Erik Dietman (Jönköping,1937-Neuilly-sur-Seine, 2002) est, comme Marcel Duchamp, "un farceur" (Nelly Collin, pour l'exposition Entre lard et l'art) qui participerait du Nouveau Réalisme avec Tinguely, Klein, César, Arman, Spoerri, Robert Filliou ou Hains s'il ne préservait pas son indépendance entre poésie et réalisme.
Mais pour ce Voyage organisé sur l'Adriatique, il délaisse ses habituels pansements de sparadrap et de gaze et nous invite à une escale à Murano pour nous présenter, dans une méchante caisse en ferraille, sa collection de crânes de verre, aux couleurs raffinées et aux or précieux. Il déclare :
"Nous ne vivons plus dans un siècle d’édification. Nous avons haché menu l’idée de Dieu et tentons d’ignorer la mort. Il nous faut parfois buter physiquement contre un obstacle pour que son idée saugrenue nous revienne en mémoire. Oui, nous mourrons. Vous. Moi. Tous. Nous finirons dans une caisse. Ou une cage. Tous les divertissements que nous avons inventés ne nous sauveront jamais du terme qui est le nôtre. Jadis Pascal évoquait la chasse, les jeux de balle. Aujourd’hui nous avons les voyages, les croisières, en Adriatique pourquoi pas. On charge des retraités sur des paquebots comme on entasserait des marchandises dont on ne veut plus. Où donc aller les jeter ? Au large. Loin des yeux."
Chacun de ces crânes est un objet de luxe, mais le détournement de ces luxueux presse-papiers de collectionneurs fortunés dans une cage-ossuaire proche de la benne de déchetterie crée le "choc au noir propre à l'art macabre. Chaque crâne voit le caractère somptueux et inestimable de son individualité déniée par ce destin collectif de rebut, et d'incarcération.
Mais Murano n'était qu'une escale sur l'Adriatique, et les touristes se réjouissent de vivre "une odyssée à la découverte d'une mosaïque fascinante de cultures et de panoramas", pour relier les prestigieuses cités adriatiques, émaillant un rivage idyllique.
Ils sont fiers de participer à cette aventure de dévellopement économique, puisque "à l’horizon 2025, les professionnels du secteur tablent sur la construction de plusieurs centaines de paquebots, la plupart estimant que le marché de la croisière va doubler voire tripler avant 2030, pour atteindre les 117 milliards €, avec à la clé la création de plus de 900 000 emplois."
Certes, "les navires de croisières, toujours plus gigantesques et plus nombreux sur les divers mers et océans , hébergent en moyenne plus 3 000 passagers et membres d’équipage. Ils constituent de véritables cités flottantes dont la majeure partie des déchets, même si certains sont traités, est rejetée directement dans l’océan. Les croisières, au-delà de leur attractivité touristique et de l’image idyllique qu’en diffusent les tour-opérateurs, sont en réalité trop souvent synonymes de pollution du fond des mers, des ports et des régions côtières ; de dégradation de sources d’eau ; de destruction des habitats offerts par les herbiers et les récifs de corail (ancrage des navires et des petits bateaux) ; d’émissions de polluants atmosphériques dans l’air et dans l’eau ; de pression exercée sur les sites terrestres de rejets des déchets ; de production de quantités de déchets pouvant entraîner de graves risques sanitaires et des coûts de nettoyage. Ces navires peuvent produire jusqu’à 120 000 litres d’eaux usées par jour, et 28 000 litres d’eau huileuse de cale, tout en étant exempts du programme de contrôle de rejet des déchets issu de la principale loi de lutte contre la pollution de l’eau, le Clean Water Act américain (s’y ajoutent des émissions de cheminée et d’échappement équivalentes à 12 000 automobiles chaque jour). Chacun utilise l’équivalent de 33 camions-citernes d’eau de ballast, y compris plantes et animaux pouvant causer des maladies, prélevés d’endroits lointains et déchargés dans des ports et des baies à un autre bout du monde ». Même au mouillage, les navires de croisière ne s’arrêtent jamais." Jean-Marie Breton
Mais il n'y a pas de quoi grincer des mandibules et tintinabuler des fémurs ; et il faut bien danser sur le volcan avant que Mort nous fasse danser.
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"Voyage organisé sur l'Adriatique", Erik Dietman 1999. MBA Nancy. Photographie lavieb-aile 2024.
"Voyage organisé sur l'Adriatique", Erik Dietman 1999. MBA Nancy. Photographie lavieb-aile 2024.
"Voyage organisé sur l'Adriatique", Erik Dietman 1999. MBA Nancy. Photographie lavieb-aile 2024.
"Voyage organisé sur l'Adriatique", Erik Dietman 1999. MBA Nancy. Photographie lavieb-aile 2024.
"Voyage organisé sur l'Adriatique", Erik Dietman 1999. MBA Nancy. Photographie lavieb-aile 2024.
Le chantier de la chapelle Saint-Fiacre est à rapprocher de celui de la chapelle de Kernascleden, portant au transept les armes de Jean V et de son épouse Jeanne de France (décédée en 1433), chantier peut-être débuté en 1420, mais terminé en 1453 (dédicace). La forme du clocher de Saint-Fiacre, le porche sud ainsi que la sculpture témoignent de l'activité d'un même atelier avec Kernascléden.
Kernascléden avait été précédé par un autre chantier bénéficiant du mécénat ducal de Jean V, celui de Notre-Dame de Quimperlé (v. 1425-1435).
À la fin du XVe siècle sera élevée la chapelle Saint-Herbot, relevant du même mécénat ducal, cette fois de François II et Anne de Bretagne).
Dans ces quatre cas, les armoiries et emblèmes ducales sont sculptées sur les façades, comme déjà à la collégiale du Folgoët (consacrée en 1423), à Runan (vers 1437) et sur les porches de la cathédrale de Quimper (1424-1433), associées à celles des grands seigneurs et prélats bretons.
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2. La construction.
Précédée par un hôpital fondé en 1436 par le seigneur de Boutteville (une pierre porte l'inscription : L'AN 1436 FUT FAIT CEST OSPITAL PAR C (BOUTE) VILE ), la chapelle Saint-Fiacre débuta au milieu du XVe siècle, mais l'érosion trop prononcée de l'inscription de fondation de la façade ouest ne nous permet pas de connaître la date exacte de celle-ci. Un mandement de Jean V, signé et daté du Faouët en 1442, ne faisant aucune allusion au chantier de la chapelle, laisse penser que cette date en est postérieure.
Le pignon du chevet porte un complexe héraldique, présentée ici, où se reconnaissent les emblèmes des ducs de Bretagne, mais ceux-ci ne permettent cependant pas de les attribuer avec certitude à Jean V (duc de 1399 à 1442) ou à l´un de ses successeurs, François Ier (1442-1450), Pierre II (1450-1457), Arthur III ou François II (1458-1488), les armes sculptées au chevet de Saint-Fiacre. Quoi qu´il en soit, la date certaine de 1480 portée par le jubé avec la signature de son auteur, Olivier Le Loergan, donne le terminus ad quem du chantier.
Les armes des Boutteville figurent sur un panneau héraldique de la face est de leur oratoire seigneurial, mitoyen au panneau ducal du chevet, et, plus modestement, sur le côté sud du chevet . Jean de Boutteville (1385-1463), fils de Bizien et époux d'Isabeau de Penhoët était seigneur du Faouët jusqu'en 1463, suivi par Jean de Boutteville (1405-) époux d'Alix de Coëtquénan puis par Jean de Boutteville baron du Faouët et Marie de Kerimerc'h qui fondèrent en 1489 la chapelle Sainte-Barbe. Leur fils Louis et son épouse Jeanne du Chastel placèrent leurs armes vers 1512 sur la tribune et les vitraux de la chapelle Sainte-Barbe et sur les sablières et les vitraux de Saint-Fiacre.
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L´iconographie des sauvages, apparemment peu utilisée par les ducs bretons, figure toutefois sur un sceau de Jean IV entre 1370 et 1378, et la représentation de la bannière de Bretagne surmontant les armes ducales se retrouve sur les Portes Mordelaises à Rennes, reconstruites au XVe siècle en même temps que l´enceinte de la ville. Ces références ne permettent cependant pas d´attribuer avec certitude à Jean V ou à l´un de ses successeurs, François Ier, Pierre II, Arthur III ou François II, les armes sculptées au chevet de Saint-Fiacre. Quoi qu´il en soit, la date certaine de 1480 portée par le jubé avec la signature de son auteur, Olivier Le Loergan, donne le terminus ad quem du chantier. La verrière est du bras sud a conservé les deux tiers de ses panneaux, dont le style de la fin du XVe siècle semble confirmer l´achèvement du chantier à cette date. Sans préjuger de la réalisation complète ou non du programme décoratif de l´édifice à l´époque gothique, la totalité du reste des verrières date du milieu du XVIe siècle et le réseau de la moitié des fenêtres a été entièrement refait à la même époque.
L´édifice semble n´avoir fait l´objet d´aucune campagne de travaux entre le XVIe et le XIXe siècle : les archives totalement inexistantes jusqu´à cette époque ne renseignent guère. Durant la seconde moitié du XIXe siècle, plusieurs séries de travaux d´assainissement tentent de remédier au problème récurrent de l´humidité de la chapelle qui nuit à la conservation du jubé. Ce dernier fait l´objet entre 1862 et 1866 d´une restauration peu convaincante qui remplace des panneaux disparus par des pastiches sans grâce, puis d´une nouvelle intervention en 1951 qui supprime les apports inesthétiques du XIXe siècle et enfin d´une dernière et récente restauration, exigée par un taux d´humidité alarmant, qui a tenté de retrouver l´esprit de la polychromie originelle.
Motifs héraldiques H en rouges. Consoles figurées * en vert.
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I. MOTIFS HÉRALDIQUES H1 (EFFACÉS) ET INSCRIPTIONS DE LA FAÇADE OUEST.
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Au dessus du portail de la façade ouest, se trouvent une niche à dais (vide) placée au dessus du fleuron, et trois fausses baies ogivales soulignées d'une accolade à choux frisés, qui devaient accueillir des emblèmes et blasons, et, pour celle de droite du moins, un cartouche à inscription gothique.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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Cartouche de gauche.
Le cartouche est vide, mais une banderole en position basse indique une inscription effacée. L'accolade s'appuie sur des masques.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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Cartouche de droite de la façade occidentale. Armoiries buchées et inscription non déchiffrée.
L'accolade vient reposer, à droite, sur un masque bifrons, et , à gauche, sur un blason muet.
On lit à la fin de l'inscription : LAN sans avoir accès au chronogramme.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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II. H2. LE PANNEAU HÉRALDIQUE DE LA SACRISTIE. Face Est, fenêtre du premier étage.
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Decrivons d'abord cette sacristie :
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" Le pignon de la sacristie élargit le chevet. La sacristie n'a pas de contrefort. Cependant l'arête de son angle nord-est est chargée d'une niche à dais que couronne un pinacle" (Wikipedia)
La sacristie actuelle est l'ancien oratoire seigneurial des Boutteville, communiquant avec le chœur par un hagioscope. Il s'agit en fait de deux oratoires seigneuriaux superposés. Description :
"Dans le mur nord du choeur, une porte ouvre sur une petite pièce dont la fonction récente de sacristie n´est certainement pas d´origine : cet espace comporte un petit autel, une crédence ainsi qu´une fenêtre basse que son appui presque au ras du sol signale comme un guichet destiné à recevoir la communion agenouillé, dispositions qui permettent d'y reconnaître un oratoire seigneurial. L´escalier qui mène à la pièce de l´étage est moderne et il est difficile de savoir l´emplacement et la forme de celui d´origine, si toutefois il en existait un. À l´étage, une fenêtre à coussièges* ouverte dans le pignon est, une cheminée dans le mur gouttereau nord et enfin, dans le mur surplombant le chœur, une baie actuellement murée qui formait hagioscope*, portant encore sur son linteau les armes des Boutteville, indiquent un autre oratoire seigneurial. Des photographies prises lors de l´enquête de l´Inventaire en 1966 montrent, entre l´oratoire de l´étage et la vis d´escalier, contre le mur nord du chœur, une coursière extérieure en dalles de granite sur corbeaux moulurés. Cette disposition, qui avait sans doute été assez fortement restaurée lors du remontage du mur ouest de la sacristie en 1911, présentait toutefois le grand intérêt de conserver la distribution ancienne de l´étage de l´oratoire. La présence d´un système de coursière semblable sur la façade principale du logis du château du Saint, résidence habituelle de la famille de Boutteville, aujourd´hui détruite, confirmerait l´authenticité du dispositif disparu de Saint-Fiacre."
"Entre 1911 et 1919, le mur ouest de la sacristie menaçant ruine a été refait entre 1911 et 1919. Le mur ouest de la sacristie est alors percé d'une porte au rez-de-chaussée permettant un accès direct depuis l'extérieur. Au-dessus, une autre porte est créée associée à deux fenêtres à meneaux. Cette porte ouvrant alors sur une autre création ; une coursière portée par des consoles de pierre reliant l'étage de la sacristie à l'escalier en vis du bras nord. Cette disposition a été supprimée lors des travaux de restauration des années 1970."
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Plan de la sacristie.
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Vue de l'escalier et de la tribune depuis le chœur. Photo lavieb-aile.
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Fenêtre murée du mur nord du chœur surmontée des armes des Boutteville : les tenants sont des lions (ou mieux des éopards lionnés) rampants.
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Chœur côté nord, Photo lavieb-aile 2023.
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Vue générale de la sacristie, façade est.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le panneau héraldique.
Sur la façade est, au dessus de fenêtres, un ensemble héraldique rectangulaire est coiffé d'une accolade gothique. Les deux tenants sont des hommes sauvages, barbus, aux cheveux longs, aux jambes et pieds nus. Le caractère sauvage est rendu par les lignes sinueuses du vêtement, pourtant à pans croisés tenus par un bouton.
Les hommes sauvages soutiennent un écu en bannière, aux meubles buchés.
À Runan, un écu, également buché, est présenté par deux hommes sauvages (H9 de mon article). De même à l'église de Champeaux sur des boiseries du XVIe siècle.
En l'abbaye de Daoulas, un homme sauvage présente l'écu de Léon dans la charpente de l'église.
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Bizarrement, ce panneau a été peu décrit. Dans la notice de 1965, il est écrit "sous une accolade flamboyante, un couple désormais mutilé soutient un blason martelé." Pourquoi parle-t-on ici d'"un couple", et, au dessus de la maîtresse-vitre, de "sauvages", alors que c'est l'inverse que l'on observe? Et pour quoi J.J. Rioult ne décrit-il pas cette pierre, et qualifie-t-il le couple du complexe ducal de "sauvages"?
Lefèvre-Pontalis se contente d'écrire : "Un autre écu s'y trouve ".
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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Sur ce cliché, il est possible de deviner la pointe des cinq fuseaux des Boutteville.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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Détail d'un sauvage.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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III. PANNEAU HÉRALDIQUE DU CHEVET. Sommet de la maîtresse-vitre. Armes ducales H3 dont les tenants sont un couple nu, avec un cimier au lion. Lions portant la bannière ducale.
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"Au-dessus de la maîtresse-vitre, l´axe du pignon est marqué par l´importante composition des armes ducales qui occupe toute la hauteur depuis la pointe de la baie jusqu´au sommet du pignon et dont la qualité est encore perceptible, malgré les méfaits de l´érosion. Le fort relief de l´ensemble, les attitudes gracieuses du couple de sauvages qui tiennent l´écu, le lion du cimier traité de trois quarts et la bannière ducale légèrement penchée et flottant au vent confèrent à cette grande composition héraldique une dimension plastique qui affirme de façon brillante un message hautement politique."
"Les armes sculptées sur le pignon du chevet, parfois attribuées à tort aux Boutteville, et que Léon de Groër a justement restituées au duc, reprennent tous les éléments héraldiques dont usait celui-ci mais y ajoutent au-dessus de l´écu, sous le heaume, une hermine passante au naturel, et de chaque côté un couple de sauvages servant de tenants, et enfin au sommet du heaume deux lions tenant la bannière au champ d'hermine de Bretagne.
L´iconographie des sauvages, apparemment peu utilisée par les ducs bretons, figure toutefois sur un sceau de Jean IV entre 1370 et 1378, et la représentation de la bannière de Bretagne surmontant les armes ducales se retrouve sur les Portes Mordelaises à Rennes, reconstruites au XVe siècle en même temps que l´enceinte de la ville. Ces références ne permettent cependant pas d´attribuer avec certitude à Jean V ou à l´un de ses successeurs, François Ier, Pierre II, Arthur III ou François II, les armes sculptées au chevet de Saint-Fiacre. " (J.J. Rioult)
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le panneau : le couple tenant le blason.
