour représenter la Sainte Trinité et qu’elle était chrétienne. Furieux, le père mit le feu à la tour. Barbe réussit à s’enfuir, mais un berger découvrit sa cachette et avertit son père. Ce dernier la traîna devant le gouverneur romain de la province, qui la condamna au supplice. Comme la jeune fille refusait d’abjurer sa foi, le gouverneur ordonna au père de trancher lui-même la tête de sa fille. Elle fut d'abord torturée : on lui brûla certaines parties du corps et on lui arracha les seins, mais elle refusa toujours d'abjurer sa foi. Dioscore la décapita mais fut aussitôt châtié par le Ciel. Il mourut frappé par la foudre."

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Les "fenêtres" sont dessinées ici comme trois meutrières dont la forme en croix ajoute un symbole supplémentaire.

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Lancette B. Le père de sainte Barbe lui demande l'explication des trois fenêtres percées dans la tour. verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B. Le père de sainte Barbe lui demande l'explication des trois fenêtres percées dans la tour. verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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La tour de la chapelle Sainte-Barbe,  ses trois fenêtres et la statue de sainte Barbe. Photographie lavieb-aile.

La tour de la chapelle Sainte-Barbe, ses trois fenêtres et la statue de sainte Barbe. Photographie lavieb-aile.

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La tour de la chapelle Sainte-Barbe,  ses trois fenêtres et la statue de sainte Barbe. Photographie lavieb-aile.

La tour de la chapelle Sainte-Barbe, ses trois fenêtres et la statue de sainte Barbe. Photographie lavieb-aile.

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Lancette C. Sainte Barbe et la tour.

L'interprétation de ce panneau n'est pas claire.

Remarquer une pièce posée "en chef-d'œuvre" entre le bras gauche et la poitrine : elle est découpée à l'intérieur (j'évite de dire "au sein de " ) de la pièce de verre de couleur jaune.

Lancette C : sainte Barbe;  verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C : sainte Barbe; verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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NIVEAU SUPÉRIEUR : DAIS ARCHITECTURÉS.

 

Dais architecturés, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturés, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette A

Un lion rehaussé de jaune d'argent se tient au centre. On lit autour de la coupole en partie basse l'inscription AVEGR- / AVEGR- interprétée comme AVE GRATIA / AVE GRATIA   

Dais architecturé lancette A, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturé lancette A, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B.

On lit cette fois l'inscription INOMNEM  répétée en miroir (inversion du verre ?) du coté droit. On peut l'interpréter comme l'incipit du verset 5 du psaume 19 (18)   In omnem terram exivit sonus eorum et in fines orbis terrae verba eorum : "Leur retentissement parcourt toute la terre, leurs accents vont aux extrémités du monde, où il a dressé une tente pour le soleil.". Ce verset est intégré dans la liturgie catholique en antienne, par exemple dans le premier Nocturne du  Commun des Apôtres.

 

Dais architecturé lancette B, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturé lancette B, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C.

Pas d'inscription, ou bien celle-ci a été perdue et remplacée par une succession d'orbes.


 

 

Dais architecturé lancette C, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais architecturé lancette C, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

TYMPAN

Armoiries entièrement refaites (d'après l'ancien ?). 1. En prééminence, armes de Bouteville pleines. 2. Écu parti de Bouteville / du Chastel. 3. Armes des Trégain (ou des Trésiguidy) aulambel à trois pendants. 4.  Écu parti des Trégain (ou Trésiguidy ?) au lambel / Kermeno (?). 5. Écu parti des Trégain (ou Trésiguidy ?) au lambel / La Bouëxière

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Tympan, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan, verrière de sainte Barbe, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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SOURCES ET LIENS.

Le Faouët et Gourin, inventaire topographique, Secrétariat d'État à la Culture, Paris, Imprimerie Nationale 1975. page 41 et fig. 118 et 119 page 288.

— GATOUILLAT (Françoise), HEROLD (Mchel), 2011, Les vitraux de Bretagne, Corpus Vitrearum VII, Presses Universitaires de Rennes, 

LENA (Laurent), 1989, Le Faouët, la Chapelle Sainte Barbe : Son histoire, 1489-1989 

 

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Published by jean-yves cordier - dans Le Faouët.
30 août 2015 7 30 /08 /août /2015 21:20

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Présentation.

La chapelle Sainte-Barbe est éclairée par six baies, dont quatre (baies 1 ; 2 ; 3; et 6) ont conservé leur verrières d'origine, installées entre 1512 et 1515 lors de sa construction commanditée par le seigneur du lieu, Jean de Bouteville.  

La baie 2, dite de la Transfiguration, se situe à l'est de de l'autel principal, sur un mur oblique délimitant le chœur de cette curieuse chapelle dépourvue de nef. Elle encadre donc à droite la baie 0, et son vitrail du XIXe siècle dédié à sainte Barbe, tandis que la baie 1 du XVIe siècle encadre cette fenêtre à gauche. Sur le plan suivant, la baie 1 correspond à l'indice N II, et la baie 2 à l'indice S.II. 

Comme la baie 1, elle est divisée par son remplage à meneaux en trois lancettes A, B, et C à deux niveaux asymétriques, alors que le réseau du tympan délimite cinq ajours et écoinçons. Elle mesure 4,65 m de haut et 1,40 m de large.

Comme l'a remarqué Roger Barrié, ces trois baies constituent l'équivalent du triptyque d'un retable au dessus et de part et d'autre de l'autel. La baie 1 et la baie 2 forment un ensemble symétrique, puisque à gauche sous la Vie de sainte Barbe, un couple de donateurs est tourné vers la Vierge et vers l'autel central, alors que cette disposition s'inverse à droite sous la Transfiguration avec un autre couple de donateurs et une deuxième Vierge à l'Enfant.

Ces deux verrières datent de la période estimée 1510-1515.

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Cette verrière a été comparée à trois autres œuvres par Roger Barrié en 1977 : à une Transfiguration de Plogonnec, d'une part ;  et, pour les dais notamment, au vitrail de la chapelle St-Exupère à Dinéault (aujourd'hui au Musée Breton de Quimper), et à un vitrail de l'église de Clohars-Fouesnant. J'apporterai les documents iconographiques permettant d'établir ces rapprochements.

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Technique.

En raison de l'éclairage de la chapelle, mes photos ont mieux visualisé la quincaillerie de fixation des vitraux, et leur mise en plomb, que les lumières des verres colorés. Ce défaut peut être mis à profit pour étudier la technique utilisée par les restaurateurs : on admirera ainsi comment les vergettes sont mises en forme pour suivre la courbure des verres, et comment elles sont fixées aux plombs par des attaches en escargot . Ou bien, on détaillera les différentes épaisseurs des baguettes de plomb (d'entourage, de sertissage..).

Ailleurs (panneaux de Moïse, du Christ), les barlotières seront bien visibles, avec leurs pannetons, leurs feuillards serrés par les clavettes : le savoir-faire des verriers s'y exposera dans toute son ampleur.

Partout, on constatera l'altération du verre ancien. Son épaisseur est évaluée par R. Barrié à 2 à 3 mm.

Des exemples de verres rouges gravés, mais aussi d'un verre vert gravé seront observés. La technique est celle du doublage du verre coloré mince par un verre blanc, et celle de la gravure par molette du motif sur le verre de couleur. Elle est employée pour les rayons diffusant autour du Christ, les ornements du chapeau de saint Jacques, et pour le revers de manche de la donatrice.

La technique picturale fait appel au trait de grisaille, au lavis de grisaille noire très diluée. Nul ne décrit avec plus de lyrisme et de compétence que Roger Barrié ces lavis, "si légèrement étendus par le blaireau et si habilement attaqués par le putois qu'ils apportent, surtout aux étoffes, une ombre qui anime plutôt qu'elle n'obscurcit la densité du verre coloré [...] il y a là un jeu subtil entre le rayonnement coloré du verre et le travail des lavis putoisés qui tient compte du support lumineux, pour aboutir à une sorte de forme-couleur" ...mais "ces lavis sont constitués d'une pellicule si mince qu'elle a pu disparaître par endroit".

On ne se lasse pas de lire l'évocation par le même auteur de l'enlevage au petit bois, pratiqué seulement pour les cheveux et la barbe et même travaillé à l'aiguille, "quelques enlevés à la plume ou à l'aiguille servant à souligner et à détacher des volumes sur le fond assombris du claveau central et des médaillons de soubassement." S'il n'est pas certain que nous soyons capables de tant de discernement, du moins, trouverons-nous ici une incitation à un examen passionnant des verres.

La sanguine , ou "rouge de fer", est quasi inexistant. Le jaune d'argent, appliqué avec précision au revers des pièces, sert à teinter les chevelures ou les pièces métalliques, et, dans les dais, à souligner les corniches, les gorges et oves, les ailes et têtes blondes des anges, les panses des cornemuses ou les motifs d'acanthes liées.

La gamme chromatique n'évite pas le couple d'un rouge chaud et profond et d'un bleu limpide, complété par le jaune, mais le risque d'un assourdissement de ces sonorités est prévenu par les vibrations légères des couleurs de complément que sont  le vert, le mauve, et le vieux-rose (robe de la Vierge). On entend bien que je paraphrase ici l'incontournable Roger Barrié, orfèvre auquel je n'ai pas fini de faire appel.

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Restaurations.

 Importante restauration attribuée à  (?) l'atelier Hucher du Mans entre 1882-1888 ; en 1912 ;  en 1956 par Jean-Jacques Gruber ; en 1961 par Hubert Sainte-Marie de Quintin. A partir de 1981, le service des Monuments historiques, en lien avec le LRMH, est amené à rechercher des solutions pour préserver les vitraux de la présence très abondante de mousses et de micro-organismes, puis à proposer diverses solutions de doubles verrières, mises au plomb simplifiée puis verres thermoformés par l'entreprise d'Hervé Débitus de Tours. En 2009, la chapelle figure encore sur la liste des travaux des Monuments historiques pour la restauration des vitraux.

Dossier images LRMH : http://www.lrmh.culture.fr/cgi-bin/qtp?typge=LREP&base=image&opimp=et&lang=fr&pp=1&dp=5&maxref=5&qmodu=EXT&tref=.R28+.R10&quest=[Sainte+Barbe,.R14]&cpres=0

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En-effet, les verres sont fragiles, sensibles aux projectiles, mais aussi à la corrosion  tant externe ( altération au contact des eaux de pluie et de la pollution atmosphérique,  salissures et  dégradations mécaniques  par pression des vents, abrasion des poussières) qu'à l'intérieur ( le ruissellement des eaux de condensations altérant progressivement les verres et des peintures jusqu’à la perte totale des motifs). Le thermoformage permet de conserver durablement les vitraux en place. La face externe est protégée par un double vitrage obtenu par thermoformage à partir de l’empreinte du vitrail à protéger,  alors que le verre est traité dans sa surface de manière à reproduire l’aspect extérieur du vitrail. La face interne est également  protégée  : en formant un double vitrage, le processus condensation ne se fait plus sur le vitrail. (Source : http://www.debitus.com/verres.php)

 

 

 

Protection par thermoformage "Debitus".

Face à leur rapide dégradation, les vitraux anciens de la chapelle ont bénéficié d'une expertise du développement de micro-organismes sur les deux faces en 1981 par le LRMH, et mise en œuvre de procédés de protection par doublage par thermoformage (Hervé Débitus à Tours).

 

Obtenu par thermoformage à partir de l'empreinte du vitrail à protéger, et placé juste derrière lui, le verre de doublage est traité dans sa surface de manière à reproduire l'aspect extérieur du vitrail en épousant le relief des plombs d'origine . Il le protège des intempéries et de la pollution.

obtenu par thermoformage à partir  de l'empreinte du vitrail à protéger, le verre est traité dans sa

Cette pratique existait déjà en Europe sous la forme de verres simples ou de vitraux incolores. En France, c’est Hervé Debitus qui l’a développée et perfectionnée dans son atelier de Tours à la demande du LMRH (Laboratoire de recherche des Monuments historiques). Il a eu l’idée d’utiliser la technique du thermoformage pour donner à ce bouclier un relief proche des verrières originales.