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Les deux personnages sont figurés de profil en partie basse, puis de trois-quart et enfin de face pour leur visage. L'homme n'est pas velu, mais porte une barbe carrée. La femme n'est pas velue, ses cheveux sont longs.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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J.-J. Rioult qualifie les tenants de "sauvages" alors que je les décrirais plutôt comme un couple "au naturel", nus.
Le sceau de Jean IV entre 1370 et 1378 montre de veritables "sauvages", barbu et velus, qui ressemblent assez bien à ceux du panneau de la sacristie.
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Sceau de Jean IV entre 1370 et 1378, base Sigilla.
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L'homme semble écarter le lambrequin qui prend son origine d'un cordon coiffant le casque.
Ils tiennent un blason incliné pointe à droite, orné en moyen-relief d'une hermine au naturel, passante, colletée d'une cape . Là encore, nous pouvons comparer avec les deux sceaux secrets de Jean V . L'écu est incliné pointe à droite, il est frappé d'hermines (au lieu de porter une hermine au naturel) et le cimier porte, dans les deux cas, un lion.
a) L'hermine passante.
L'hermine passante est présente également sur les autres chantiers du duc Jean V :
— Sur la façade et en frise, ou dans le porche des Apôtres à la Collégiale du Folgoët, où elle traverse les spires d'une banderole portant la devise A MA VIE :
— Sur les sablières de l'église haute de Quimperlé avec la date de 1430: hermine passante colletée de la jarretière dans une frise où est inscrit la devise A MA VIE.
Mais nous n'avons pas d'exemple d'écu avec l'hermine au naturel.
Par contre, nous ne trouvons pas ici l'emblème de François II, repris par sa fille, la cordelière franciscaine présente sur le jubé de Saint-Fiacre.
Les cornes bovines du casque sont bien visibles sur ces sceaux, ce qui est moins le cas sur le panneau de Saint-Fiacre où elles se confondent un peu avec les pattes des lions.
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Sceau du secret de Jean V, 1409. Base Sigilla.
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Sceau du secret de Jean V 1420-1425, base Sigilla.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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c. La tête de lion du cimier et les deux lions tenant la hampe de la bannière.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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c. La bannière frappée d'hermines.
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Ses bords sont frangés. On compte neuf hermines.
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Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les panneaux héraldiques (2ème moitié XVe) de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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III. LE BLASON DES BOUTTEVILLE H4, CONSOLE DE LA NICHE DU CONTREFORT MÉDIAN DU CÔTÉ SUD DU CHEVET.
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On retrouve aussi ces armoiries, d'argent à cinq fusées de gueules posées en fasce, dans le chœur au dessus de la baie murée du côté nord, formant hagioscope, comme montré supra. Ici, la partie basse de l'écu, et des cinq fusées, ont été brisées.
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Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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. IV. CONSOLE AVEC UN BLASON MUET PLACÉ SUR UN DRAGON.
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Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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V. QUELQUES CONSOLES DES NICHES À DAIS.
"L´élévation sud présente une alternance d´avancées et de retraits de proportions variées qui, comme autant de temps forts et de temps faibles, rythment la composition, et frappe par son unité de style que renforce l´emploi de contreforts ornés de niches à dais et dont le sommet en glacis à quatre pans, forme moderne massivement employée sur le chantier de Kernascléden, sert de socle à des pinacles aigus posés à 45°. Quelques légères différences entre le choeur et le bras sud suggèrent une évolution. Tandis que les consoles des contreforts du choeur sont ornées de feuilles refouillées, celles du bras sud sont sculptées de personnages grotesques jouant avec des chiens, mais surtout la petite porte qui donne accès directement dans le choeur présente encore de grêles colonnettes à peine perceptibles comportant bases prismatiques en flacon et minuscules chapiteaux, modèle sans doute repris des transepts de Quimperlé, alors que celle qui est murée dans le mur ouest du bras sud, dont l´arc externe anguleux vient se fondre dans les piédroits sans chapiteau et les pinacles latéraux atteignent la hauteur du fleuron sommital, témoigne d´une évolution stylistique indéniable semblable à celle constatée sur le porche sud. Enfin, au-dessus de la petite porte du choeur, la superposition d´une niche à dais et d´une rose, percée pour l´élégance du motif, distinguent l'accès réservé au clergé et au seigneur supérieur. " (J.J. Rioult)
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1.Façade sud, pignon du croisillon, détail du contrefort sud, angle sud-ouest, console de la niche. Homme (ou femme) tenant devant lui la patte antérieure de deux animaux (chiens? lièvres ?).
Le personnage au visage lunaire, au nez épaté et au sourire béat est coiffé d'un très large chapeau et porte une collerette crénelée ; ses genoux sont serrés mais jambes sont écartées. Cela pourrait être un fou. Il tient réuni devant lui l'une des pattes antérieures de deux animaux, probablement des chiens, comme pour qu'ils se saluent. Le museau de l'animal de gauche est brisé. Les pattes postérieures sont larges, sans griffes, et diffèrent des pattes de chiens.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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2. Niche du contrefort sud du bras du transept sud. Homme ou femme tenant dans sa bouche la queue d'un animal fantastique (dragon?).
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Il s'agit plutôt d'une femme, à visage lunaire comme sur la console précédente, et nue (ou revêtue de chausses très ajustées mais marquant le milieu du pied droit), coiffée d'une sorte de chaperon à extrémité trifide. Dans un geste équivoque, elle place dans sa bouche la queue d'un dragon dépourvue de pattes postérieures.
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Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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3.Niche du contrefort sud-ouest du porche sud.
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Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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4. Niche du contrefort nord-ouest du bras du transept nord (perpendiculaire au mur nord). Visage de femme portant la coiffe.
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Là encore, le visage de la femme est très rond, ses yeux sont globuleux à grosses paupières, les commisures labiales sont accentuées. Elle porte une coiffe associant un bourrelet et un linge tuyauté, faisant retour sous la gorge.
Ce visage évoque celui d'une console intérieure de la chapelle.
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Elle évoque aussi les visages féminins caricaturés des sablières :
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Photo lavieb-aile 2023
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Photo lavieb-aile 2023
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Photo lavieb-aile 2023
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Photo lavieb-aile 2023
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Photo lavieb-aile 2023
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Photo lavieb-aile 2023.
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Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
Les consoles (2ème moitié XVe) des niches de la chapelle Saint-Fiacre du Faouët. Photographie lavieb-aile 2023.
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SOURCES ET LIENS.
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— BONNET, Philippe, RIOULT, Jean-Jacques. 2008, l'architecture gothique en Bretagne.
— GROER (Léon de). L'architecture gothique des XVe et XVIe s. dans les anciens diocèses de Quimper et de Vannes. Etude de quelques ateliers. Thèse Ecole des Chartes, 1943. Doc dactylographié inédit, non consulté.
—LEFEVRE-PONTALIS (Eugène), 1914. Le Faouët, chapelle de Saint-Fiacre, dans Congrès archéologique de France, LXXXIe session tenue à Brest et à Vannes en 1914 par la Société française d´Archéologie, Paris, 1919, p. 348-355.
Le piédestal de la croix cénotaphe (calcaire, milieu XVIe siècle chapelle des Cordeliers de Nancy, coll. Musée lorrain) de la duchesse de Lorraine Philippe de Gueldre (1464-1547).
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PRÉSENTATION.
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Mon but initial était de partager ma découverte, en la chapelle des Cordeliers de Nancy, de ce piédestal aux figures et aux inscriptions macabres. Mais ma consultation de la notice du musée lorrain dédiée à ce monument m'a vite convaincu de l'inutilité de cette démarche, tant cette notice était complète et accompagnée d'un riche dossier photographique.
Ayant saboté par cette introduction mon article, mais sans renoncer à le rédiger, il me reste à tâcher d'aller un peu au delà de cette notice de Pierre-Hippolyte Pénet. Ce que je ferais en deuxième partie dans une réflexion sur les liens entre Philippe de Gueldre l'art macabre .
J'ai d'abord naïvement cru que Philippe (ou Phelippe) de Gueldre était un personnage masculin, avant de découvrir qu'il s'agissait de l'épouse du duc René II de Lorraine, dont le monumental et luxueux monument funéraire occupe, sur 7 mètres de haut, le centre du côté sud de la chapelle des Cordeliers. René II est le vainqueur en 1477 de la Bataille de Nancy , dans laquelle Charles le Téméraire trouva une mort sordide (on retrouva son corps nu dans un étang gelé).
Dame Philippe épousa René II le 1er septembre 1485 à Orléans. Née en 1464, elle était la fille d'Adolphe, duc de Gueldre, et de Catherine de Bourbon, elle-même fille de Charles Ier duc de Bourbon, et sœur de Jean II duc de Bourbon jusqu'en 1488, du cardinal Charles II duc de Bourbon en 1488, d'Isabelle, épouse de Charles le Téméraire et grand-mère de Charles Quint et de Pierre II qui épousa Anne de Beaujeu régente de France. J'ai présenté la nécropole des Bourbon ici :
Orpheline dès 1469, elle fut éduquée à la cour du duc de Bourgogne, sous l’autorité de Marguerite d’York jusqu’en 1483, puis à la cour du roi de France, sous celle d’Anne de France, dame de Beaujeu, jusqu’en 1485. Cette dernière la donne alors en mariage au duc de Lorraine, René II. Douze enfants naîtront de cette union, dont cinq fils survivront.
Devenue veuve en 1508, Philippe de Gueldre refusa la régence instituée en sa faveur par le testament de son mari, laissant le pouvoir aux mains du prince Antoine, l'aîné de ses fils. Retirée durant quelques années au château de Bar, qui lui avait été assigné en douaire, elle entra, vers la fin de 1519, au monastère des Clarisses de la ville de Pont-à-Mousson (*). Sa prise d'habit eut lieu le jeudi 8 décembre de la même année et sa profession solennelle l'année suivante, le jour de la fête de la Conception, 8 décembre 1520. Elle mourut vingt-sept années plus tard, le 26 février 1547, à l'âge de quatre-vingt-sept ans.
(*) Ce monastère fut fondé par sainte Colette, cédant aux sollicitations du duc Charles II de Lorraine et de sa femme Marguerite de Bavière. Les travaux, commencés en 1431, furent terminés en 1447, sous le règne du duc René Ier. Les religieuses, au nombre de treize, prirent possession des bâtiments le 21 septembre de cette même année.
"Cependant, Philippe dispose d’un statut particulier au sein de la communauté. Elle possède une pièce à part et ne dort pas dans le dortoir commun. Elle est rapidement dispensée des rigueurs de la règle, en raison de son état de santé. Lorsqu’elle est malade elle bénéficie d’un traitement particulier, recommandé par ses médecins. Philippe peut donc s’affranchir des normes de vie du cloître. Elle n’oublie d’ailleurs pas la politique terrestre.
Aidée d’une sœur secrétaire, elle maintient une active correspondance avec les princes et l’aristocratie. À Pont-à-Mousson elle demeure une princesse. Le receveur de la ville a ordre de subvenir à ses demandes. Elle interpelle également les autorités locales, comme en 1529, où elle ordonne au maître-échevin de distribuer des aumônes aux pestiférés, jetés hors de la ville.
Philippe dote son couvent de multiples œuvres, dont un magnifique retable (*) encore visible à l’église Saint-Laurent de Pont-à-Mousson." (Est-Républicain)
(*)Retable d'Anvers à six compartiments sculptés et dorés et quatre volets peints.
Elle décède le 26 février 1547 d'une péritonite par perforation vésiculaire. Dans son testament rédigés dès le 23 octobre 1520, elle avait déjà spécifié : "& voulons notre corps viande aux vers soit enterré au cimetière dudict couvent ". Elle aurait obtenu, de son vivant, de faire élever au milieu du cimetière des religieuses, situé dans le cloître, un grand crucifix taillé en pierre afin d’indiquer l’emplacement de sa sépulture. Le crucifix a disparu, et le piédestal fut retrouvé en 1890 au cimetière de Vilcey-sur-Trey.
Piédestal de la croix cénotaphe de Philippe de Gueldre, 1ère moitié du XVIe siècle, Calcaire, H. 116 ; L. 60 ; Pr. 57 cm, Musée lorrain de Nancy Inv. 2121.1 Achat auprès de la commune de Vilcey-sur-Trey, 1895
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DESCRIPTION.
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Photo Musée lorrain de Nancy
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Le piédestal débute par un soubassement carré sans sculpture, auquel succéde un étage à deux inscriptions de cinq lignes en ecriture gothique, puis un étage plus étroit dont deux faces opposées montrent un cadavre ou un crâne, et les deux autres une invocation pieuse. Au sommet, la base du crucifix détruit.
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La face qui attire immédiatement le regard est ornée d’un petit squelette assis sur un rocher, dans la figure du penseur mélancolique, vu de trois-quart, la tête posée sur la main en signe de douleur et d’abattement. Mais en contraste avec le squelette décharné, les intestins sont représentés par des boyaux en spirale.
Ainsi la duchesse décédée, jadis enterrée en pleine terre du cloitre sous le monument, invitait-elle ses sœurs clarisses à une méditation sur la mort.
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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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Sur la face opposée, un crâne est sculpté en moyen-relief dans un médaillon suspendu par un ruban. Le sculpteur compose ainsi un "miroir de la Mort". C'est, en littérature macabre, le titre de l'ouvrage Le miroir de mort , "ung excellent et tres prouffitable livre pour toute creature humaine" publié dès 1470 puis en 1481-1482 par George Chastelain historiographe des ducs de Bourgogne. L'inplicit et l'explicit du manuscrit Carpentras BM 0410 reprennent les mêmes vers :
...le miroir de la mort
a glace obscure et tenebreuse
la ou on voit chose doubteuse
et matiere de desconfort.
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Le texte reprend vite la métaphore :
Pour au miroer de mort mirer
Penser y fault en remirant
Et sy nous fault tous amirer
De ceulx que nous voyons mirer
Pour la mort qui nous va minant
Rien n'y vault don non mie nant
...
Comme ou mirouer si est la glace
La ou on voit sa remembrance
On y choisist et corps et face
Mais de legier elle s'efface
Car elle n'a point de souffrance
Elle ne peut avoir grevance
Que de legier ne soit cassee
Nostre vie est plus toust passee
Mirons nous dont et remirons
Et il se conclut par une série d'anaphores dont la dernière est :
Mirons nous au grand jugement
Mirons nous en la passion
Mirons enfer en dampnement
Mirons la mort et son tourment
Mirons nostre inclinacion
Mirons le monde et sa façon
Mirons nostre fragilité
Mirons nous pour estre saulvés
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En Bretagne, Jehan An Archer Coz compose en 1519 le Mirouer de la mort, en breton, imprimé à Morlaix en 1575. Sa couverture est illustrée d'un miroir de la mort avec cette injonction : MIRE TOY LA.
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Couverture du Mirouer de la mort BnF RES P-YN-1.
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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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Sur la paroi latérale, on peut lire dans un petit cartouche suspendu à un anneau par des rubans l'inscription en lettres romaines « JESU.MA/IOSEPH » (Jésus, Marie, Joseph).
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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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Sur la paroi latérale opposée, on peut lire dans un cartouche identique l'invocation « AVE.MAA/MERE.D. » (Ave Maria, Mère de Dieu).
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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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Sous les deux motifs à squelette, deux inscriptions sculptées en lettres gothiques auraient été rédigées par la duchesse elle-même. Le coin droit de chaque inscription est abimée, d'où des lettres et mots absents:
Sous le squelette méditatif :
« Cy gist . Ung . Ver . Tourn . en .porriture . re[n]dant . Amort . le tribut . De . nature. Seur. phelip de. Gueldres .fust .roine du passe. terre . lost pour toute. conieture. Cest . La . Mal. De . to[u]te. creature. Seurs. Dictes. lui Req. Pa »
Cy gist ung ver tourn en porriture
rendant à mort le tribut de nature
seur phelip de gueldres fust roine du passé
terre lost soulat pour toute couverture
cest la ma[…] de toute creature
Seurs dites lui requiecat in pace
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L'insistance sur les vers qui décomposent le cadavre et le transforme en pourriture et en poussière est caractéristique de l'art macabre. On trouve souvent au XVIe siècle en sculpture des "têtes de mort" où des vers sortent par les orbites.
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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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Sous la face sculptée d'un crâne
on lit la supplique suivante, dont la dernière ligne est presque détruite:
« O REDEMPTUR.BEOIST.CRUFIE.E.Q.MO
CUEUR.IAMAIS.NADEFFIE.MAIS.ESPER
A.TA.CROIS.JE.MACORDE.COME.A.CELLE.Q
A.VIVIFIE.LE.GENRE.HUMAIN.DU.JOUR »
O redempteur benoiste crucifie
que mon cueur jamais na deffie
mais espere à la croix je maccorde
comme a celle qui a vivifie
le genre humain du jour [moult rude
mon ame priant à ta misericorde]
soit
« Ô Rédempteur benoît crucifié à qui mon cœur jamais n’a défié mais espéré, à ta croix je m’accorde comme à celle qui a vivifié le genre humain du jour horrifié. Mon âme prie en ta miséricorde ».
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Cénotaphe de Philippe de Gueldre, v.1547, calcaire, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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Pierre-Hippolyte Pénet conclue sa notice ainsi :
"Cette iconographie et ces inscriptions sont une transcription du motif du transi funéraire, apparu au XIVe siècle, qui décrit le défunt en état de décomposition. Elles ne sont pas sans évoquer les reliefs très proches appelés « miroirs de la mort » de l’église Notre-Dame de Bar-le-Duc ou du monument funéraire de Claude de la Vallée à l’église Saint-Didier de Clermont-en-Argonne qui sont tous deux accompagnés de l’inscription : « Mirez-vous et considérez comme je suis telz vous serez ». Le monument de Clermont-en-Argonne, représentant le squelette du défunt allongé, complète par une inscription proche de celle de Philippe de Gueldre : « Considérez ma hideuse figure / Quelque belle que vous ayez la face / Sy fauldra-t-il que telle la vous face / Quant consumez servez en pourriture ».
Loin du faste inhérent à son statut princier, le monument de la duchesse témoigne ainsi de son mépris du corps et de sa foi dans le Christ souffrant pour lequel elle avait développé une dévotion particulière."
a) La pierre de l'église Notre-Dame de Bar-le-Duc
Dans un médaillon bordé d’une inscription un crâne tenant un tibia entre les dents est représenté de trois-quarts ; les angles de la pierre sont ornés de crânes et la partie inférieure est gravée d’une citation. Le cadre circulaire comporte cette phrase : « Mirez-vous et considérez, comme je suis tels vous serez » ; l’ordre indique clairement aux vivants de se regarder comme dans un miroir pour connaître leur devenir. Le bandeau inférieur indique : « Naistre, labourer et mourir, L’on ne fait qu’à la mort [courrir] ».
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Bas-relief, XVIe siècle, bas-côté nord, chapelle Saint-Louis de Gonzague de l'église de Bar-le-Duc
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b) Lemonument funéraire de Claude de la Vallée, dans l'église Saint-Didier de Clermont-en-Argonne, est daté de 1548. Le squelette gisant est surmonté des 3 trois allégories: la justice divine, le miroir de la mort, très semblable au précédent avec les mêmes inscriptions.
Le miroir porte les sentences :
Miroir ou l'homme au naturel,
Se doit recongnoistre mortel.
Mirez vous et considerez
comme je suis tels vous serez.
Naistre labourer et mourir,
Lon ne fait qua la mort courrir
Au-dessous de ces trois premiers bas-reliefs, une niche rectangulaire présente un transi presque à l’état de squelette ; en haut un cartouche explique : « Tu feras ce que vouldras avoir fait au jour que moras » ; près de la tête « Memento mori » et près des pieds « Memento finis ».
Le caractère macabre des termes du testament de Philippe de Gueldre, et de l'inscription qui figure sur ce pièdestal, amène plusieurs réflexions complémentaires :
1. Philippe de Gueldre a fait rédiger en 1506 par Guillaume le Ménant une traduction de la Grande Vie de Jésus-Christ de Ludolphe le Chartreux, qui a été illustrée de 111 enluminures par un artiste nommé par convention, et pour cet ouvrage (Lyon B.M 5125), le Maître de Philippe de Guelde, actif à Paris et peut-être à Rouen entre 1495 et 1510.
René de Lorraine et Philippe de Gueldre devant leurs enfants, Vie de Jésus Christ enluminé par le Maître de Philippe de Gueldre.
Le Maître de Philippe de Gueldre fournit des illustrations pour les imprimés de luxe d'Antoine Vérard, et, outre la famille de Lorraine, il travailla pour Louise de Savoie et Georges d'Amboise (le cardinal d'Amboise). Or, cet artiste est selon F. Avril, dans un style inspiré de Bourdichon, l'enlumineur du manuscrit BnF français 995 (vers 1500-1510 ?) associant la Danse macabre (dérivant de la D.M de Guyot Marchant 1486), le Dit des trois vifs et des trois morts et la Danse macabre des femmes.
Or, cette dernière Danse débute par la déclaration de l'acteur : "Mirez vous icy mirez femmes Et mettes vostre affection A penser a voz poures ames Qui desirent saluacion ...."
Puis, parmi les femmes entrainées par les morts, viennent en premier la reine (Phelippe de Gueldre est reine de Jérusalem et de Sicile), et la duchesse, mais ensuite la veuve dont voici le dialogue avec la morte (notez les cheveux de son cadavre).
La morte : "Femme vefue venez auant Et vous auancez de venir. Vous voyez les autres dauant Il conuient vne foys finir Cest belle chose de tenir lestat ou on est appellee Et soy tousiours bien maintenir Vertus est tout par tout louee."
La veuve : "Depuis que mon mary mourut Jay eu affaire grandement Sans ce que aucun me secourut Si non de dieu gard seulement Jay des enfans bien largement Qui sont ieunes et non pourueux Dont iay pitie: mais nullement Dieu ne lesse aucuns despourueux."
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Danse macabre des femmes, La veuve, BnF fr 995 f 29v enluminure Maître de Philippe de Gielde.
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Mais la réponse de la damoiselle est plus en rapport avec l'épitaphe de Philippe de Gueldre :
"Que me vallent mes grans atours Mes habitz. ieunesse. beautequant tout me fault lesser en plours Oultre mon gre et voulente Mon corps sera tantost porte Aux vers et a la pourriture: Plus nen sera bale: ne chanteIoye mondaine bien peu dure "
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2. Le Maître de Philippe de Gueldre a enluminé égalementle mirouer des pécheurs et des pécheresses de Jean Castel édité par Antoine Vérard en 1505-1507. On y trouve les enluminures suivantes, suffisament éloquentes :
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Le mirouer des pécheurs et pécherresses , par Jean de Castel BnF RES livres rares Velins-2229 vue 14. Source Gallica.bnf.fr/BnF
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BnF, RES livres rares Velins-2229 vue 73. Source Gallica.bnf.fr/BnF
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3. Malgré un monument funéraire de plus grande envergure fut édifié après sa mort, vers 1547-1548, au sein de la chapelle de la Conception qu’elle avait fait construire dans l’église conventuelle. Commandé par les descendants de Philippe de Gueldre (dont le duc Antoine le Bon) ou par les clarisses, ce monument, installé dans un enfeu orné de motifs sculptés polychromes, était constitué d’un sarcophage de marbre gris foncé sur lequel était placé le gisant de la duchesse, exposé aujourd'hui en la chapelle des Cordeliers tout près du cénotaphe. Il est attribué au sculpteur lorrain Ligier Richier, dont le duc Antoine s'était attaché les talents dès 1530. La duchesse n'est pas idéalisée au summum de sa jeunesse et dans ses plus beaux atours (comme dans la plupart des gisants) mais est représentée en habit de clarisse, et son visage est bien celui d'une femme âgée que Delacroix décrivit comme "une vieille de quatre-vingts ans dont la tête est encapuchonnée, maigre à faire peur et tout cela représenté de manière à ce qu’on ne l’oublie jamais et qu’on n’en puisse détacher les regards". Ce type de gisant est proche du "transi", défini comme "représentant le défunt de façon réaliste, nu, voire en putréfaction, contrairement au gisant représentant un personnage couché et endormi, dans une attitude béate ou souriante. C'est un genre qui se développe au XVIe siècle en France et en Europe, où on compte 155 tranis, contre 75 au XVe siècle et 29 au XVIIe siècle.
Or, la réalisation la plus connue de Ligier Richier est le Transi de René de Chalon dans l'église Saint-Étienne de Bar-le-Duc, un chef-d'œuvre de l'art macabre qui surmonte le tombeau du cœur et des entrailles de ce dernier, prince d’Orange et ... gendre d'Antoine Le Bon : le traitement en écorché du transi suggère des connaissances étendues en anatomie et une volonté d'émouvoir le spectateur par son réalisme. Ce transi est daté de 1545-1547, il précède de très peu le gisant de Philippe de Gueldre .
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Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
Gisant de Philippe de Gueldre, Ligier Richier, v.1548, calcaires polychrome, Chapelle des Cordeliers de Nancy. Photo lavieb-aile 2024.
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SOURCES ET LIENS.
— BOURDIEU-WEISS (Catherine), 2005, « Réflexions sur les Vanités lorraines au XVIIe siècle : diverses formes artistiques », Littératures classiques 2005/1 (N° 56), pages 169 à 175
— TRANIÉ (Ghislain) 2011, Un exemple d'articulation du féminin et du masculin à travers le mécénat. Les pratiques de Philippe de Gueldre (1467–1547) et d'Antoine de Lorraine (1489–1544) , dans Le Moyen Age 2011/3-4 (Tome CXVII), pages 531 à 544
"Lors de son entrée au couvent, Philippe de Gueldre emporte avec elle de nombreux ouvrages de liturgie et de dévotion, acquis de son propre fait ou retirés de la bibliothèque ducale. Quelques-uns de ces ouvrages ont pu être identifiés par les bibliophiles du XIXe siècle : des heures, un temporal, un bréviaire et un passionnaire illustrent le mécénat ducal pour les manuscrits à peinture mais on rencontre également des livres imprimés, tels que La discipline de l’amour divin, un Dialogue de consolation entre l’âme et la raison, les Dialogues de saint Grégoire le Grand, la Vita Christi de Ludolphe le Chartreux/ de Saxe, une Horloge de la Passion de Jésus Christ et, plus étonnant, Le livre de vraie et parfaite oraison de Luther."
La météorite d'Ensisheim (1492), le polyèdre de Dürer (1514), le crâne de cristal (XIXe siècle) et la Tête crâne de Giacometti (1934) : un parcours macabre de l'exposition Voyage dans le cristal au musée de Cluny.
Au gré des six salles de l'exposition, et des cartels des œuvres présentées, c'est un étrange ou macabre voyage qui est proposé au visiteur. Le rapport avec le cristal n'est pas toujours évident, notamment à propos de Dürer et de Giacometti, et c'est bien ces petites énigmes que nous allons tenter de débrouiller. Quand au crâne, et son rapport avec le macabre, central dans mon premier article, nous verrons qu'il tient également une place majeure, mais cachée, pour ces deux artistes.
Je débuterai donc, pour être limpide, par le Crâne de cristal du Quai Branly, avant de partir, tel Indiana Jones, à sa recherche chez Dürer puis Giacometti.
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I. Le crâne de cristal.
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Cette alliance du cristal, pierre de lumière symbole de pureté et d'inaltérabilité, et du crâne, image du memento mori dans les mosaïques romaines ou les Vanités baroques, crée un oxymore troublant, que Patrick Neu a repris dans sa Danse macabre (article précédent).
Il en existe douze autre exemplaires, mais tous n'ont pas cette pureté lumineuse du crâne du Quai Branly. Ce fut la fierté du Musée, comme représentant de l'art des lapidaires atzèques, jusqu'à ce que les analyses scientifiques du Louvre prouvent qu'il s'agissait d'un faux, provenant d'Allemagne entre 1867 et 1886 et commercialisé par Eugène Boban, comme celui du British Museum et de la Smithsonian Institution.
Cette duperie, qui a triomphé pendant un siècle, est elle-même troublante : elle nous révèle la faillibilté de la science et de l'esprit, leçon d'humilité qui s'ajoute à la certitude de notre destin mortel : vanitas vanitatis et omnia vanitum est précisément le message muet des crânes qui nous fixent de leurs orbites creuses.
La lumière se fait un plaisir de passer comme en se jouant à travers ce crâne jadis si savant et d'en révéler l'ombre, creusée d'un cœur éblouissant.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
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II. Le crâne de la Melencolia I (1514) d'Albrecht Dürer, et la météorite d'Ensisheim.
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La série macabre se poursuit par cette Mélancolie de Dürer, et si nous n'en étions pas convaincu, nous pourrions nous rappeler que cette gravure appartient à un cycle où figure le Chevalier, La Mort et le Diable (1513), qui est un Memento mori explicite, mais surtout Saint Jérôme pénitent (1496), puisque la retraite érémitique et pénitentielle est une préparation chrétienne à la mort ; et que saint Jérôme tient un caillou dans la main, pour se frapper la poitrine. Le sablier et le crâne sont présents dans les deux premières de ces œuvres, et s'ils sont absents de Jérôme pénitent, ils sont présents dans Saint Jérôme dans sa cellule.
Un crâne est discrètement représenté sur l'une des faces du polyèdre, déformé comme par une anamorphose. On peut imaginer que la surface polie reflète en une image macabre le visage de la femme ailée, possible allégorie de la Mélancolie. Ce reflet morbide du soi pourrait être donc ce que contemple d'un regard songeur la femme. Et ce que dessine l'enfant sur sa tablette.
Le matin du 7 novembre 1492, une météorite de pierre de 127 kg entre à grande vitesse dans l'atmosphère terrestre. La météorite laisse derrière elle une vive trainée lumineuse, avant de s'écraser dans un champ de blé, à proximité de la ville d'Ensisheim, à 22 km au nord de Mulhouse et à 44 km de Bâle.
Son point de chute est alors marqué par un cratère de deux mètres de diamètre. Les habitants prélèvent des fragments de cette météorite, en guise d'amulette porte-bonheur. Le bailli fait suspendre la météorite, comme signe divin de bon augure, dans le chœur de l'église paroissiale. Elle y reste jusqu'en 1793, date à laquelle elle est exposée à la Bibliothèque nationale de Colmar. De nombreux prélèvements sont réalisés : cadeaux pour des visiteurs d'importance, spécimen à analyser pour Ernst Chladni. En 1803, la ville d'Ensisheim la récupère et la replace dans son église. Le 6 novembre 1854, l'église voit son clocher s'effondrer. La météorite fut alors remisée à l'école, puis à l'hôtel de la Régence devenu par la suite l'hôtel de ville. Elle a été divisée en plusieurs morceaux qui se trouvent aujourd'hui pour la plupart d'entre eux dans des musées, dont le Muséum d'Histoire naturelle de Paris, galerie de minéralogie : elle fait partie des chondrites à olivine et hypersthène, du groupe LL6 dans la classification des météorites.
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La chute de cette "pierre de tonnerre" a été relaté par de nombreux auteurs notamment en 1492 par Sébastien Brant — De fulgerra anni xcii. Sebastianus Brant — (dont Dürer illustrait alors la Nef des Fous) ou en 1493 dans la Chronique de Nuremberg de Hartmann Schedel : c'est la première chute observée d'une météorite depuis l'invention de l'imprimerie. Certains (W) pensent que Dürer a "assisté" à cette chute ; ou qu'il aurait pu entendre le son, perceptible jusqu'à Bâle, ou enquêter auprès de témoins indirects : son séjour chez des imprimeurs de Bâle est attesté, du moins à l'été 1492.
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Sebastien Brant
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Chroniques de Nuremberg
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Cet évènement a en tout cas frappé Albrecht Dürer qui l'a représenté dans sa gravure Hexensabbat (date inconnue) et qui l'a peinte en 1496 au au verso du tableau Saint Jérôme pénitent: la météorite jaune citron est au centre d'un tourbillon de flammes rouges et grises.
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Albrecht Dürer, au dos de Saint Jérôme pénitent.
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C'est sa traversée incandescente de l'atmosphère qui est représentée dans le ciel de Melencolia I, au dessus de la chauve-souris portant sur ses ailes le titre.
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Le polyèdre contemplé par l'ange féminin est-il une "représentation idéalisée" de la météorite sosu la forme d'une structure cristalline ? En tout cas, ce polyèdre est relié au cristal par la commissaire de l'exposition, puisque rien, sinon, ne justifie la présence de cette gravure (dans son exemplaire possédé par le Louvre) dans l'acte IV du parcours :
"À la Renaissance, la maîtrise de la glyptique et la passion de la taille du cristal atteignent une virtuosité jamais égalée. La redécouverte des codes antiques trouve une expression particulièrement perceptible au travers de rondes-bosses et de pièces d’apparat. [...]Parallèlement, les écrits scientifiques de Platon, Aristote et Euclide sont revisités. Luca Pacioli, avec son De Divina Proportione, est une figure centrale de ce mouvement. Dans la peinture et la gravure, les formes et facettes du polyèdre sont transcendées par Paolo Uccello et Albrecht Dürer qui cherchent à déployer les volumes en facettes."
Il a été prouvé que ce polyèdre est "un cube dressé selon sa diagonale, d’abord étiré selon son grand axe puis tronqué en haut et en bas". Le cube est une forme parfaite, comme la sphère posée juste en dessous.
Jacques Bousquet y consacre un très grand nombre d'articles sur son site artifexinopere, car ce polyèdre est pour lui "avec le carré magique, l’objet le plus intrigant de la gravure". Dürer n’aurait-il pas fait tourner le polyèdre autour de son axe vertical, de manière à ce que l’angelot regarde dans la direction du rhomboèdre ?