Grâce à cette invention, le maître-verrier a travaillé pour les cathédrales de Chartres, de Tours et de Bourges mais aussi pour la Sainte-Chapelle de Paris et de nombreuses autres églises. Hervé Debitus a également participé au groupe de travail sur les peintures pour vitrail de la SFIIC (Section française de l’International Institute of Conservation).

Actuellement, il fabrique les peintures traditionnelles vitrifiables pour la plupart des verriers du monde.

Parcours
1973 : Hervé Débitus commence à se former dans l’atelier Michel Petit
1977 : Il est embauché par l’atelier Lorin
1980 : Il crée son atelier de vitrail à Tours
2008 : Hervé Debitus est nommé Maître d’art ( ils ne sont que quatre en France)
2014 : Il transmet son entreprise à son élève Laurence Cuzange et un salarié Nicolas Babouin

 

Voir :

Manuel de conservation, restauration et création de vitraux, Ministère de la Culture et de la Communication Direction de l'Architecture et du Patrimoine Mission Ingénierie et Références Techniques

file:///C:/Users/jean-yves/Documents/Manuel_Vitrail_Septembre-2006_978-2-11-129951-1.pdf

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Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Doublage thermoformé "Débitus", Vierge à l'Enfant, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Doublage thermoformé "Débitus", Vierge à l'Enfant, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Roger Barrié a donné en 1977 une estimation rapide de l' authenticité des verres de cette baie, les verres restaurés apparaissant en hachuré. Si le niveau supérieur est presque entièrement ancien, excepté le sommet des panneaux supérieurs au centre et à gauche,  les deux registres du niveau inférieur ont été plus restaurés, et seuls sont authentiques le personnage d'Elie, les deux panneaux de la Vierge et le buste de la donatrice.

Roger Barrié, schéma d'authenticité des verres de la baie 2.

Roger Barrié, schéma d'authenticité des verres de la baie 2.

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Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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I. LE  REGISTRE INFÉRIEUR. DONATEURS DEVANT LA VIERGE.

 

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Le décor des lancettes est divisée en deux registres, inférieur consacré aux donateurs, et supérieur consacré à la Transfiguration.

 

Registre inférieur,Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur,Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A : Vierge à l'Enfant.

Une Vierge à l'Enfant nimbée, couronnée, est tournée vers la droite et donc vers les donateurs qu'elle regarde avec bienveillance. Elle porte l'Enfant sur le bras gauche, et celui-ci, nu, nimbé, tient dans la main gauche un fruit de couleur jaune. Elle est vêtue d'un manteau bleu, d'une robe violette à manches rapportées, nouée à la taille d'une ceinture dorée, et de souliers jaunes.

Elle se tient dans une niche sans montants verticaux, tendue d'un drap rouge à frange d'or, et dont l'élément architecturé supérieur à deux anges musiciens fera l'objet d'une étude séparée.

On lit l'inscription SVEOR / SVIOREV (ou / SNOREV) sous la niche.

Le socle architecturé sert d'appui aux pieds de la Vierge, mais aussi à une masse grillagée que l'on interprète comme étant le corps écailleux d'un serpent.

 

 

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B: donateur présenté par saint Fiacre.

 

 

Un seigneur, en armure, est représenté dans la posture du donateur, à genoux, mains jointes, devant le livre d'Heures posé sur un prie-dieu recouvert d'une étoffe, et regardant vers sa gauche, dans la direction de la lancette A et de la Vierge à l'Enfant. Ce chevalier a revêtu au dessus de l'armure un tabard à ses armes, qui sont d'argent à cinq fusées de gueules en fasce (cinq losanges rouges sur fond blanc) : il appartient donc à la famille de Bouteville. S'agit-il du co-fondateur de la chapelle, Jean V de Bouteville, alors représenté de façon posthume puisqu'il décéda avant la fin de l'édification de la chapelle ? Ou bien de son fils Louis, qui était seigneur du Faouët à la date à laquelle les vitraux furent posés ? Le problème trouverait sa solution si la donatrice était identifiable par ses armoiries, mais les restaurations successives ont brouillé les cartes.

Puisque les deux baies de Sainte Barbe (baie 1) et de la Transfiguration (baie 2) forment un ensemble, il est très peu envisageable que le même couple de donateur soit figuré en même temps à droite et à gauche de l'autel. Si on estime que Louis de Bouteville et Jeanne de Chastel figurent sur la baie 1, ils ne peuvent être à l'origine présents sur la baie 2 (et vice-versa). Il semblerait logique de trouver face à face les deux seigneurs co-fondateurs, Jean de Toulbodou et Jean de Bouteville, mais aucun indice ne soutient (ni n'infirme radicalement ?) cette hypothèse.

Une autre possibilité cohérente serait que Louis de Bouteville ait fait représenter son père Jean et sa mère Marie de Quimerc'h d'un coté, et qu'il se soit fait représenter avec son épouse (et ses enfants) en vis-à-vis. Un argument pour adopter cette hypothèse repose sur le témoignage de la comtesse du Laz, qui a vu ici, en baie 2, les armes de Quimerc'h. 

Si on donne crédit à la comtesse, ce sont Louis de Bouteville et Jeanne de Chastel qui occupent la baie à gauche de l'autel, place honorifique "du coté de l'évangile", accompagnés de leurs deux filles et leurs cinq garçons, et ici, dans la baie 2 placée à droite de l'autel, ce serait Jean V de Bouteville. Tout va bien.

NON, car, tachant de retrouver la source du témoignage de la comtesse, je lis à la 

page 20 de La Baronnie du Faouët

"Dans les vitraux, à droite et à gauche du maître-autel, sont représentés les Bouteville : les armes des Bouteville sont au sommet de l'un d'eux, et toute la nombreuse famille de Jean V de Bouteville et de Marie de Quimerc'h est groupée, les fils autour du père, en costume de chevalier, les filles à la suite de leur mère, tous à genoux, les mains jointes. ce vitrail est curieux et charmant". Ce témoignage a été écrit en 1892, par une personne parfaitement experte en généalogie et héraldique ; mais il est postérieur aux restaurations de 1887 par Hucher.