Avec lui, et tous les auteurs dont il relate les calculs, les travaux et les hypothèses, ce polyèdre devient un abîme de réflexion, comme le crâne et son interrogation insondable.
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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
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III. GIACOMETTI ET LE POLYÈDRE : LE CUBE, LA CAGE, ET LE CRÂNE-CUBE
Les commissaires de l'exposition nous prennent par la main pour souligner comment Giacometti reprend le polyèdre de Dürer, et sa réflexion mélancolique sur le crâne.
" Quelques années avant Le Cube, Giacometti produit une mélancolie, La Cage, dans laquelle on peut voir un squelette enfermé dans un cristal, nous rappelant sa fascination pour la Melancolia de Dürer. Ce rapprochement formel se double d’un autre point commun, celui d’une expérience initiatique. Le polyèdre de Dürer est une référence à une expérience personnelle extraordinaire. En 1492, Dürer est témoin de la chute de la météorite appelée «Pierre du tonnerre d’Ensisheim».
De son côté, Giacometti évoque le caractère fondateur de la vision d’une pierre dans la montagne suisse de son enfance : Ce fut mon père qui, un jour, nous montra ce monolithe. Découverte énorme, tout de suite je considérai cette pierre comme une amie, un être animé des meilleures intentions à mon égard; nous appelant, nous souriant, comme quelqu’un qu’on aurait connu autrefois, aimé et qu’on retrouverait avec une surprise et une joie infinie ."
La figure de Dürer (découverte dans l'enfance sous l'influence de son père peintre), sa Melencolia, et en particulier son polyèdre renvoie donc à la figure paternelle, Giovanni Giacometti, qui lui appris à dessiner et à modeler. Alberto découvrit directement Melencolia à l'exposition deu Petit Palais de 1933 sur les estampes de Rembrandt et de Dürer.
La figure maternelle, Anetta Giacometti, est néanmoins centrale, et elle fut le modèle de nombreuses œuvres peintes ou sculptées.
1. "La Table" bronze, 1969, d'après l'original en plâtre, 1933. Centre Pompidou AM1705 S.
"Il appuie son coude sur la table, et reste absorbé dans ses pensées comme un somnambule" (Lautréamont, Les chants de Maldoror)
"Signé et daté par Giacometti, le plâtre fut probablement conçu pour l’« Exposition surréaliste. Sculptures, objets, peintures, dessins » (galerie Pierre Colle, 7-19 juin 1933). C’était, comme le rappelle Giacometti à Pierre Matisse en insistant sur sa fonction d’objet mobilier, « une table pour un couloir » : la conçut-il, déjà entraîné à d’autres commandes de pièces d’ameublement – chenets, vide-poche, cheminée – pour Charles et Marie-Laure de Noailles, qui de fait achètent l’œuvre, le 20 juin, et la placent dans un couloir de leur maison d’Hyères (où elle restera jusqu’en 1951)? Quoi qu’il en soit, en l’exposant galerie Pierre Colle, face à Femme qui marche (1932), il la présente aussi comme une sculpture à part entière. Instabilité ontologique de l’œuvre en effet : à la fois meuble, avec son dos plat s’ajustant au mur et ses objets déposés sur la table, comme l’étaient les bibelots dispersés au-dessus de la cheminée que le sculpteur dessine alors pour l’ensemblier Jean-Michel Franck, et sculpture figurative, offrant un dispositif plastique complexe, très scénographié. Quatre pieds disparates et trop grêles supportent le buste, en forme de pion d’un jeu d’échecs géant, d’une femme à la figure à moitié cachée par un voile, dont le lourd pan menace de déséquilibrer la table ; sur le plateau, devant cette sorte de voyante, sont posés un objet polyédrique (réduction du Cube), un mortier d’alchimiste et une main coupée, motifs récurrents de cette époque de grande angoisse.
Au-delà de la poétique de ce dispositif, qui n’est pas sans posséder la force d’inquiétante étrangeté du Cerveau de l’enfant de De Chirico et qui pourrait presque apparaître comme un « poncif » du surréalisme (la sculpture fut fameuse en son temps, photographiée par Man Ray, exposée à Londres en 1936, reproduite dans le Dictionnaire abrégé du surréalisme de Breton et Eluard en 1938, etc.), c’est, semble-t-il, un ouvrage de « mélancolie » que dresse encore ici Giacometti, dans l’incertitude du saisissement de la figure humaine, dans son aveuglement. Dans le dessin-poème « le Rideau brun », qu’il livre au Surréalisme au service de la révolution (n° 5, 15 mars 1933), il écrit en place des yeux, au centre d’une figure aveugle : « aucune figure ne m’est aussi étrangère même plus un visage de l’avoir tant regardée, elle s’est fermée sur des marches d’escaliers inconnus ». Le propos ésotérique qu’il expose dans Table s’éclairera dans un dessin, Figure (1935) : la table se déploie comme un cube ouvert, pour faire corps avec un buste féminin enfin dévoilé, tenant un cristal polyédrique. En 1935, Giacometti sera prêt à se dégager des énigmes fantasmatiques de la période surréaliste passée pour revenir à la vision directe de la figure humaine." (Agnès de la Beaumelle)
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De l'autre côté du plateau, Giacometti a posé la main coupée de la femme, un de ses "objets désagréables" qui revet une étrange morbidité, à l'instar des reliquaires parlants du Moyen-Âge. (Catalogue)
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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
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2. Le polyèdre : "Le Cube", plâtre [1934-1934 ] Centre Pompidou.
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"Le monolithe polyédrique aux douze faces irrégulières – objet de géométrie descriptive et de stéréométrie bien connu pour constituer notamment un des éléments de la Melencolia de Dürer – apparaît à maintes reprises dans l’œuvre de Giacometti des années 1932-1935, comme une citation de la fameuse allégorie gravée du maître allemand, qu’il revoit, en mai 1933, dans une exposition au Petit Palais. Avec ce Cube , qui radicalise la grande colonne polyédrique de Figure (1931-1932), conçue pour le jardin de la villa Noailles à Hyères, et qui annonce sa résolution figurative de Tête-Crâne (1934, AM 1986-58) – les deux œuvres se trouvent côte à côte sur une page de Minotaure , n° 5, mai 1934 –, se pose la question, pour le sculpteur, qui perd son père en juin 1933, de la possibilité ou non d’une apparition de la figure, du saisissement ou non du réel.
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Les pieds dans le plat 1933, 1935, Fondation Giacometti, copie d'écran.
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"Étroite association, pleinement mélancolique et récurrente chez Giacometti, du polyèdre et de la tête de mort : déjà un cristal irrégulier, enfermant un pantin-squelette, apparaît sur le dessin de L’Atelier (1932), un caillou de forme identique est posé sur la Table surréaliste (1933, AM 960 S), aux côtés d’une voyante à demi voilée, un autre, à moitié ouvert, apparaît dans la gravure Lunaire (1933), un crâne cristallin polyédrique constitue la Tête gravée (1933-1934, New York, MoMA), un polyèdre irrégulier encercle une figure féminine dans une gravure quasi inédite de la même date ( Giacometti, Le dessin à l’œuvre , cat. exp., Paris, Centre Pompidou / Gallimard, 2001, n° 56), tandis qu’un « objet invisible » polyédrique semble apparaître enfin entre les mains de la grande figure de 1934 : autant d’objets géométriques regardés comme des figures d’énigmes, entachés d’une blancheur lunaire, et associés toujours à des figures comme s’ils en incarnaient le cercueil ou la réduction.
La masse blanche, presque phosphorescente et aux arêtes vives de Cube , qui apparaît à première vue comme un météorite tombé au sol sous l’effet d’on ne sait quel désastre, semble se dématérialiser, s’ouvrir, engageant celui qui regarde à en franchir les parois pour saisir, dans son hallucination, le possible fantomal d’une présence.
Dans la méditation mélancolique du sculpteur, qui vient d’ériger une stèle « cubique » sur la tombe paternelle au cimetière de Borgonovo (*), le Cube , intitulé d’abord par lui Pavillon nocturne (ainsi à l’exposition « Abstrakte Malerei und Plastik, Arp, Ernst, Giacometti, González, Miró », Zurich, 11 octobre-4 novembre 1934), constituerait dès lors le lieu d’apparition / disparition, d’émergence / enfouissement de la figure paternelle : hypothèse étayée encore par la gravure d’un portrait d’homme sur une face d’un des deux exemplaires en bronze du Cube (Zurich, Kunsthaus, Alberto Giacometti Stiftung) (**). À cette méditation se noue étroitement le questionnement, à nouveau crucial pour Giacometti en 1934, sur les perspectives de son travail de sculpteur : l’affrontement devant le modèle avec la tête humaine, qui sera « de retour » définitivement en 1935 avec la Tête-Crâne qui en est la résolution explicite, est ici en gestation. La présentation du Cube à Lucerne (Kunstmuseum, 24 février-31 mars 1935), dans l’exposition « Thèse, antithèse, synthèse », sur un « socle » mobile à quatre pieds coniques (identique à celui qui soutenait en 1927 les Danseurs), socle dont on retrouve plusieurs exemplaires dans les photographies de l’atelier à cette époque, confirme la signification figurative de l’étrange objet géométrique. Ce Cube ainsi finalement nommé, un objet « abstrait » ? « Je le considérais en réalité, dira Giacometti à James Lord, comme une tête »." (Agnès de la Beaumelle)
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(*) La tombe de Giovanni et Anetta Giacometti à Borgonovo, Italie :
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(**) Bien sûr, on souhaite voir cette "gravure d'un portrait" grattées à la fin des années 1930 sur la face de la deuxième version du Cube (moulage de la version précédente) , du Kunsthaus de Munich. Elle a été effacée du modèle en plâtre inventaire GS 128 mais est conservé sur le moulage en bronze de 1959, GS 025. Les lignes gravées sont décrites comme "une représentation de l'atelier et à un autoportrait". Mais la photographie proposée ne permet pas de discerner le motif :
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Le Cube, moulage en bronze CS 025, 1959, Kunsthaus, Munich
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Le Cube, moulage en bronze, détail
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Inversement, le Cube en plâtre conservé au Centre Pompidou montre des lignes sur trois faces, dont un cercle et une croix.
Le Cube, Centre Pompidou.
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Y-a-t-il un lien entre ces lignes gravées, comparées (pour GS025) à un portrait d'homme, évoquant peut-être la figure paternelle décédée en juin 1933, et le crâne du polyèdre de Dürer ?
Les faces du Cube exposé à Cluny et visibles sans contorsion pour le visiteur ne permettent pas de voir ces gravures.
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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
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3. "La Tête-crâne". Terre-cuite chamottée, 1934, Centre Pompidou AM1986-58
Pour les auteurs de l'exposition, "Ainsi le Cube et la Tête-crâne sont-ils un seul et même geste, qui ancre l'artiste dans une métaphysique poètique du cristal".
"La Tête-crâne est inscrite dans la suite créative du Cube, y surlignant par le motif l'association mélancolique du polyèdre et de la mort (les deux œuvres apparaissent sur une même planche dans le Minotaure de 1934). De face et de profil droit, un crâne est reconnaissable, les orifices ronds des yeux suggérant le côté osseux et squelettique. Le profil gauche ne révèle plus que la fente rectangulaire de la bouche dans un volume facetté (elle n'est jamais autant une tête cubique que sous cet angle. Par l'arrière, il semble que le bloc soit une macle et alors, sans-doute, sommes-nous face à la « tête-pierre » de Giacometti : Si je vous regarde en face, j'oublie le profil, si je regarde le profil, j'oublie la face ». La correspondance formelle avec le crâne de cristal qu'il avait vu au musée d'ethnographie du Trocadéro est l'indice d'une probable inspiration directe, Tête cubiste (gravure, 1933, New-York, Moma inv.42.1968) constituant un jalon intermédiaire entre le crâne du Trocadéro et sa sculpture." (Catalogue)
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Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
Exposition Voyage dans le cristal, Musée de Cluny, Paris décembre 2023. Photographie lavieb-aile.
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CONCLUSION.
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L'exposition de Cluny nous révèle de façon argumentée les liens étroits qui existent entre le Crâne-cristal du Quai Branly, le Melencolia I de Dürer, et les trois œuvres d'Alberto Giacometti, la Cage, le Cube, et la Tête-Crâne.
Le crâne est l'élément central. Le cristal est présent sous la forme indirecte du polyèdre, d'une pierre de structuration géométrique.
La mélancolie est celle qui naît de la méditation devant le crâne, figure de la mort (les Vanités) mais aussi de celle qui naît devant la pierre, le monolithe, la météorite, l'organisation géométrique de la Nature et ses échelles de temps confondante.
La pierre jette l'effroi et place l'artiste devant le défi de le résoudre ; ce défi n'est relevé que partiellement, sous forme d'une création, et d'un échec imposant de poursuivre l'œuvre.
Pour Giacometti, la pierre est d'abord féminine, amicale, et nostalgique, un être animé des meilleures intentions à mon égard; nous appelant, nous souriant, comme quelqu’un qu’on aurait connu autrefois, aimé et qu’on retrouverait avec une surprise et une joie infinie. Mais c'est ensuite la pierre tombale de la mort du père.
Les deux fils conducteurs les plus visibles, crâne et cristal, tissent donc les motifs en entrelacs de la Lumière, du Cosmos, de la Mort, du Temps, et de la création artistique. Le Macabre est là, mais se fait discret.
Les niches à volets de sainte Cécile et saint Maurice (bois polychrome, fin XVIe ou début XVIIe siècle) dans la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Les autres niches et leurs statues.
Construite au début du XVIe siècle, la chapelle Sainte-Cécile était dédiée à saint Suliau avant de l'être à sainte Cécile après le Concile de Trente (1545-1563). La chapelle, inscrite "monument historique" depuis 1935 fut restaurée en 1983. C'est un édifice en forme de croix latine avec chevet plat peu débordant et sacristie au nord-est. À l'ouest se dresse un élégant clocher à jour avec une tour très élancée.
Les dimensions de la chapelle suivent des proportions harmonieuses puisqu'elles sont toutes multiples de cinq. Au sud, la nef est éclairées par une petite fenêtre ajourée en forme très rare de triskell à quatre branches.
L'intérieur dallé en granite pour le sol a des murs enduits de chaux qui supportent une voûte à entraits apparents. Les sablières sont ornées de motifs en trèfles à quatre feuilles.
La chapelle conserve de nombreuses statues en bois polychromes datant des XVIe et XVIIe siècles : le Christ en croix, saint Herbot, saint Urlou, saint Ronan, une Vierge à l'Enfant de l'Annonciation portant le Livre des Écritures fermé, dite encore Itron Varia ar Porzou (Notre-Dame des Portes), sainte Cécile (patronne ou reine couronnée des musiciens) et enfin saint Maurice abbé, ces deux dernières placées dans des niches à volets historiés. Une statue de saint Marc l'évangéliste en pierre polychrome pourrait dater (inscription) de 1591.
D'autre part, le chœur et les chapelles latérales sont pourvues d'autels en pierre de taille. Le maître-autel, peint du motif triangulaire de la Trinité, porte aussi un grand bas-relief du XVIIe siècle représentant la Cène, très proche du retable de Guimiliau de la même époque.
Sur le calvaire du XVIe siècle, deux anges hématophores recueillent le sang du Christ mort. Au revers est représentée sainte Cécile portant la palme du martyre.
Au nord-est, une fontaine sacrée en forme de petit édicule en pierre portait une statue de sainte Cécile, aujourd'hui disparue.
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Le chœur de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Le chœur de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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I. LA STATUE DE SAINTE CÉCILE DANS SA NICHE À VOLETS. Bois polychrome, fin XVIe-début XVIIe siècle.
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La sainte, vierge et martyre et patronne des musiciens, est représentée mains jointes, couronnée, vêtue d'une robe dorée au dessus d'une chemise blanche (col en V, poignets) et d'un manteau rouge à rinceaux d'or ; ses chaussures sont pointues, selon la mode du XVe siècle mais néanmoins tout le décor affirme l'influence de la Renaissance, telle qu'elle fut introduite à la pointe occidentale de la Bretagne vers 1570-1580 au château de Kerjean. En effet, son orgue portatif, à deux registres de tuyaux, est supporté par une console dont les supports anthropomorphes, ou termes, aux bras en volutes apparaissent en Finistère et surtout dans le Léon, en grand nombre, à partir du dernier quart du XVIe siècle.
La couronne est un attribut très inhabituel de sainte Cécile de Rome, et elle porte habituellement une couronne de lys et de roses. Y-a-t-il eut contamination par les statues de la Vierge ?
Le manteau fait retour en pan vers le poignet gauche, mais le zèle des peintres restaurateurs a peut-être recouvert d'or la partie haute et les manches plissées.
Le visage est peu avenant, pensif, et le front et les sourcils sont épilés à la mode de l'époque.