Quant à cette lancette, les auteurs du Corpus indiquent : "Louis de Bouteville, en cotte d'armes présenté par saint Fiacre (refaits)" : ces restaurations sont aussi à prendre en compte.

Conclusion provisoirement définitive : nous voyons ici Louis de Bouteville présenté par saint Fiacre, et nous allons découvrir bientôt sa chère épouse Jeanne.

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Quand à saint Fiacre, qui présentait déjà le sieur de Bouteville dans la baie 1, il est égal à lui-même, avec son nimbe, sa pelle de patron des jardiniers, sa tonsure et son scapulaire de moine. Au dessus, une inscription énigmatique à la base de la coupole indique CHIVAR / ALL.

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Saint Fiacre, Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Fiacre, Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Donateur, registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Donateur, registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C. Donatrice présentée par sainte Marie-Madeleine.

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Nous identifions sainte Marie-Madeleine à son attribut, le flacon de parfum, à son élégance vestimentaire, à ses bijoux (collier de perles) et à ses longs cheveux blonds dénoués sous un voile blanc. On notera la particularité du bandeau qui retient les cheveux afin de mettre en valeur la blanche finesse de la nuque : il passe derrière le cou à la façon d'un "chouchou", et j'en ai noté la présence sur de nombreuses statues du Finistère au XVIe siècle .

Voir Vierges allaitantes de Cornouailles, le bandeau de cheveu.

La tête de la sainte a été restaurée. Manteau vert, robe vieux-rose, fond rouge (deux teintes différentes).

Le patronage de Marie-Madeleine n'a aucun rapport avec le prénom de la donatrice ; mais celle-ci se place sous sa protection dans son rôle majeur d'intercession . sainte Marie-Madeleine appartient, avec sainte Anne, sainte Barbe, sainte Catherine et sainte Marguerite, à la petite liste des saintes implorées dans les suffrages des livres d'Heures. Si Barbe, Catherine et Marguerite sont des Auxiliatrices, protectrices des grands dangers et les situations d'urgence, Madeleine a un rôle plus complexe. Ancienne pécheresse convertie, mais aussi amie du Christ, elle est  aussi réputée pour attrait pour les parfums, les bijoux et riches vêtements,  par la sensorialité de sa chevelure, et par sa propension à toucher le corps (et presque exclusivement les pieds) du Christ. Elle illustre ainsi le plaisir des sens, convertis et mis au service de l'Amour de Dieu. Sensuelle, elle l'est aussi par ses caresses, mais surtout, surtout par ses larmes et ses postures anéanties par la douleur de la perte au pied de la Croix.    Elle peut servir d'exemple dans l'édification  des jeunes filles et jeunes femmes non seulement pour les détourner  de la luxure, mais aussi pour les conduire à la sanctification des cinq sens. Concilier vie sainte  et luxe est une problématique qui devait concerner particulièrement les dames de la noblesse, et elles pouvaient se reconnaître dans ce modèle à la beauté remarquable, aux riches atours, à la féminité exubérante, mais, malgré tout, parangon de piété.

Au Faouët, dans le diocèse de Vannes, où saint Vincent Ferrier est particulièrement vénéré depuis sa mort à Vannes en 1419, il peut être interessant de se référer à son homilétique (pour le plaisir de placer ce joli mot ) , et, au sein de son corpus d'homélie, de son sermon sur Marie-Madeleine. Aucun sermon n'a été conservé de la période bretonne. Mais on dispose de deux sermons panygériques , l'un de Pérouse en 1407 et l'autre de Valence entre 1412 et 1419. La conversion des cinq sens y est décrite : la bouche qui avait péché embrasse maintenant les pieds du Christ, les yeux demeurent inclinés à terre, et elle ne regarda plus jamais un homme en face. Etc...

Plus proche de la date de la réalisation du vitrail, un autre prédicateur célèbre, le cordelier d'origine bretonne Olivier Maillard prononça à Nantes entre 1460 et 1470 des sermons ; le sermon XLV porte sur Marie-Madeleine, mais tous ses traits de féminité sensuelle sont mis sur le compte de sa vie de pécheresse :

Que faisait-elle ?

Maria Magdalena , in sua propria domo deliciis et ocio vacans, usque ad ejus conversionem omne tempus suum omnemque vitam suam voluptatibus exposuit, ornando caput, poliendo crines et unguendo, componendo vestes , cantando cantilenas vanas, loquendo lascivia, conversando cum juvenibus, et ex consequenti de facili alia faciendo que non licet homini loqui. 

 "Splendide nempe illud pascebat, bene ac laute comedebat, beneque bibebat, ac dormiebat "la grasse matinée"  [en français dans le texte latin] , quoscunque refugiebat labores et habebat multa bona ac banquetandum

 Ma traduction ! "Marie-Madeleine, vivait jusqu'à sa conversion dans sa propre maison, une vie de délices et d'oisiveté, se livrant à tous les plaisirs, ornant sa tête, coiffant ses cheveux, se parfumant, choississant ses vêtements, chantant de vaines cantilènes, tenant des propos lascifs et en conversant avec les jeunes hommes, et, en conséquence, faisant d'autres choses dont il est pas permis à un homme de parler facilement." "Elle mangeait luxueusement, buvait autant, se levant tard en faisant "la Grasse Matinée", et, devenue riche, consacrant ses biens en banquetant."

Mais après sa conversion, il en va tout autrement : elle se coiffe avec coquetterie, elle s'habille avec soins, achète les plus beaux parfums, choisit des bijoux hors de prix. Mais elle le fait pour son Seigneur. Tel est le Surmoi adoptée par la donatrice.

 

La donatrice est à genoux face au prie-dieu où est ouvert son livre d'Heures. Elle porte la coiffe noire type "Anne de Bretagne" déjà décrite sur la donatrice de la baie 1. De même, elle porte le bustier à décor médian de médaillons dorés, et à encolure carrée, également décrit en baie 1. Par contre, la lourde chaîne en or à anneaux ovales, signe de richesse et donc de haute noblesse , ne se trouvait pas en baie 1. C'est un argument possible pour identifier ici Jeanne de Chastel, la dame de Faouët "en exercice". Les armoiries parti Bouteville et de Chastel de sa robe nous y incitent, mais comme elles sont dues à une restauration, elles ne sont pas un indice fiable d'identification.

De même, la manche bleue et son revers en verre vert gravé est l'œuvre d'un restaurateur. L'altération des mains et du livre témoigne de leur ancienneté.

Au dessus de la niche violette à cul-de-four, les deux anges joueurs de cornemuse sont présents comme en lancette A (et en lancette C).

 

Donatrice et sainte Marie-Madeleine, registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Donatrice et sainte Marie-Madeleine, registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Donatrice (détail), registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Donatrice (détail), registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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II. LE NIVEAU INFÉRIEUR, SECOND REGISTRE  : TRANSFIGURATION.

Note : J'ai procédé à l'étude du thème de la Transfiguration lors de mon examen des panneaux, homologues, de l'église de Plogonnec : je renvoie donc le lecteur à cet article :

 http://www.lavieb-aile.com/article-vitrail-de-plogonnec-iii-la-transfiguration-92501268.html

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Registre inférieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A. Saint Pierre.

Ce panneau serait entièrement refait. On note l'inscription sur le galon de la robe :

E. CHIVAR / ALBERT PIAG LKON et plus bas SLIc Bcx.G. Le prénom Albert peut évoquer la signature de verriers chargés de la restauration.

Saint Pierre, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Pierre, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Comparaison avec la Transfiguration de Plogonnec (photographie lavieb-aile):

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Lancette B : saint Jean.

Panneau  entièrement refait, mais dont l'altération (nimbe par exemple) est déjà importante.

Saint Jean, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Jean, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Saint Jean, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Jean, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Comparaison avec la Transfiguration de Plogonnec (photographie lavieb-aile):

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Lancette C : saint Jacques.

Saint Jacques, ébloui par la transfiguration de son maître, se protège en plaçant sa main gauche en écran. 

 Le visage, la main et la robe mauve seraient authentiques, ainsi que le chapeau. Notez ce chapeau en verre rouge doublé, sur lequel ont été gravés non seulement la coquille de Saint-Jacques emblématique, mais aussi les bourdonnets entrecroisés, ces bâtons taillés en forme de bourdon. Car le bourdon que tient saint Jacques est son attribut principal, avec la calebasse faite d'une courge vidée et séchée

Saint Jacques, Transfiguration, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Jacques, Transfiguration, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Saint Jacques, Transfiguration, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Jacques, Transfiguration, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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 Comparaison avec la Transfiguration de Plogonnec (photographie lavieb-aile):

C'est le seul cas où les cartons des deux verrières sont identiques, notamment pour les éléments authentiques.

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III. LE NIVEAU SUPÉRIEUR : TRANSFIGURATION (Moïse, Christe et Élie) ET DAIS ARCHITECTURÉS.

 

Niveau supérieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Niveau supérieur, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette A : Moïse tenant les tables de la Loi.

Dans un fond de ciel rouge pommelé de nuages gris-bleu (dans les Passions finistériennes du XVIe, le ciel est ainsi rouge), Moïse tient dans la main droite les Tables de la Loi et dans la main gauche le bâton rituel.

Il est inscrit sur les Tables : EG / OS / UM / ALF / AE / TO / CRE / ATO / RO / NO / DE / VS.

Soit EGO SUM ALFA ET OMEGA et (par approximation) CREATOR O[MNIUM] DEUS : la première partie est une citation de l'Apocalypse de saint Jean Ap.1:8 ou 22:13, mais aussi un chant grégorien ; et la seconde est l'incipit d'une ancienne hymne ambrosienne ( composé par saint Ambroise) chanté à l'office des Vèpres.

Les références tacites sont nombreuses. Moïse devant la clarté éblouissante du Christ transfiguré renvoie au texte biblique d'Exode 3 et de l'épisode du buisson ardent, pendant lequel Dieu révèle à Moïse son nom, YHWH, communément traduit par Je suis celui qui suis. Un lien est donc établi avec la présentation du Christ par "Je suis l'Alpha et l'Oméga." C'est dans le même épisode en Exode 4 que Dieu donne à Moïse des pouvoirs extraordinaires afin de convaincre son peuple : 

 L'Éternel lui dit: Qu'y a-t-il dans ta main? Il répondit: Une verge.

L'Éternel dit: Jette-la par terre. Il la jeta par terre, et elle devint un serpent. Moïse fuyait devant lui.

 L'Éternel dit à Moïse: Étends ta main, et saisis-le par la queue. Il étendit la main et le saisit et le serpent redevint une verge dans sa main.

 C'est là, dit l'Éternel, ce que tu feras, afin qu'ils croient que l'Éternel, le Dieu de leurs pères, t'est apparu, le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac et le Dieu de Jacob.

C'est cette verge, ce bâton-serpent que Moïse tient dans sa main sur ce vitrail.

L'hymne Creator Omnium Deus peut être mis en relation avec la Transfiguration, et avec le Buisson ardent, car ses premiers versets célèbre Dieu "qui revêts le jour de lumière éclatante".

 

Deus creator omnium 
polique rector, uestiens 
diem decoro lumine 
noctem soporis gratia,
 

Dieu créateur de toute chose
Roi des cieux qui revêts
le jour de lumière éclatante,
la nuit des grâces du sommeil 

A Plogonnec, le panneau correspondant porte :  EGO SOM QUI OM et CREDO IN UNUM

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— Inscription sur le galon de la tunique :

  • sur la manche droite : AVEMARI

  • sur l'encolure : ERATMORATIMOBPSUO

  • sur la manche gauche : MORI

— Dais armoriés :deux anges joueurs de cornemuse, et deux anges joueurs de flûte à bec..