Sainte-Cécile est la patronne des musiciens (et des organistes en particulier), des académies de musique, des compositeurs, des facteurs d’orgues, des luthiers, des poètes et des chanteurs..
Ce patronage lui a été attribué sur la base de l’interprétation d’une phrase qui figure dans ses Actae :
"Et pendant que jouaient les orgues de la musique profane, elle chantait secrètement dans son cœur une prière à l’attention de Jésus, son véritable époux."
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Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le bandeau rétro-occipital de sainte Cécile.
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Ce détail de coiffure aux allures de "chouchou" rouge et or est significatif, car il relie cette statue aux très nombreuses statues de la Vierge ou de sainte Marie-Madeleine présentant le même bandeau qui réunit les cheveux derrière la nuque avant que ceux-ci se librent en mèches bouclées devant les épaules. Ce détail s'observe prioritairement en Finistère, au XVIe siècle.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le volet de droite : saint Durlou et sainte Apolline.
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1. Saint Durlou (ou Urlou, ou Gurloës) en père abbé, mitré et tenant la crosse dans la main droite.
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Ses jambes et ses pieds nus participent à donner de ce saint une facture naïve ou populaire.
"Saint Gurloës (également connu sous le nom de Saint Urlo, saint Urlou ou saint Ourlou) fut le premier abbé de l'abbaye Sainte-Croix de Quimperlé. Il fut béni abbé le 14 septembre 1029 par Orscand évêque de Vannes. Il s'installa dans la nouvelle abbaye avec douze moines venant comme lui de l'abbaye Saint-Sauveur de Redon. Le même jour, Alain Canhiart constitua au monastère un fief seigneurial comprenant Lothéa, Baye, Mellac, Tréméven et Belle-Île.
Il mourut en 1057 après avoir gouverné l'abbaye pendant vingt-huit ans moins vingt jours selon les dires de Dom Placide Le Duc. Il fut béatifié par le pape et reçu le titre de bienheureux.
En 1083, ses reliques furent élevées dans la crypte de l'abbaye. Par la suite, le saint fit l'objet d'une intense dévotion. Il était invoqué pour les maux de tête et de reins ainsi que pour la maladie de la goutte. D'ailleurs la goutte s'appelle en breton droug Sant Urlou c'est-à-dire "le mal de Saint Urlou". Mais sur sa vie proprement dite nous ne savons que très peu de choses. Son culte est resté limité à quatre chapelles, situées à Clohars-Carnoët, Le Faouët, Languidic et Lanvénégen. "
https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint_Gurlo%C3%ABs
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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2. Sainte Apolline tenant la tenaille de son supplice (les bourreaux lui arrachèrent les dents).
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Elle est vêtue comme une villageoise du XVIe siècle, avec une robe à épaules ornementées ou le tablier à fleurs, et porte une coiffe blanche à frisures. Comparer avec le costume régional du XIXe siècle conservé au Musée départemental breton.
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Musée départemental breton,Cl.1959.4.1. Costume femme, Briec-de-l'Odet (Groupe de Quimper), fin XIXe.
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Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le volet de gauche : saint Maurice et sainte Cécile.
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1. Saint Maurice de Carnoët, en abbé, bénissant le duc de Bretagne agenouillé.
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Le saint, mitré et tenant un livre (comme fondateur) se tient devant une tenture semée d'hermines et trace une bénédiction vers un personnage agenouillé et tenant une couronne.
La scène n'a rien d'historique, tant pour la présence d'hermines au XIIe siècle que pour l'onction faite au duc, qui, s'il s'agit de Conan IV, est aucontraire le donateur de la terre où Maurice fonda son abbaye.
"Maurice Duault étudia à Pontivy puis à l’université de Paris puis âgé de 23 ans, il choisit de devenir moine cistercien à la jeune abbaye de Langonnet où il fait son noviciat en 1140. À la mort de l’abbé, Maurice lui succède entre 1144 et 1147 et reste abbé de Langonnet jusqu'en 1174 ou 1175.
En 1170 le duc Conan IV donna aux moines cisterciens de l'abbaye de Langonnet plusieurs villages situés à proximité de la forêt de Carnoët dans le diocèse de Cornouaille pour y établir une communauté. En 1177, Maurice prend la tête d’un groupe de douze compagnons pour y fonder l’abbaye de Clohars-Carnoët consacrée initialement à Notre-Dame. Il y meurt le 29 septembre 1191. Par la suite, l’abbaye prit son nom." Wikipédia
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Maurice est en surplis et cotte blanche sous une chasuble, sa main droite est gantée.
Le duc, à moustache Louis XIII, a les jambes nues.
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Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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2. Le martyre de sainte Cécile de Rome, brûlée vive.
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Une fresque exécutée vers 1517-1520 par Raphaël et ses élèves dans la chapelle de la villa Magliana, située en dehors de Rome sur commande du pape Léon X, montre le martyre de sainte Cécile brûlée vive dans un chaudron. Cette scène fut reproduite en gravure par M. Raimondi en 1520-1525, ou sur une majolique italienne de la même période.
Ce supplice, auquel elle résista miraculeusement, précéda sa décapitation :
"Almaque, furieux, la fit ramener dans sa maison, où, jour et nuit, il ordonna qu’elle fût plongée dans un bain d’eau bouillante. Mais elle y resta comme en un lieu frais, et sans que même une goutte de sueur parût sur elle. Ce qu’apprenant, Almaque ordonna qu’elle eût la tête tranchée dans son bain. Le bourreau la frappa de trois coups de hache ; et comme elle vivait toujours, et que la loi défendait de frapper les condamnés de plus de trois coups, la sainte fut laissée encore respirante. Elle survécut trois jours à son supplice. " (Jacques de Voragine, Légende Dorée)
Cécile était une jeune fille romaine qui aurait vécu au IIe ou au IIIe siècle. Élevée dans la religion chrétienne, elle fut cependant contrainte d’épouser un païen du nom de Valérien. Ayant fait vœu de chasteté, Cécile obtint de lui, la nuit de ses noces, qu’il respectât cette abstinence. Valérien accepta à condition qu’elle lui permît de voir l’ange qui, il le savait, veillait sur sa femme. Celui-ci descendit bientôt vers eux et déposa sur leur tête une couronne de lys et de roses (outre l’instrument de musique à cordes, les fleurs font partie des attributs de Cécile). Valérien ainsi que son frère Tiburce se convertirent puis demandèrent le baptême. Tous deux furent par la suite décapités sur ordre du gouverneur romain.
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Marcantonio Raimondi, vers 1520-25, Martyre de Sainte Cécile debout et nue dans un grand chaudron,
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Musée des arts décoratifs de Paris. Majolique, atelier de la Casa Pirota, « Le Martyre de sainte Cécile », Faenza (Italie), vers 1525.
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Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Ici, deux bureaux presque nus (tant les vapeurs sont chaudes) versent un baquet d'eau bouillante sur la tête de Cécile, qui reste de marbre malgré ses joues bien rouges, tandis que deux autres bourreaux tout aussi nus activent le feu sous le chaudron.
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Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Les éléments de décor Renaissance (dernier quart XVIe siècle).
1. Les supports anthropomorphes.
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La "tribune " des orgues de cette niche est supportée par deux "hommes-colonnes" ou termes engainés. En effet, leur tête soutient un petit chapiteau, et leur buste se prolonge, après un élément feuillagé formant leur bassin, en un empietement à deux montants.
N.B : Cet article appartient à une série sur les Termes gainés, cariatides et atlantes (ou "supports anthropomorphes engainés") , et, plus généralement, sur l'introduction de la Seconde Renaissance en Bretagne sous l'influence de la famille de Goulaine puis des Barbier du château de Kerjean.
Je n'en montre ici qu'un seul exemple, tiré du porche de Bodilis (après 1570):
Le bénitier du porche de Guimiliau. (kersanton, traces de polychromie, Maître de Plougastel, v.1606) du porche sud de Guimiliau, son ange aux goupillons et ses termes gainés.
—ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), 1559 Livre d’architectvre de Jaques Androvet du Cerceau, contenant les plans et dessaings de cinquante bastimens tous differens : pour instruire ceux qui desirent bastir, soient de petit, moyen, ou grand estat. Auec declaration des membres & commoditez, & nombre des toises, que contient chacun bastiment, dont l’eleuation des faces est figurée sur chacun plan..., Paris, s.n., 1559.
—ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), Second Livre d’architecture, par Iaqves Androvet Du Cerceau. Contenant plusieurs et diverses ordonnances de cheminées, lucarnes, portes, fonteines, puis et pavillons, pour enrichir tant le dedans que le dehors de tous edifices. Avec les desseins de dix sepultures toutes differentes, Paris, André Wechel, 1561.
—ANDROUET DU CERCEAU (Jacques), 1582, Livre d’architecture de Jaques Androuet Du Cerceau, auquel sont contenues diverses ordonnances de plants et élévations de bastiments pour seigneurs, gentilshommes et autres qui voudront bastir aux champs ; mesmes en aucuns d’iceux sont desseignez les bassez courts... aussi les jardinages et vergiers..., Paris, pour Iaques Androuet du Cerceau, 1582. de l’Orme (Philibert), Le Premier tome de l’architecture, Paris, Frédéric Morel, 1567.
— DELORME (Philibert), 1567 Le premier tome de l'architecture de Philibert de L'Orme conseillier et aumosnier ordinaire du Roy, & abbé de S. Serge lez Angiers , Paris, Federic Morel
— DE GRANDE (Angelo), 2014, "De Fontainebleau vers la Lorraine: l’ordre anthropomorphe de la maison «des Sept Péchés capitaux» à Pont-à-Mousson" in Gravures d'architecture et d'ornement au début de l'époque moderne : processus de migration en Europe (sous la direction de S, Frommel et E. Leuschner), pp.205-218, 2014.
— FROMMEL (Sabine), 2018 Supports anthropomorphes peints de la Renaissance italienne, in Frommel, Sabine – Leuschner, Eckhard – Droguet, Vincent – Kirchner, Thomas (dir.) Construire avec le corps humain/ Bauen mit dem menschlichen Korper. Les ordres anthropomorphes et leurs avatars dans l'art europèen de l'antiquité à la fin du XVIe siècle/ Antropomorphe Stùtzen von der Antike bis zur Gegenwart, Campisano Editore 2 volumes pp 618, 40 ill.
"Rares sont les motifs architecturaux qui témoignent d'une persistance telle que les ordres anthropomorphes, depuis l'Antiquité jusqu'à la période actuelle, en passant par le Moyen Âge. Leur évolution s'articule par de subtiles interactions entre les domaines sculptural, architectural et pictural, alors qu'une fortune théorique durable a été instaurée par la description détaillée par Vitruve des "Perses" et des "Caryatides" dans son traité De architectura libri decem. Contrairement aux ordres architecturaux canoniques, ce " sixième ordre " invite à des interprétations et des variations plus souples et plus personnelles. Il put ainsi assimiler des traditions locales très diverses lors de son parcours triomphal dans toute l'Europe. Si la signification originelle de soumission et de châtiment de ces supports reste valable, les valeurs narratives ne cessèrent de s'enrichir et de s'amplifier, en faisant de ce motif un protagoniste abondamment présent dans de multiples genres artistiques, des meubles aux monuments les plus prestigieux, et qui révèle les mutations typologiques et stylistiques au fil du temps. Les contributions réunies dans ces deux volumes fournissent un large panorama européen de ces occurrences, offrant un large éventail de synergies et d'affinités révélatrices."
—SAMBIN ( Hugues), 1572 Oeuvre de la diversité des termes dont on use en architecture reduict en ordre : par Maistre Hugues Sambin, demeurant à Dijon, publié à Lyon par Jean Marcorelle ou par Jean Durant. Bibliothèque municipale de Lyon, Rés 126685.
—SERLIO (Sebastiano ), 1551 Liure extraordinaire de architecture, de Sebastien Serlio, architecte du roy treschrestien. Auquel sont demonstrees trente Portes Rustiques meslees de diuers ordres. Et vingt autres d’oeuvre delicate en diverses especes, Lyon, Jean de Tournes, 1551.
Le premier livre d’architecture et Le second livre de perspective de Sebastiano Serlio furent publiés par Jean Martin pour la première fois à Paris en 1545; le troisième livre, fut publié à Anvers, en 1550 chez Pieter Coecke qui en 1542 avait publié une version pirate du Quatrième livre. Le quinto libro d’architettura traduit en françois par Jean Martin fut édité à Paris en 1547 par Michel de Vascosan ; le Livre extraordinaire le fut àLyon par Jean de Tournes en 1551.
—SERLIO (Sebastiano ), 1540 Il terzo libro ... Venise F. Marcolini
La Regola delli cinque ordini d’architettura de Vignole sans cesse ré-éditée depuis 1562, fut publiée en édition quadrilingue in-folio (italien, néerlandais, français et allemand) en 1617 par Willem Jansz Blaeu à Amsterdam et, ensuite, en français en très nombreuses éditions parisiennes : Regles des cinq ordres d’architecture de Vignolle / Reveuee (sic) augmentees et reduites de grand en petit par le Muet , Paris, chez Melchior Tavernier, 1631-1632 ; chez Pierre Mariette en1644-55 ; 1702 ; chez Nicolas Langlois, s.d. ; Seconde édition, 1657,1658, 1684 ;Reigle de cinq ordres d’architecture éd.par Pierre Firens,s.d. [1620-1630] ; chez Pierre Mariette, 1662, 1665 ; chez Nicolas Bonnart, 1665 ; éd. Jean Le Pautre, chez Gérard Jollain, 1671, 1691,1694.
— VITRUVE, 1511, De architectura M. Vitruvius per Jocundum solito castigatior factus cum figuris et tabula, traduit par Fra Giovanni Giocondo en 1511 à Venise chez G. da Tridentino avec 136 gravures sur bois
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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2. La corniche à médaillons et ses cuirs découpés.
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Certes ces masques de jeunes hommes joufflus sont de style Renaissance, mais ce sont surtout les "cuirs découpés à enroulement" qui attestent de l'influence des ornemanistes bellifontains. Car là encore, ces cuirs (tirant leur nom des peaux tannées qui en ont fourni le modèle initial), sont des motifs de la Seconde Renaissance introduit en France par le décor de boiseries du Salon François Ier à Fontainebleau, en 1536-1537, puis sont introduits en Haute-Bretagne par la famille de Goulaine (Champeau) puis en Basse-Bretagne par la même famille (château de Maillé) avant d'être repris par les Barbier au château de Kerjean et de se propagés très rapidement sur les édifices religieux du Léon, puis de Cornouaille.
C'est ce qui me permet de dater cette statue, et sa niche, de la toute fin du XVIe siècle, et plutôt du début du XVIIe.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de sainte Cécile, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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II. LA STATUE DE SAINT MAURICE DANS SA NICHE À VOLETS. Bois polychrome, fin XVIe-début XVIIe siècle.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2014.
Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2014.
Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2014.
Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le volet droit de la niche et ses deux panneaux:
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1. Saint Corentin évêque de Quimper... sans son poisson.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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2. Saint Pierre et sa clef.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le volet gauche de la niche et ses deux panneaux:
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1. Saint Amboise docteur de l'Eglise et évêque de Milan.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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2. Saint Paul tenant l'épée de sa décollation.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le couronnement de la niche et ses masques dans des cuirs découpés à enroulement.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le masque moustachu est au centre d'un cuir découpé très évidé associé à des volutes feuillagés, confirmant une datation assez tardive.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le deuxième masque, presque lunaire, s'inscrit aussi dans des cuirs proches d'ouvrages de ferronnerie mais l'élément de feuillage se termine par un fruit-légume typique des stucs de Fontainebleau.
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Niche de saint Maurice, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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III. LA STATUE DE LA VIERGE À L'ENFANT ( Bois polychrome, fin XVIe) DANS UNE NICHE OCTOGONALE À VOLETS.
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La Vierge, couronnée d'une sorte de mortier au dessus de cheveux blonds dénoués, est vêtue du manteau bleu à larges manches, dont le pan est retenu sous le poignet droit. Elle porte une robe dorée à décolleté carré, et une chemise blanche. Elle avance le pied gauche dans une attitude hanchée, et porte son Fils sur le bras droit. L'Enfant ne la regarde pas, mais est tourné vers l'assistance ; il tient en main gauche la sphère du Monde.
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Vierge à l'Enfant, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Vierge à l'Enfant, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Vierge à l'Enfant, (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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IV. LA STATUE D'UNE SAINTE, VIERGE ET MARTYRE ( Bois polychrome, fin XVIe) DANS UNE NICHE OCTOGONALE À VOLETS DU BAS-CÔTÉ SUD.
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Il n'est pas possible d'identifier formellement cette martyre qui devait tenir une palme dans sa main droite. Sa couronne perlée, son élégance digne d'une princesse associant un manteau retenu par un fermail et une robe ou surcot au corsage très ajusté, ses yeux bridés et enfin son livre indiquant sa maîtrise de la théologie, m'incite à y voir sainte Barbe, mais il peut s'agir aussi de sainte Cécile.