Moïse, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Moïse, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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 Comparaison avec la Transfiguration de Plogonnec (photographie lavieb-aile):

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Lancette B : Christ transfiguré.

 

Christ transfiguré,  Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Christ transfiguré, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Christ transfiguré,  Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Christ transfiguré, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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 Comparaison avec la Transfiguration de Plogonnec (photographie lavieb-aile):

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Lancette C : Élie.

 

Elie, Christ transfiguré,  Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Elie, Christ transfiguré, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Elie, Christ transfiguré,  Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Elie, Christ transfiguré, Baie 2 , Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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 Comparaison avec la Transfiguration de Plogonnec (photographie lavieb-aile):

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V. LES DAIS ARCHITECTURÉS.

 

En 1977, ils ont retenu l'attention de Roger Barrié, qui préparait alors sa thèse sur les vitraux de Cornouaille. En effet, il les a rapproché judicieusement de ceux de l'église de Clohars-Fouesnant et de ceux de la chapelle Saint-Exupère de Logispar à Dinéault (29), ces derniers étant conservés au Musée Départemental Breton de Quimper.

Les baies de Clohars-Fouesnant datent de ca.1520, ceux de Dinéault de ca.1530.  

Les personnages sont figurés devant des tentures damassées (à Dinéault), ou devant le ciel (à Clohars-Fouesnant et au Faouët), dans des niches à coquilles surmontés de dais à putti musiciens, alors que les socles sont, à Dinéault, ornés de médaillons de têtes à l'antique.

A Clohars-Fouesnant, Roger Barrié décrit page 32 ces dais ainsi :

"L'entablement de l'arc triomphal est couronné d'une coquille cernée d'un rang d'oves et d'un ruban de billettes dont les extrémités s'enroulent sur elles-mêmes ; le tout terminé par un fleuron non éclos. La guirlande végétale, dont le motif central est ici une fleur, prend naissance dans deux oculus percés au dessus des piles et présentant un réseau losangé de vitrerie. Le claveau de l'arcature surbaissée, démesurément allongé aussi, est orné d'une étroite fenêtre aveugle et aux épaules très resserrées ; la conjonction de cette réminiscence de la grammaire gothique et du décor à l'antique tel qu'en abuse naïvement la Première Renaissance indique l'influence du décor lombard, normale au demeurant à partir de 1500, sur les modèles européens qui ont pu influencer le peintre verrier".

Dais à joueurs de cornemuse et de flûte, Clohars-Fouesnant :

 

A la chapelle Sainte-Barbe, il les décrit ainsi :

"Dans les lancettes latérales du Faouët, les dais ont exactement le même dessin et la même fonction que ceux du vitrail de Clohars-Fouesnant : un étagement complexe d'architectures chargées d'anges musiciens et d'ornements limite de façon un peu brutale le fond rouge de la Transfiguration. En opposition, les trois dais inférieurs, arrêtés à la hauteur du claveau central et des joueurs de cornemuse, couronnent des niches où un cul de four en coquille devait assurer la transition entre le dais et la tenture galonnée du fond. Le soubassement de chaque niche suit le plan d'un tiers d'hexagone, s'articulant sur trois éléments qui sont la reprise à même échelle du claveau du dais. Les faces méplates de ce socle en avancée imitent des bas-reliefs lourdement encadrés consistant en un motif d'ovales peu accusés."

Dans les trois cas, les anges associés en encadrement deux à deux jouent en bas de la cornemuse, et en haut de la flûte à bec. Ils sont installés à califourchon sur un motif de feuilles d'acanthes liées.

Ce motif d'acanthes constitue l'élément de base de la décoration du Jugement dernier de Plogonnec, de l'Arbre de Jessé de Kerfeunten, de la Pentecôte de Sainte-Barbe du Faouët, etc..

La cornemuse comporte un bourdon monodique soutenus par l'épaule, un porte-vent et un chalumeau mélodique.

 

Dais à joueurs de cornemuse et de flûte à bec, lancette A, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais à joueurs de cornemuse et de flûte à bec, lancette A, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Dais à joueurs de cornemuse et de flûte à bec,, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais à joueurs de cornemuse et de flûte à bec,, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais à joueurs de cornemuse et de flûte à bec,, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Dais à joueurs de cornemuse et de flûte à bec,, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

 

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VI. LE TYMPAN.

"armoiries entièrement refaites avec réemploi de qulques éléments de bordure"(Corpus Vitrearum)

  • En supériorité, les armes des Bouteville
  • en haut à gauche, parti de Bouteville / du Chastel
  • parti Bouteville / Quimerc'h
  • parti Bouteville-Coëtquenan
  • en bas à droite, Armes de Toulbodou pleines

 

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Tympan, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

 

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Tympan, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan, Baie 1, Verrière de la Transfiguration, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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COMPARAISON AVEC DES VITRAUX DU FINISTÈRE.

 Un atelier de peinture sur verre ?

En 1977, Roger Barrié soulignait les rapprochements possibles entre cette verrière de Sainte-Barbe, une verrière de la chapelle St-Exupère de Dinéault conservé au Musée Départemental de Quimper, et une varrière de l'église Saint-Hilaire de Clohars-Fouesnant. Il les attribuait à "un atelier de peinture sur verre vraisemblablement de Quimper, actif durant la seconde moitié du XVIe siècle.

Depuis, le nom de la famille Le Sodec a été associé à cet atelier quimpérois.  

La Transfiguration de Plogonnec a été attribué à Laurent Le Sodec en raison d'inscriptions relevés sur les panneaux. On les retrouve sur la Passion de Plogonnec. Olivier et Laurent Le Sodec ont "explicitement" (?) signés l'Arbre de Jessé de Notre-Dame de Kerfeunten à Quimper. Françoise Gatouillat et Michel Hérold leur attribuent "avec vraisemblance des vitraux conservés à Pont-Croix et à la chapelle des Trois -Fontaines en Gouezec, et même des œuvres très fragmentaires comme le Jugement Dernier rapportés dans l'église de Guengat. Dans les Cötes d'Armor, la maîtresse-vitre de belle qualité de Maël-Pestiven, avec ses fonds rouges unis et ses dais à ornements caractéristiques, manifeste d'évidentes affinités avec ce groupe quimpérois des années 1520 ; l'absence de corrélations entre ses cartons et ceux des autres séries de la Passion empêche cependant de l'attribuer fermement aux Le Sodec." 

Néanmoins, l'interprétation des inscriptions me semble souvent hasardeuse.

Les inter-relations se créent avec un vaste ensemble :

1. Celui des Vitraux de l'église St-Thurien de Plogonnec :

2. Celui d'autres verrières contemporaines du Finistère, avec lesquelles existent des rapports de similitude (mêmes cartons, notamment pour les Passions), de thème, d'histoire (même influence des familles nobles) de motifs stylistiques,ou de comparaison :

La présence d'inscriptions sur les galons des vêtements, sous forme de lettres sans ponctuation composant des antiennes à la Vierge, ou des séquences ininterprétables, est l'une des caractéristiques, non constante, de ces vitraux. Nous avons vu que ces inscriptions se retrouvent sur la Transfiguration de Sainte-Barbe du Faouët, et sur celle de Plogonnec, mais aussi sur la verrière de Sainte-Barbe du Faouët,  sur l''Arbre de Jessé de  Kerfeunten, sur l'Arbre de Jessé de Confort-Meilars.

 

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SOURCES ET LIENS.

— BARRIÉ (Roger), 1977, "Le vitrail de la Transfiguration de la chapelle Sainte-Barbe au Faouet" , Arts de l'Ouest, 1977-1, p. 38-50 et figure 13-14.

— BARRIÉ (Roger), 1977, "Un atelier de peinture sur verre en Cornouailles vers 1535" , Arts de l'Ouest, 1977-1, p. 17-37.

— DU LAZ, Marie-Thérèse-Armande-Frédérique de Saisy de Kerampuil (1831-1906 ; comtesse), 1892 La baronnie du Faouët / par la comtesse Du Laz, Impr. de Galles (Vannes), 57 p. : ill., couv. ill. ; 25 cm http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k379828z/f24.image

— MAILLARD, Olivier 1877. Œuvres Françaises d'Olivier Maillard--Sermons et Poésies--Publiés d'Après les Manuscrits et les Éditions Originales Avec Introduction, Notes et Notices. 1877 par Arthur de la Borderie

https://archive.org/stream/uvresfranaisesd01nantgoog#page/n165/mode/2up

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k110137d

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Published by jean-yves cordier - dans Le Faouët.
30 août 2015 7 30 /08 /août /2015 19:25

Les vitraux du XVIe siècle de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët (56) : I. Baie 6, Ascension et Pentecôte.

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Voir aussi :

Les vitraux du XVIe siècle de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët (56) : II. la Transfiguration. Baie 2. ca. 1512-1515.

Les vitraux du XVIe siècle de la chapelle Ste-Barbe du Faouët (56) : III. Le vitrail de sainte Barbe, en baie 1.

Les vitraux du XVIe siècle de la chapelle Sainte-Barbe du Faouët (56) : IV. Baie 3, le Martyr de sainte Barbe.

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Présentation.

La baie 6, placée sur le croisillon sud, est composée de quatre lancettes trilobées et d'un tympan à dix-sept soufflets et mouchettes, de 5,60 m de haut et 2,65 m. de large. Les lancettes se divisent en deux ensembles, les trois lancettes de gauche étant consacrées à l'Ascension, et la lancette de droite à la Pentecôte. La datation estimée est de 1512-1515 puisque des inscriptions indiquent que la voûte était achevée en 1512.

Plan :

I. L'Ascension

II. La Pentecôte.

III. Le tympan.

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Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

I. L'ASCENSION.

Les trois lancettes de gauche montrent le Christ s'élevant dans les nues sous le regard des 12 apôtres et de 3 femmes. La moitié supérieure est structurée par une architecture à trois niches, les deux niches latérales en plein cintres recevant des pilastres et des guirlandes, et la niche centrale étant à arc brisée et polylobée. Alors qu'une radiance de flêches de feu en lames alternativement droites et sinueuses vient converger sous la niche centrale, où quinze anges accueillent le Christ dont seuls la tunique et les pieds sont visibles, deux orchestres et chœurs angéliques accompagnent le mouvement d'ascension à droite et à gauche, sous les niches de plein cintre.

 

 

L'Ascension, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

L'Ascension, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

1°) Lancette A (extrême gauche).

Dans la partie inférieure sont réunis sept personnages (cinq hommes et deux femmes) tous nimbés, mains jointes et le regard dirigé vers la scène d'Ascension. Parmi ces personnages, on peut identifier avec certitude saint Jean (imberbe et en robe rouge). On peut en déduire, par similitude avec les Passions, que les deux femmes sont la Vierge Marie (manteau bleu formant voile, robe rouge) et Marie Madeleine (au turban caractéristique). Saint Pierre pourrait être placé derrière la Vierge (barbe ; calvitie partielle), mais je l'identifie plutôt dans la lancette C.

On remarque que les sept nimbes sont traités différement. Le verre rouge est gravé pour figurer l'arc du nimbe de Marie, et pour décorer de points blancs le nimbe de gauche (gravure circulaire, par meule). C'est par la même technique de verre rouge gravé que sont figurés les rayons éblouissants convergents vers les cieux.

 

L'Ascension, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

L'Ascension, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Saint Jean, la Vierge Marie et  sainte Marie-Madeleine, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Saint Jean, la Vierge Marie et sainte Marie-Madeleine, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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la Vierge Marie et  sainte Marie-Madeleine, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

la Vierge Marie et sainte Marie-Madeleine, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Dans la partie supérieure, huit anges célèbrent les louanges du Christ en adorant, en chantant, et en jouant de la flûte à bec.

Anges musiciens, lancette A, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Anges musiciens, lancette A, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Au sommet de la lancette, la niche abrite aussi dans l'architecture Renaissance cinq autres anges dont deux jouent d'un instrument à vent.

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Anges musiciens, niche de la  lancette A, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Anges musiciens, niche de la lancette A, L'Ascension (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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La Lancette B.