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Statue (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Statue (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Statue (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
Statue (bois polychrome, fin XVIe-XVIIe siècle) de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Saint Ronan (bois polychrome) en évêque dans une niche à volets du bas-côté nord.
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Statues de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Saint Urlou, montrant sa jambe, bois polychrome, XVIIe siècle.
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Le saint, vêtu du costume monastique à scapulaire blanc, et tenant le bourdon de pèlerin, adopte la même posture que saint Roch montrant ses bubons pesteux.
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Statues de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Saint Herbot, bois polychrome, XVIIe siècle.
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Il porte la même robe noire à scapulaire blanc que saint Urlou.
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Statues de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Le Christ en croix. Bois polychrome, XVI ou XVIIe siècle.
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Statues de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2023.
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Saint Marc évangéliste. Pierre polychrome, XVIe siècle. Bas-côté nord.
Inscription sur la banderole "ZEDOIT [LEDOIT] NOELE 1591 (ou 1501 ?)"
La date de 1591 serait cohérente avec mes datations des niches à volets.
Marc l'évangéliste porte à la ceinture son plumier et son encrier, et tient en main gauche le Livre dont il est l'auteur. Le phylactère (qui porte d'habitude l'incipit de son évangile) est tenue à son extrémité par le lion, l'animal qui lui correspond dans le tétramorphe.
Le manteau est semé d'hermine, comme pour le saint Jean du vitrail, la vierge et martyre de la niche, le saint Pierre du volet de la niche de saint Maurice, etc. Je suppose que c'est le résultat de restaurations tardives.
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Statues de la chapelle Sainte-Cécile de Briec-sur-Odet. Photographie lavieb-aile 2014.
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SOURCES ET LIENS.
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—ABGRALL (Jean-Marie) , 1890, « Chapelle de Sainte-Cécile, en Briec », Bulletin de la Société archéologique du Finistère,
-sainte Cécile, XVIe siècle, dans une niche dont l'un des volets représente en bas relief polychrome saint Urlou ("St DURLOU") et sainte Apolline, et l'autre saint Maurice abbé et le Martyre de la sainte ;
-saint Maurice abbé ("ST MAURISE"), dans une niche identique, dont l'un des volets représente saint Corentin et saint Pierre, et l'autre saint Ambroise et saint Paul Apôtre ; - Christ en croix (nef), XVIIe siècle (?),
-Vierge Marie avec un livre fermé (Annonciation ?), dite "Itron Varia ar Porzou" (N.D. des Portes)? XVIe siècle,
-sainte Anne, XVIè siècle,
-saint Urlou (ou Gurloës) montrant sa jambe, XVIIe siècle,
-saint Herbot, XVIe siècle,
-saint évêque dit Ronan, qui proviendrait selon la tradition du Pénity, fin XVIIe siècle.
Autres statues, - en pierre polychrome : saint Marc Ev., inscription sur la banderole : "ZEDOIT NOEL E 1591 (ou 1501 ?)", l'inscription datée 1578 sur la console n'est plus lisible ;
Statue en plâtre : saint Jean Discalcéat, XIXe siècle
Guy Pavec (1935-2021) vivait à Landudec en Pays bigouden. Né à Quimper-Penhars, le 27 juin 1935, il a commencé sa vie professionnelle, en 1957, comme ouvrier dans une entreprise du bâtiment quimpéroise mais, passionné depuis toujours de dessin et de peinture, il s’inscrivit aux cours du soir de l’École des beaux-arts de Quimper, en section peinture. En 1960, il devient artisan tailleur de pierre et réalise surtout des cheminées en pierre de taille pour des particuliers, jusqu’en 1974, puis il devient sculpteur en 1975. Il travaillait à la main, sans outil pneumatique ou électrique, la pierre de Kersanton (kersantite) et il a restauré à la demande d'Yves-Pascal Castel de nombreux calvaires et autres statues comme à l’église Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle, à l’Hôpital-Camfrout ; à l’église Saint-Mathieu, à Quimper ; sur le calvaire de la Trinité, à Lanzignac, sur celui de Bilirit à Loqueffret, celui de Croas-Olet de Saint-Thégonnec ou encore en restauration d’œuvres de Roland Doré (1618-1663) présentes dans les enclos paroissiaux ou encore sous le porche de la cathédrale de Saint-Pol-de-Léon. Il avait réalisé en 1972 à Tréboul la stèle érigée à la mémoire des Péris en mer mais aussi celle de Jean-Moulin, à Châteaulin, ou encore le monument aux morts, à Peumerit et la stéle d'hommage aux résistants de Sainte-Marie-du-Ménez-Hom à Plomodiern. Il a œuvré à Ty-Vougeret de Dinéault, ou pour le monument de Lababant en Pouldreuzic en 1972
La légendaire celtique occupe, comme nous allons le voir ici, une grande place avec les multiples représentations du roi Gradlon ou des croix celtiques en multipliant les entrelacs avec une grande maîtrise. Il a puisé son inspiration également dans des œuvres inspirées du Cheval d’orgueil de Per-Jakez Hélias ou du costume bigouden.
Une exposition lui a été consacrée au manoir de Kerazan en Loctudy en avril-mai 2023, avec un catalogue de 150 pages.
Il a sculpté deux bas-reliefs pour le manoir érigé sur la Pointe de Trefeuntec par Auguste Le Guellec en 1971. Mais on ne trouve sur internet que des photos des six guerriers celtes : je compense donc cette lacune, puisque c'est sur la chapelle que son navire viking porte sa signature.
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N.B: Ce manoir acquis par le Conseil départemental du Finistère est visible depuis le sentier côtier de la Pointe de Trefeuntec, avec sa situation exceptionnelle devant la Baie de Douarnenez, mais l' accès à la propriété elle-même est interdit en raison de sa grande dégradation.
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I. LES SIX GUERRIERS CELTES, FAÇADE OUEST.
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Les six guerriers sont sensiblement identiques, mais ces soldats barbus, aux cheveux longs, marchant au pas en portant leur lances sur l'épaules, diffèrent par leur bouclier. Guy Pavec a créé pour chacun un savant réseaux d'entrelacs celtiques.
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Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
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II. LE DRAKKAR ET SES QUATRE VIKINGS, FAÇADE OUEST DE LA CHAPELLE.
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Trois guerriers vikings armés de lances inspectent la côte et s'apprêtent à débarquer, tandis qu'un barreur mène la barque dont la haute voile au tiers est frappée de l'emblème du Triskell. La vérité ethnographique cède ici le pas à un imaginaire inspiré de l'art décoratif irlandais, mais le résultat est convaincant. Ces entrelacs se retrouvent sur l'étendard dessinant ces boucles depuis la pomme de mât, sur un bouclier rond qui est peut-être un nuage, sur les quatre boucliers celtes, mais se poursuivent aussi dans l'ondulation des vagues, ou sur la crinière du dragon de proue.
Dans le ciel, un animal vole, intermédiaire entre un cheval ailé, un coq ou un dragon.
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Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Bas-relief (kersanton, v.1971) de Guy Pavec, manoir de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
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L'environnement.
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Manoir et Pointe de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Manoir et Pointe de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Manoir et Pointe de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Manoir et Pointe de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Manoir et Pointe de Trefeuntec. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha.
Après avoir occupé la droite de l'autel dédié à Notre-Dame de Kermaria dans le bras sud du transept, l'ensemble de bas-reliefs en albâtre de la chapelle de Kermaria an Iskuit est exposé dans une vitrine à droite du chœur. Ce sont principalement quatre panneaux rectangulaires consacrés à un cycle de la Vie de la Vierge, de même taille et surmontés d'un dais gothique identique, mais ce cycle se complète d'une Vierge de Pitié placée au dessus de ces panneaux.
Les ensembles liés au cycle de la Vie de la Vierge ont été produits en grand nombre en albâtre de Nottingham à partir de 1420. La presque totalité des retables bretons a été démantelée et nous est parvenue sous forme de panneaux isolés ( Squiffiec, Vannes, Guer, Morlaix, Plonevez-du-Faou,). Les ensembles les mieux conservés sont ceux de Nouvoitou (35) et de Kermaria an Iskuit, tous les deux de la fin du XVe siècle. C'est dire l'intérêt de l'étude de ces albâtres de Kermaria, et de la comparaison des deux retables.
D'autre part, en comparant les quatre sujets ici traités (Annonciation, Adoration des Mages, Assomption, Couronnement par la Trinité) avec leurs homologues des grandes collections d'albâtres (Victoria & Albert Museum ou Musée de Cluny par exemple), nous pouvons voir à la fois la fidélité des œuvres au modèle archetypal anglais, et à la fois comment chque sculpture est néanmoins unique.
La Vierge de Pitié (intitulée "Descente de Croix" dans la notice Palissy) est un sujet très rare des albâtres de Nottingham
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Généralités.
À partir de 1340, l'albâtre (alabaster en anglais) a été largement exploité dans les carrières de la région du South Derbyshire et du Nottinghamshire . Cette production de panneaux de bas-reliefs à thèmes religieux a pris un caractère commercial et de série au XVe siècle, « radicalisant des emprunts à l'art des Pays Nordiques et développant l'élégance et la préciosité de sculptures rehaussées de couleurs vives et de dorures". La Réforme met un terme brutal à ce commerce dès le début du XVIe siècle.
Il existe deux sortes d'albâtre. L'albâtre calcite, qui est très dur et était utilisé dans l'Antiquité, et l' albâtre de gypse (sulfate de chaux) qui est une pierre à grain fin, tendre et lisse qui se durcit par exposition à l'air. Bien qu'à première vue il ressemble un peu au marbre, qu'il était censé imiter, il était beaucoup plus facile à sculpter en raison de sa douceur, et les objets en albâtre étaient donc nettement moins chers à produire.
La sculpture de l'albâtre, principalement extraite à Tutbury et Chellaston près de Nottingham, a pris des proportions industrielles en Angleterre entre le milieu du XIVe et le début du XVIe siècle. Le marché des retables et des petites images de dévotion était vaste. Elle comprenait non seulement les fondations religieuses mais aussi les classes marchandes. Plusieurs centaines d’albâtres anglais ont été exportés, certains jusqu’en Islande, Croatie et Pologne et à Saint-Jacques-de-Compostelle, dans le nord-ouest de l’Espagne. Mais le marché le plus important pour ce type d'œuvres était de loin la France, dont certaines églises conservent encore aujourd'hui des retables en albâtre anglais in situ.
On peut décrire deux thèmes principaux, celui de la Passion, et celui de la Vie de la Vierge, auquel s'ajoute celui de saints prestigieux.
"L'extraction de l'albâtre gypseux anglais est géographiquement limitée aux Midlands, notamment autour de Nottingham.
Les lieux où il se travaille se répartissent dans une aire plus vaste, les meilleurs ateliers se trouvant à Londres. Mais les objets fabriqués en séries presque identiques portent le nom générique d'albâtres de Nottingham faute de pouvoir leur attribuer un atelier.
Au début du XIVe siècle l'albâtre servait à réaliser des tombeaux ou de grandes sculptures.
A partir de 1340 environ, la production de statuettes et de petits reliefs à sujets religieux, peints et dorés, pouvant s'assembler en retable, se développe énormément. Les plus anciens reliefs qui nous soient parvenus datent de la fin du XIVe siècle.
Vers 1550, la Réforme anglicane et l'interdiction des images religieuses condamnent cette activité. Beaucoup d’œuvres exposées dans les lieux de culte furent alors détruites, d'autres furent cachées.
Au XIXe siècle, les recherches des collectionneurs permirent d'en retrouver de nombreux témoignages. Le musée Victoria et Albert de Londres en conserve une magnifique et abondante collection.
Le style très animé et l'éclat de la polychromie, mais aussi le prix assez faible de ces objets de dévotion avaient assuré leur succès dans toute l'Europe du XIVe au XVIe siècles. Leur transport était facile car chaque scène était sculptée sur un panneau indépendant dont les dimensions, en hauteur comme en largeur, dépassaient rarement 35 à 50 cm, elles pouvaient être exposées seules ou assemblées en retables. C'est pourquoi on en trouve également de nombreux exemplaires dans tous les musées français." (L. Barragué-Zouita)
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La vitrine adopte une forme en T inversée, fréquente dans la présentation des retables.
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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I. L'ANNONCIATION. Albâtre de Nottingham, trace de polychromie, fin XVe.
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Alors que les panneaux de la fin du XIVe ont une composition simplifiée où la Vierge assise accueille le message de l'ange figuré sur un nuage au dessus du vase de lys, ce type d'Annonciation apparaît dans l'art anglais après 1430 : la Vierge est agenouillée sur un coussin à glands de passementerie devant son lutrin de prière et esquisse un mouvement de surprise en se tournant vers l'ange. Elle est couronnée et nimbée et porte une chape bleue fermée par un médaillon à cinq pétales, au dessus d'une robe moulante . L'ange Gabriel fait une génuflexion et indique du doigt le message de sa salutation (AVE MARIA) inscrit sur le phylactère. Il est coiffé d'un diadème et porte une chape bleue à revers rouge. En double symbole de virginité, et de fécondité, un lys s'élève d'un vase qui sépare les deux personnages. Au dessus d'eux, Dieu le Père (tête brisée) tenant la sphère du Monde et bénissant, envoie la colombe de l'Esprit vers les lèvres de Marie.
Dans le coin supérieur droit, on voit le support du rideau de la chambre, et un phylactère (qui portait sans doute la réponse d'acceptation de Marie, ECCE ANCILLA DOMINI.
La composition est surmontée d'un dais gothique à gables et crochets.
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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PANNEAUX SEMBLABLES DANS LES COLLECTIONS.
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Le panneau du V&A Museum de Londres , daté du XVe siècle tardif, est très proche de celui de Kermaria, mais présente pourtant cinq différences : la posture de la Vierge, souriante et qui se tourne vers l'ange ; l'existence d'un angelot en registre supérieur ; et surtout le remplacement de la colombe par un enfant-Jésus portant sa croix cerclée de la couronne d'épines, entre la bouche du Père (couronné et nimbé) et les lèvres de Marie. Enfin l'ange Gabriel tient un sceptre ; et sa chape de Gabriel est remplacée par une tunique.
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Annonciation, albâtre, fin XVe, Collection V&A Museum
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Un deuxième panneau du Victoria & Albert Museum : l'ange du haut tient un luth. C'est une colombe qui vole depuis la bouche de Dieu le Père.
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V&A Museum fin XVe
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Troisième exemple dans les collections du Victoria & Albert Museum :
Dans le Retable de la Vierge de l'église de Nouvoitou (35), nous trouvons une Annonciation également très semblable à celle de Kermaria, mais qui a conservé sa polychromie et sa dorure. On y découvre à gauche un troisième ange, balançant un encensoir. La Vierge a le même geste de surprise qu'à Kermaria, mais regarde l'ange Gabriel. Il me semble que la longue forme qui sort de la bouche du Père est, comme à Kermaria, une colombe dont la tête est brisée.
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Annonciation (albâtre, fin XVe) du retable de Nouvoitou, copyright Inventaire général, ADAGP cliché Bernard Bègne
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Retable de Nouvoitou (détail), copyright Inventaire général, ADAGP cliché Bernard Bègne
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Saint-Péver.
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La seule photo disponible en ligne du panneau du retable de Saint-Péver (22) datant de la fin du XVe siècle, est celle de la base Palissy, et elle date de 1952. La proximité de ce retable (provenant de la chapelle N.-D. d'Avaugour) est soulignée par C. Dréan. C'est le seul exemple de retable de la Vierge complet, avec celui de Nouvoitou. La posture respective des deux personnages est différente. Dieu le Père envoie non une colombe, mais la figure de l'Enfant-Jésus, comme sur le premier panneau du VAM, et C. Dréan y voit, s'appuyant sur F. Cheetham, "une évolution caractéristique des dernières années du XVe siècle". Néanmoins, elle estime que les panneaux de Plouha et de Saint-Péver pourraient provenir du même atelier, mais par des sculpteurs différents.
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Le panneau du Walter Art Museum est proche de celui de Kermaria pour la représentation de la chambre (ciel de lit, lutrin). La colombe y est bien conservée.
Annonciation (albâtre, v. 1450-1490); Walters Art Museum
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De même, pour le panneau du Philadelphia Museum of Art.
II. L'ADORATION DES MAGES. Albâtre de Nottingham, trace de polychromie, fin XVe.
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La Vierge est à gauche, assise sur un lit à baldaquin, nimbée et les cheveux dénoués, tenant les orteils du pied gauche de son fils. Elle est vêtue d'un manteau à larges manches et d'une robe moulante. L'Enfant, sur ses genoux, en tunique, lui carresse la joue tout en se retournant vers le vase plein d'or pour y puiser ou en agréer l'offrande. Melchior, qui offre cet or, est à demi agenouillé, barbu, sa couronne passée sur l'avant-bars gauche. Il est vêtu d'un manteau à camail et capuche.
Juste au dessus de l'Enfant, c'est Gaspard, couronné, barbu, offrant l'encens et désignant l'étoile qui les a guidés de sa main droite : on la reconnaît sous la forme d'un médaillon du ciel de lit. On retrouve ce geste sur toutes les Adorations des porches bretons du XVe siècle (Rumengol, Le Folgoët)
Balthazar, couronné, imberbe comme il se doit, offre la myrrhe. Il est vêtu d'une tunique courte recouverte par un manteau à manches très larges.
Enfin, assis sur le sol mais accoudé à son siège, Joseph tenant sa canne, somnole près de l'âne et du bœuf.
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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PANNEAUX SEMBLABLES DANS LES COLLECTIONS.
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Plus de cent exemplaires de l'Adoration en albâtre subsistent.
Victoria & Albert Museum 1. Panneau de la seconde moitié du XVe siècle qui proviendrait de l'abbaye de Montier-en-Der, Haute Marne.
Notez les grelots de la ceinture de Balthasar.
VAM
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Victoria & Albert Museum 2.
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Victoria & Albert Museum 3. Provient d'Espagne. Seconde moitié du XVe siècle.
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Notez la couleur de peau de Balthazar, tradition ayant débuté en Allemagne au début du XVe siècle.
III. L'ASSOMPTION DE LA VIERGE. SAINT THOMAS RECEVANT LA CEINTURE. Albâtre de Nottingham, trace de polychromie, fin XVe.
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La Vierge, nimbée, occupe le centre d'une mandorle rayonnante et est guidée vers son Assomption par six anges, dont deux tiennent sa couronne ; deux autres, mains jointes, portent un diadème sommé d'une croix.
Elle est vêtue, comme sur les autres panneaux, d'une chape et d'une robe moulante. Le fermail de la chape est losangique à quatre lobes. Elle n'est pas voilée et ses cheveux sont dénoués. Ses mains, aux longs doigts sont écartées, dans une geste de prière, mais qui reprend le geste d'acceptation de l'Annonciation.
Les chaussures sont à extrémités pointues, selon la mode du XVe siècle.
En bas à gauche, un ange présente à la Vierge l'apôtre Thomas, qui tient une ceinture frappée d'ornements floraux. Ce détail, qui se retrouve sur presque toutes les Assomptions en albâtre de Nottingham du XVe siècle, relève de la tradition issue des évangiles apocryphes des ve et vie siècles. Jacques de Voragine indique dans sa Légende dorée :
"Et Jésus dit : « Lève-toi, ma mère, ma colombe, tabernacle de gloire, vase de vie, temple céleste, afin que, de même que tu n’as point senti la souillure du contact charnel, tu n’aies pas non plus à souffrir la décomposition de ton corps ! » Et l’âme de Marie rentra dans son corps, et la troupe des anges l’emporta au ciel. Et comme Thomas, qui n’avait pas assisté au miracle de l’assomption, refusait d’y croire, voici que la ceinture qui entourait le corps de la Vierge tomba du ciel dans ses mains, intacte et encore nouée, de manière à lui faire comprendre que le corps de la Vierge avait été emporté tout entier au ciel."
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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PANNEAUX SEMBLABLES DANS LES COLLECTIONS.
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Victoria & Albert Museum 1. Seconde moitié du XVe siècle
Dieu le Père accueille la Vierge, entouré d'un ange jouant d'une viole avec un plectre et d'un autre de la harpe. Un ange soutient les deux pieds chaussés de Marie. La Vierge porte un bandeau sur la tête, une robe surmontée d'une tunique courte frappée d'hermines et un manteau attaché d'une manière inhabituellement élaborée par une cordelette ; les extrémités du cordon sont maintenues ensemble par une bascule et bouclées.
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Victoria & Albert Museum 2. Seconde moitié du XVe siècle
Le registre supérieur est semblable au panneau précédent. Mais ici, saint Thomas regarde la Vierge, les mains jointes en prière, et reçoit une extrémité de la ceinture, qui est montrée débouclée au moment de tomber, la boucle étant visible sous sa taille à droite.
. Victoria & Albert Museum 3. Seconde moitié du XVe siècle
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Ce panneau très haut représente la Vierge portant un bandeau sur la tête, une robe moulante et un manteau retenu comme sur le premier panneau par un cordon à pompons. Elle se tient dans une mandorle sculptée de rayons qui se trouve au dessus du sol au centre du panneau. Elle est flanquée de trois paires d'anges qui la désigne, chacun avec un bras tendu. Le personnage barbu de saint Thomas, tourné vers la gauche, est agenouillé à ses pieds entre deux personnages agenouillés, tonsurés, cagoulés sur les épaules (moines donateurs tenant un phylactère). Saint Thomas lève les yeux, tenant dans sa main gauche le fermoir de la ceinture de la Vierge, représentée débouclée, au moment de tomber de sa taille, la boucle visible à gauche. La figure auréolée et barbue de Dieu le Père se trouve en haut du panneau au-dessus d'une division indiquant le ciel. Il est flanqué d'un ange à gauche jouant d'une petite harpe et d'un ange à droite jouant d'une viole avec un plectre.
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Victoria & Albert Museum 4.
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Saint Thomas est absent. La Vierge, déjà couronnée, se tient debout, les mains jointes en prière, au centre du panneau dans une mandorle sur laquelle est incisé un motif en zigzag. Elle a un visage à la mâchoire carrée et porte une robe et une cape. La mandorle est tenue par trois paires d'anges, une paire agenouillée et deux volants. Les paupières de la Vierge sont sculptées. Dieu le Père, couronné et barbu et la main droite levée en signe de bénédiction, se trouve au sommet du panneau, au-dessus d'un large rebord horizontal ondulé indiquant le ciel. Il est flanqué de deux anges dont les mains sont écartées dans une attitude de prière.
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Cluny. Fin XVe. Cl19332
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Saint-Péver.
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Proximité avec Kermaria an Iskuit.
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Nouvoitou.
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Proximité avec Victoria & Albert Museum 1.
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Guern, Notre-Dame de Quelven.
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IV. LE COURONNEMENT DE LA VIERGE PAR LA TRINITÉ. Albâtre de Nottingham, trace de polychromie, fin XVe.
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Le Vierge, nimbée, est assise, entre deux anges musiciens, l'un jouant de la harpe, l'autre d'un tambourin. Elle est vêtue d'un manteau et d'une robe moulante à col rond, et a les mains écartées comme sur deux des panneaux précédents.
La couronne est posée par le Christ et le Père, tous les deux nimbés, assis sur leur trône, et traçant une bénédiction. Le Christ glorieux est vêtu du manteau de la Réssurection et tient l'étendard de sa victoire sur la Mort. Dieu le Père est couronné. La colombe du Saint-Esprit descend verticalement poser son bec sur la croix qui somme la couronne.
Le Père et le Fils sont représentés de face, mais avec le corps légèrement incliné vers la Vierge.
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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PANNEAUX SEMBLABLES DANS LES COLLECTIONS.
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Victoria & Albert Museum.
Les collections du VAM renferment 11 exemples du Couronnement de la Vierge par la Trinité, mais tous différent, par la posture du Père et du Fils, par l'absence de la colombe ou d'un des deux personnages, ou par l'absence d'anges musiciens, du panneau de Kermaria.
L'ensemble de Saint-Péver était jusqu'à présent le plus proche de celui de Kermaria, mais son Couronnement est bien différent, et rejoint les spécimen du VAM : le Père et le Fils sont tournés vers la Vierge, le Père tient l'orbe, et les anges musiciens sont absents. La colombe est au centre d'une mandorle rayonnante.
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Nouvoitou.
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Là encore, le panneau est différent de celui de Kermaria : posture du Père et du Fils tournés vers le centre, Esprit-Saint à forme humaine semblable aux deux autres parties de la Trinité et en adoptant le geste de bénédiction. Mais les anges musiciens sont là, l'un jouant de la harpe et l'autre d'un instrument à préciser.
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V. LA VIERGE DE PITIÉ OU DÉPLORATION À CINQ PERSONNAGES . Bas-relief, albâtre, traces de polychromie, XVe siècle.
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La Vierge, enveloppée dans son manteau formant voile, est penchée sur le côté droit vers son Fils, dont elle soutient le buste. Ce dernier est allongé sur ses cuisses, les jambes fléchies, le bras droit pendant le long de la jambe de sa mère, le bras gauche soulevé vers son épaule. Ses chaussures pointues attestent de la datation au XVe siècle.
Un personnage est agenouillé à gauche, soutenant la tête du Christ, la tête coiffée d'un bandeau, le corps enveloppé dans un manteau. Ce pourraît être Marie-Madeleine, même si nous ne voyons ni ses cheveux dénoués, ni son vase de parfum.
Un deuxième personnage est debout derrière elle. Sa tête est brisée. C'est l'emplacement habituel de saint Jean.
Du troisième personnage ne subsiste que le buste et le geste des deux mains, l'une posée sur le genou du Christ. Une sainte femme ? Nicodème ?
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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PANNEAUX SEMBLABLES DANS LES COLLECTIONS.
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Je n'ai trouvé aucun panneau comparable. La Lamentation du Victoria et Albert Museum est bien différente. On peut donc s'étonner de trouver à Kermaria un panneau dont la production à Nottingham n'est pas attestée ailleurs.
Victoria & Albert Museum.
Lamentation sur le Tombeau : La Vierge entre Marie-Madeleine et Marie Cléophas.
"Le Christ mort, vêtu d'un pagne et d'un torse, repose de gauche à droite sur les genoux de la Vierge, la tête soutenue par sa main droite. Ses bras sont à ses côtés et ses jambes pendent à angle droit. La Vierge, vêtue d'une robe et d'un voile sur la tête qu'elle retient par sa main gauche, est assise sur le tombeau et regarde le Christ. Une silhouette (sans tête) à gauche du panneau, vêtue d'une robe moulante et d'un manteau et tenant apparemment une mèche de cheveux dans sa main droite, est vraisemblablement Marie-Madeleine. Derrière le tombeau, à droite du panneau, se trouve une figure féminine voilée, vêtue d'une robe et tenant un livre fermé dans sa main gauche, et regardant le Christ ; il s'agit probablement de Marie Cléophas. Un crâne, deux os croisés et une mâchoire au premier plan du panneau signifient sans doute le Golgotha, le lieu du crâne. Il manque le haut du panneau et présente une fente verticale à gauche de la tête de la Vierge. "
Panneau en albâtre représentant la Lamentation sur le Christ mort. Angleterre, XVe siècle.
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VI. PERSONNAGE MONASTIQUE BÉNISSANT ET TENANT UN [LIVRE].
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Le retable de la Vie de la Vierge ( cinq bas-reliefs en albâtre, traces de polychromie, dernier quart XVe siècle) de la chapelle de Kermaria an Iskuit à Plouha. Photographie lavieb-aile 2023.
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CATALOGUE DES ALBÂTRES BRETONS (d'après C. Dréan).
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Les albâtres de Bretagne ont été catalogués, datés et décrits par Colette Dréan. La majorité date de la seconde moitié du XVe siècle. Les retables de la Vie de la Vierge, dont j'ai placé les éléments en rouge, ne sont pas complets et souvent réduits à un ou deux panneaux. Les plus intéressants, en comparaison avec le retable de Kermaria, sont ceux de Saint-Péver et de Nouvoitou.
Côtes d'Armor
Châtelaudren Chapelle Notre-Dame -du-Tertre. Retable volé en 1969. Deuxième moitié du XVe siècle.
Châtelaudren Chapelle Notre-Dame -du-Tertre. Vierge à l'Enfant, début XVIe ?
Corlay, presbytère, v. 1428 Ste Anne et la Vierge
Dinan, Musée, seconde moitié XVe. Descente de croix ; Ste Catherine.
Lanvollon, Vierge à l'Enfant, fin XIVe
Pléherel église du Vieux-Bourg, fin XVe
Ploubezre chapelle Saint-Thècle fin XVe
Plougrescant Chapelle Saint-Gomery. Vierge à l'Enfant moitié XVe
Plouha, Chapelle de Kermaria an Iskuit, retable de la Vie de la Vierge, deuxième moitié XVe
Pommerit-le-Vicomte, église, Retable de la Passion, fin XVe
Rostrenen, chapelle de Compostal, Arbre de Jessé , Assomption et Couronnement de la Vierge, deuxième moitié XVe
Saint-Brieuc, ancien Carmel, Crucifixion, deuxième moitié XVe
Saint-Laurent de Bégard, église, Baiser de Judas, deuxième moitié XVe
Saint-Pever, Retable de la Vie de la Vierge : Trinité, Assomption, Couronnement.fin XVe
Squiffiec, Retable de la Vie de la Vierge : Adoration des Mages, Couronnement.fin XVe
Finistère
Cléden-Cap-Sizun
Combrit
[Elliant, chapelle Sainte Marguerite : hors catalogue, cité in Couffon 1980 p. 105 : Assomption de la Vierge avec saint Thomas]
Esquibien, église Saint-Onneau, Vierge de Pitié, ronde-bosse, milieu XVe. Volée en 1980.
Locquirec, église Saint-Jacques Vierge de Pitié, fin XVe (Vierge à l'Enfant selon R. Couffon)
Morlaix, Musée des Jacobins, Visitation, Trinité, Mise au tombeau, deuxième moitié XVe
Morlaix, couvent des Carmélites, Assomption, deuxième moitie XVe
Plonevez-du-Faou, chapelle Saint-Herbot, Annonciation, volée en avril 1969 [et Couronnement, non confirmé], deuxième moitié XVe.
Plouvorn, N-D de Lambader, élus dans le sein d'Abraham, deuxième moitié XVe. (Non retrouvé lors de ma visite, non confirmé)
Quimperlé, musée de l'Évêché, Ste Anne, Annonciation, Couronnement, deuxième moitié XVe
Quimper, cathédrale, Saint Jean-Baptiste, première moitié XVe
Quimper, cathédrale, retable du Christ et des Vertus, Xve
Quimper, Musée départemental breton, Baiser de Judas, Flagellation, deuxième moitié XVe
Roscoff, église de Croas-Batz, Retable de la Vie du Christ deuxième moitié XVe
Trémaouézan, presbytère, Adoration des Mages entre 1350 et 1390
Ille-et-Vilaine
Nouvoitou Retable de la Vie de la Vierge : Annonciation, Adoration, Trinité, Assomption, Couronnement fin XVe
La seule description spécifique de cette statue se trouve sur la base Palissy sous le titre "Vierge à l'Enfant allaitant" : il y est seulement indiqué qu'elle est en bois et date du XVIe siècle, qu'elle a été restaurée, et classée depuis le 13 octobre 1960. La notice est illustrée d'une photo noir et blanc (de 2013?).
Il me semble qu'on puisse la décrire davantage. On peut d'abord la rapprocher de la quinzaine de statues de "Vierge au sein", "Vierge à l'Enfant allaitant" ou Virgo lactans décrits dans mes liens, principalement en Finistère, mais aussi, pour les Côtes d'Armor, à Châtelaudren.
On peut ensuite en mentionner le propos théologique, car ces représentations d'allaitement permettent de mettre en scène la double nature, divine et humaine du Christ. Selon les cas, ce sera le premier aspect qui sera souligné, et l'Enfant sera représenté tourné vers le sein, y posant tendrement la main, voire le têtant. Ou au contraire, comme ici, l'Enfant s'en détournera plus ou moins ostenciblement pour se tourner vers le Monde et sa mission de Salut de l'Humanité.
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Rappel du thème scripturaire selon Séverine Ferraro 2012 :
Le récit de la Nativité livré par l’Évangile selon saint Luc ne fait pas mention de l’allaitement de l’Enfant par la Vierge. Cependant, l’auteur y fait allusion plus tardivement lorsqu’il relate certains enseignements que Jésus prodigue au peuple, juste après le repas chez Marthe et Marie. Enthousiasmée par ses paroles, une femme s’écrie alors : « […] Heureux le sein qui vous a porté, et les mamelles que vous avez sucées ! » .
Au contraire de l’évangile canonique, plusieurs sources textuelles font état de l’allaitement de l’Enfant dans le cadre du récit de la Nativité. Parmi les évangiles apocryphes relatifs à l’Enfance du Christ, cet aspect particulier est mentionné par le Protévangile de Jacques, puis par la Vie de Jésus en arabe et l’Évangile arménien de l’Enfance, le dernier précisant, en outre, que le nouveau-né s’est assis de lui-même après avoir pris le sein de sa mère.
Il convient de mentionner ici l’existence d’un autre évangile apocryphe, contemporain du Protévangile, qui évoque le thème de l’allaitement de l’Enfant. Il s’agit d’un texte connu sous l’appellation d’Ascension d’Isaïe, qui se compose de deux parties distinctes. La première relate le martyre du prophète tandis que la seconde révèle ses visions, dont celle de la naissance du Christ. L’auteur précise que Jésus « […] tétait comme un enfant, il tétait selon l’usage, afin de ne pas être connu » . Dans ce texte, l’allaitement ne constitue pas un geste naturel mais un acte délibéré destiné à cacher aux yeux du monde la divinité du nouveau-né.