Sous les yeux de quatre personnages, le Christ rayonnant disparaît à mi-corps dans les nuées peuplées d'un chœur d'anges.

Lancette B, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Qui sont ces trois hommes et cette femme ? Le très beau saint aux cheveux d'or, imberbe, au manteau rouge et à la robe damassée et dorée correspond à saint Jean, ce qui me mets dans l'embarras puisque je viens de l'identifier en lancette A. De même, le personnage de gauche ressemble à saint Pierre, et est identifié comme tel par les auteurs du recensement du Corpus Vitrearum. Ils ajoutent que cette figure est la seule ancienne : mes difficultés proviennent sans-doute des restaurations qui ont brouillé la cohérence des visages des apôtres et des saintes.

Lancette B, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette B, (détail) in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, (détail) in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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La moitié supérieure : Ascension du Christ et couronnement d'architecture..

 

 

Lancette B, (détail) in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette B, (détail) in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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La lancette C.

Symétrique de la lancette A, elle présente dans sa moitié inférieure une partie de l'assemblée avec six apôtres et une sainte femme, et dans sa partie supérieure des anges priant et chantant. 

Lancette C, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Cinq nimbes sont en verre rouge gravé (trop parfaitement et mécaniquement). Saint Pierre est identifiable avec un bon niveau de certitude par son toupet en houpette sur fond de calvitie, mais ces deux panneaux inférieurs sont entièrement refaits par les restaurateurs. 

Lancette C, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Lancette C (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

.Même carton inversé que dans la lancette A, mais où le huitième ange ne laisse plus apparaître que sa chevelure paille, et où le restaurateur a remplacé un instrument par une  flûte de pan .

 

Lancette C (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette C (détail), in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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La niche semble tirée du même carton que celle de la lancette A. Les mêmes anges s'y livrent aux mêmes saintes occupations.

II. La Pentecôte : lancette D.

L'intérêt de la scène est de découvrir au dessus de l'assemblée des apôtres et de la Vierge une fontaine dont les eaux ruisselle sur les apôtres.

Lancette D, Baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette D, Baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Au premier plan, saint Pierre (j'y tiens !) est bien là, comme l'atteste sans ambages la grande clef qu'il tient. En face de lui, l'épée permet d'identifier saint Paul pourtant absent lors de la Pentecôte (pour ceux que cela dérange, l'épée est aussi l'attribut de Matthieu). Au total, dix-neuf personnages, presque tous barbus, entourent la Vierge. Le texte du Nouveau Testament qui relate la descente de langues de feu sur les apôtres est celui des Actes des apôtres 2:1-4 qui dit "Le jour de la Pentecôte, ils étaient tous réunis dans un même lieu", "ils" désignant les douze apôtres qui viennent d'être dénommés dans le chapître précédent. 

Le Corpus Vitrearum signale d'assez importantes restaurations : panneau supérieur ; 3 t^êtes d'apôtres placées à gauche de la Vierge.

Lancette D, Baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette D, Baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Alors que les langues de feu tombent de la coupole (le toit de la maison de Jérusalem "où ils se tenaient d'habitude" (Actes 1 :13), une fontaine verte semble prolonger le corps de la Vierge, et les jets d'eau (gravure du verre rouge) arrosent le visage de deux apôtres, dans la symbolique d'un nouveau baptème, peut-être selon Actes 1:5 "Car Jean a baptisé dans l'eau, mais vous, c'est dans le Saint-Esprit que vous serez baptisé dans peu de jours".

 

 Lancette D de la Pentecôte, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette D de la Pentecôte, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Le dais architecturé.

Angelots, guirlandes, colliers.

 

Lancette D, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Lancette D, in Vitrail de l'Ascension et de la Pentecôte, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

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Le tympan.

Dans les dix ajours latéraux, les anges porteurs des instruments de la Passion (anges tenant l'échelle et la Sainte Face restaurés)

Dans les écoinçons, fleurs de lys se rapportant à la Vierge, closes, mi-closes et épanouies (carton renversé).

Tympan, baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan, baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

.Les cinq ajours de l'axe :

Armoiries de Boutteville en prééminence

Parti de Boutteville et de Coëtquenan (anciennes)

Parti de Boutteville et Du Chastel 

Parti de Boutteville et de Kerimerc'h (en partie anciennes, mais jamais à droites)

Armoiries de Toulbodou (restauration ancienne : "émail" vert

 

 

 

Tympan (détail), baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Tympan (détail), baie 6, Chapelle Sainte-Barbe, Le Faouët, photographie lavieb-aile.

Restaurations entre 1882 et 1888 par l'atelier Hucher du Mans ; en 1912 ; en 1922 après un cambriolage ; en 1956 par Jean-Jacques Gruber. En 1961 par l'atelier de Hubert de Sainte-Marie. Expertise du développement de micro-organismes sur les deux faces en 1981 par le LRMH, et mise en œuvre de procédés de protection par doublage par thermoformage (H. Débitus à Tours).

Comme en témoigne cette photo (copyright LRMH-Bozellec) de 1981, l'altération des verres est considérable : http://www.lrmh.culture.fr/cgi-bin/qtp?typge=LREP&base=image&opimp=et&lang=fr&pp=1&dp=5&maxref=5&qmodu=EXT&tref=.R28+.R10&quest=[Sainte+Barbe,.R14]&cpres=0

 

LIENS ET SOURCES.

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ABGRALL (Jean-Marie), 1904, Notices, page 102

COUFFON (René), 1957, "Le Faouët, Chapelle Sainte-Barbe", Congrés Archéologique, p. 94-99.

— GATOUILLAT (Françoise) et HÉROLD (Michel), 2005, Les Vitraux de Bretagne, Inventaire général du patrimoine culturel, Corpus Vitrearum Recensement VII, Presses Universitaires de Rennes, page292.

— Inventaire topographique Le Faouët-Gourin, 1975, page 41-43

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  • : Le blog de jean-yves cordier
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  • "Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué).  "Les vraies richesses, plus elles sont  grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)
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