Le thème de l’allaitement est ensuite réutilisé d’une manière plus allusive par Maxime le Confesseur dans sa Vie de la Vierge. L’auteur précise qu’après avoir été emmailloté dans des bandelettes, « Celui qui nourrit tout était nourri de lait […] » .
D’une manière analogue, l’Arbre de vie de saint Bonaventure indique que l’Enfant était « nourri de lait virginal » sans pour autant évoquer l’acte de l’allaitement en lui-même.
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On peut aussi rappeler que ces images peuvent faire l'objet d'une contemplation mystique d'Imitation du Christ, et d'aspiration à être nourri métaphoriquement par la Vierge, dans cet élan de spiritualité illustré par la scène de la Lactation de saint Bernard de Citeaux.
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Retable de Palma de Majorque, 1290
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Lactation de saint Bernard , Recueil de droit canon, XVe s. Le pape Clément V y est représenté entre deux moines cisterciens ; celui de gauche est saint Bernard, en prière devant la vierge : l'Enfant Jésus se détourne du sein de sa mère et Bernard reçoit quelques gouttes de lait. Cote Troyes - BM - inc. 041
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DESCRIPTION.
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La Vierge est assise sur une cathèdre recouverte de son manteau bleu clair. Sa tête est légèrement inclinée et penchée vers la tête de son Fils, et elle lui présente son sein droit, tenant le mamelon entre index et majeur selon un geste souvent retrouvé dans l'iconographie.
Ses cheveux bruns sont recouverts d'un voile blanc qui passe derrière sa nuque, regroupant ainsi ses nattes avant que celles-ci s'échappent devant les épaules : ce "bandeau rétro-occipital" (pour lui donner un nom) est très fréquemment retrouvé sur les Vierges à l'Enfant bretonnes du XVIe siècle.
Le visage est serein et attentif, les traits sont tendres et maternels, malgré le front et les sourcils épilés conforment à la mode de l'époque. La posture d'allaitement est parfaitement saisie, dans toute son humanité.
Le manteau bleu revient en pans qui révèlent leur revers rouge. La robe est toute dorée, avec un décolleté carré (lancé par Anne de Bretagne), une ceinture bleue nouée, et un revers rouge identique à celui du manteau. C'est l'aspect actuel après restauration, il faudrait disposer du dossier technique de celle-ci pour savoir quels étaient les indices renseignant sur l'état et les pigments d'origine.
Les solides chaussures noires, habilement dévoilées par le plissé et l'alliance des couleurs bleu, rouge et or, sont propres à l'art du XVIe siècle, et on les retrouve aussi sur les groupes d'Anne trinitaires.
L'Enfant témoignent de son tendre attachement à sa Mère par son bras droit et sa main posée sur son cou, mais son visage et son regard se détournent tandis que la main gauche s'interpose entre sa bouche et le sein maternel. Les jambes croisées accentuent cet élan de refus, comme s'il s'apprêtait à s'éloigner.
Il est vêtu d'une tunique rouge à revers sombre, entrouvert sur son corps nu, et aux manches retroussées.
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SOURCES ET LIENS.
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— AUBERT (Octave Louis), [1928] , La chapelle de Kermaria-Nisquit, édition de la Bretagne touristique, 16 pages.
—COUFFON, René. Répertoire des églises et chapelles du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier. Saint-Brieuc : Les Presses Bretonnes, 1939. p. 374-375
—COUFFON, René. Quelques notes sur Plouha. Saint-Brieuc : Francisque Guyon éditeur, 1929. p. 27-35
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3346690r
— FERRARO (Séverine), 2012. Les images de la vie terrestre de la Vierge dans l’art mural (peintures et mosaïques) en France et en Italie : des origines de l’iconographie chrétienne jusqu’au Concile de Trente. Art et histoire de l’art. Université de Bourgogne, 2012.
https://theses.hal.science/tel-00841816/document
—LE LOUARN-PLESSIX (Geneviève ) , 2013, Plouha, Chapelle de Kermaria an Iskuit Mémoires SHAB
—LÉVY (Tania), 2015, « La chapelle Kermaria-an-Isquist. Les peintures murales », Congrès archéologique de France. 173e session. Monuments des Côtes-d'Armor. « Le Beau Moyen Âge ». 2015, Société française d'archéologie, pp. 303-311 (ISBN 978-2-901837-70-1).
— PICHOURON ( Patrick) - L'HARIDON ( Erwana) 2005, La chapelle de Kermaria-an-Isquit Inventaire général ; Dossier IA22005349
"La chapelle Kermaria-an-Isquit a été fondée au cours de la 1ère moitié du 13ème siècle par Henry d'Avaugour, comte de Goëlo. Elle a été agrandie au 15ème siècle...
— THIBOUT (Marc), 1949, « La chapelle de Kermaria-Nisquit et ses peintures murales », Congrès archéologique de France. 107e session. Saint-Brieuc. 1949, Société française d'archéologie, 1950, p. 70-81.
Le porche sud de Kermaria est surmonté d'une secrétairerie, une chambre couverte d'un toit en auvent où se réunissait le conseil de fabrique qui y conservait ses archives, et qui servait aussi d'auditoire où les seigneurs de Lizandré-Kermaria, à partir de 1548, rendaient la justice ou recevait l'hommage depuis la galerie ajourée. On y accède par un escalier du collatéral sud.
À l'extérieur, deux niches surmontées de dais recevaient encore au début du XXe siècle les statues en bois de saint Pierre et saint Paul, très abimées par le temps : elle sont conservées à l'intérieur de la chapelle.
Le porche lui-même s'ouvre sur une large baie en ogive, supportée de part et d'autre par de fines colonnettes. À l'intérieur, les niches abritent les statues en bois polychrome de onze apôtres, mais aussi des statues en pierre d'anges porteurs des instruments de la Passion, tandis qu'une Vierge à l'Enfant domine la porte d'entrée. Enfin la voûte est peinte d'anges chantant des cantiques mariaux.
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Datation.
La construction de la chapelle avait débuté à la fin du XIIIe siècle par les quatre premières travées de la nef. Elle se poursuivit à la fin du XVe siècle, notamment par celle du porche.
Le décor sculpté des statues contenues dans les niches, de celles de la Vierge et des six culots aux personnages en buste est de style homogène malgré un matériau différent dans deux statues d'anges : il est vraisemblablement contemporain de la construction du porche lui-même.
Les statues des apôtres sont-elles de la même époque ? Leur caractère rustique m'en persuade.
N.B. Pour Geneviève Le Louarn-Plessix (2013), la datation des agrandissements, et notamment du porche, doit être révisée et ramenée au XIVe siècle :
"La datation du XVe siècle de la partie orientale de la nef et de la chapelle sud demande aujourd’hui à être réexaminée à la lueur des travaux des historiens de l’architecture. En effet, le vocabulaire décoratif et architectural utilisé dans la partie est de la nef comme dans le porche sud ; les arcs aux rouleaux à grands chanfreins, la balustrade à quadrilobes, les baies du collatéral nord comme celles de la chapelle sud (hormis celle ouverte en 1720) – notamment la grande baie sud rétrécie au XVIe siècle – et surtout l’encadrement de la porte ouest du transept sud avec ses gros tores réunis en sifflet à la base sont des caractères absolument représentatifs du début du XIVe siècle. L’encadrement de la grande porte occidentale amplifie en la multipliant cette exceptionnelle modénature.
Dans le porche sud (surmonté d’une secrétairerie, à la fois salle d’archives et du trésor), les niches du mur oriental sont comparables aux arcs des triforium de la nef de la cathédrale de Tréguier (*) et du chœur de Notre-Dame de Lamballe (vers 1350) ou encore les arcades du porche de Saint-Catherine de La Roche-Derrien (daté 1326). Au centre, la séparation d’entre deux niches est sculptée de part et d’autre de deux chevaliers portant épées. L’asymétrie des deux murs latéraux doit être signalée : à l’ouest, des fausses niches simulées par de simples gables tréflés, à l’est des vraies niches.
(*) Même les gros supports intérieurs : piles octogonales, doubles rouleaux à chanfrein des arcs pénétrant directement dans les supports ou chapiteaux feuillagés sont identiques aux supports de la nef de la cathédrale de Tréguier datée de la première moitié du XIVe siècle. La parenté entre les deux chantiers est, en de nombreux points, évidente."
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Restauration.
Une première tranche des travaux de restauration du porche, commencés en décembre 2022, s'est achevée en mai 2023 sous la direction de Nicolas Clairand, architecte du patrimoine, des élus et des entreprises A.R.T groupe Villemain, de Plélo, pour la maçonnerie, Moullec, de Lamballe, pour la charpente et Macé, de Trégueux, pour la couverture. L'auvent frontal, qui avait disparu, a été reconstitué.
Une seconde tranche de cinq mois doit débuter en septembre 2023. Concernera-t-elle la statuaire ?
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Plan.
On remarquera la différence des deux côtés droit et gauche du porche. Du côté est, une série de colonnes hexagonales et d'arcades délimite, en profondeur dans le mur, un espace ajouré reservé aux statues des apôtres. À l'ouest, sans que je connaisse la raison de ce choix, les statues sont placées sur des consoles supportées par des colonnes engagées, et sont séparées par un décor en moyen-relief formant des niches.
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Ordonnancement.
Ces onze statues ne sont par ordonnancées comme dans les autres porches, où saint Pierre, qui débute la série, est placé à droite de la porte d'entrée. En outre, aucun apôtre ne tient de phylactère, comme c'est la règle ailleurs, dans le cadre de la séquence de douze articles du Credo apostolique.
Saint Pierre est au contraire placé à gauche, au premier rang pour le visiteur venant de l'extérieur. Puis viennent André, Jacques le Majeur et Jean, ce qui est conforme à l'ordre habituel. Cela se complique ensuite.
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Détermination.
Ces statues ne sont décrites par aucun des auteurs cités en source. Seul le site Infobretagne en propose une identification, sans citer sa source.
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Iconographie : les photos et cartes postales du Musée de Bretagne :
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Anonyme. Les niches extérieures ont encore leur statue.
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Mancel Albert (18 septembre 1858 - 31 janvier 1942) (Editeur) ; Binic-Étables-sur-Mer.
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La série du côté droit était complète au début du XXe siècle.
Editions J.B. Barat (Editeur) ; Saint-Quay-Portrieux. Jean-Baptiste Barat (1855 - 1931)
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Je débuterai la description par le côté gauche. On remarquera que la polychromie actuelle est homogène et se réduit du côté gauche à quatre couleurs principales, rouge, jaune, blanc et noir, tandis que du côté droit la couleur bleu-vert apparaît.
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I. LES APÔTRES DU CÔTÉ GAUCHE DU PORCHE.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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1. Saint Pierre et sa clef. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Je remarque l'orientation verticale de la clef, des doigts de la main gauche, des plis, ou des pieds. La main gauche est très longue, un caractère stylistique que nous allons retrouver plusieurs fois. Autre trait d'atelier, la collerette, indépendante du manteau. Le "toupet", ilot capillaire de la calvitie fronto-temporale, n'a pas été oublié, et s'affirme encore une fois comme un véritable attribut du premier apôtre.
Une poche d'étoffe est suspendue sous la ceinture plate. L'absence du livre est à noter.
Couleurs employées : le rouge du manteau, le jaune de la tunique, le noir des traits du visage et de la barbe.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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2. Saint André et sa croix en X. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Le manteau rouge revient en pan, attaché au poignet, du côté gauche. La tunique jaune possède une large collerette rouge. La croix, de grande taille mais aux branches asymétriques, est tenue devant le corps. Le livre est tenu fermé.
Le visage se distingue surtout par la chevelure fournie, en triangle sur les épaules, et par la barbe, peignée, pointue et divisée en deux pointes.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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3. Saint Jacques le Majeur et sa tenue de pèlerin de Compostelle. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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La pèlerine forme un camail couvrant largement les épaules, au dessus de la tunique rouge serrée par une ceinture plate. Le bourdon est brisé, et c'est la gourde-calebasse bilobée en coloquinte qui attire l'attention, car elle est suspendue par un crochet à la ceinture.
Pas de livre.
Visage proche du précédent, avec des cheveux bouclés et une barbe plus pointue.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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4. Saint Jean et sa coupe de poison. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Manteau rouge à col rabattu, tunique ras-du-cou blanc crème, main droite bénissant la coupe de poison d'où émerge une tête de serpent-dragon. Pas de livre.
Visage imberbe comme il se doit.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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5. Saint Barthélémy, curieusement imberbe, avec son couteau de dépeçage. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Manteau rouge, tunique blanc-crème à encollure, bouton et ceinture. Livre tenu sous l'aisselle droite, coutelas .
Visage jeune et imberbe encadré par de généreuses boucles.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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6. Saint Philippe, curieusement, imberbe, tenant la hampe de sa [croix] . Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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À partir de cette statue, les manteaux deviennent plus complexes, s'enrichissent d'épaulettes et se découpent, comme ici, en pans devant le thorax. La tunique à col rabattu est fermé par trois gros boutons ronds.
L'attribut habituel de Philippe est une croix à longue hampe. Ici, l'extrémité est brisée (*). La hampe est sculptée d'un nœud. Le livre est tenu dans la main gauche.
(*) Il pourrait s'agir aussi d'une lance, ou du bâton de foulon de Jacques le Mineur
Visage imberbe, ovale, encadré d'une épaisse chevelure.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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II. LES APÔTRES DU CÔTÉ DROIT DU PORCHE.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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7. Saint Simon et sa scie. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Le manteau, de couleur verte; est porté sur l'épaule droite, puis revient par la gauche se faufiler à la ceinture. La tunique jaune est à col rabattu et petits boutons. Attributs : la scie et le livre.
Visage noble à barbiche longue.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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8. Saint Matthieu avec sa hache. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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À nouveau, le manteau rouge ne couvre que l'épaule droite (par son attache à bouton) puis réapparait en pan attaché au poignet gauche. La tunique vert-bleu est tailladée au niveau de la manche droite.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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9. Saint Jacques le Mineur avec une croix renversée. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Jacques le Mineur tient habituellement le bâton de foulon, dilaté à son extrémité. On peut donc aussi penser ici à saint Philippe.
Le manteau bleu, de forme complexe, associe des éléments rapportés couvrant les épaules, une encolure (qui appartient plutôt à la tunique ?, des manches très larges et des pans flottants. La tunique se ferme par des boutons ronds. Livre tenu de la main droite.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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10. Saint Jude avec un bâton (une lance). Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Manteau bleu-vert couvrant les épaules. Tunique rouge à col large et boutons. Livre ouvert sur la poitrine.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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11. Saint Thomas et son équerre. Bois polychrome, fin XVe siècle ?
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Le manteau jaune clair est complexe, avec des découpes croisées sur la poitrine. La tunique rouge est à encolure large plissée, avec des boutons ronds passés dans des boutonnières en languettes.
Attributs : le livre et l'équerre.
Beau visage à barbichette peignée et cheveux bouclés.
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Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Les statues d'apôtres (bois polychrome, fin XVe ?) de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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12. Dernière niche, vide.
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On lit partout qu'elle était occupée par une statue de saint Luc, volée en 1907. Pourquoi saint Luc, évangéliste et non apôtre ? C' est bien surprenant.
Chardin dénombrait bien douze statues d'apôtres en 1894. Octave-Louis Aubert écrivait, en 1928, que "Ceux-ci ne sont plus que onze. L'un d'eux a été volé, il y a quelques années."
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Le porche de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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LES STATUES DE PIERRE ET PAUL DES NICHES EXTÉRIEURES, CONSERVÉES À L'INTÉRIEUR, TRANSEPT SUD.
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Ce sont des œuvres du même atelier que les statues du porche, et on retrouve ici la façon de traiter la chevelure et les barbes, tout comme les tuniques à ceinture plate.
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Saint Paul.
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Statue de saint Pierre, bois, chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile .
Statue de saint Pierre, bois, chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile .
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Saint Pierre.
identifié par son toupet...
Statue de saint Paul, bois, chapelle Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile .
Statue de saint Paul, bois, chapelle Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile .
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SOURCES ET LIENS.
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— AUBERT (Octave Louis), [1928] , La chapelle de Kermaria-Nisquit, édition de la Bretagne touristique, 16 pages.
—LÉVY (Tania), 2015, « La chapelle Kermaria-an-Isquist. Les peintures murales », Congrès archéologique de France. 173e session. Monuments des Côtes-d'Armor. « Le Beau Moyen Âge ». 2015, Société française d'archéologie, pp. 303-311 (ISBN 978-2-901837-70-1).
— PICHOURON ( Patrick) - L'HARIDON ( Erwana) 2005, La chapelle de Kermaria-an-Isquit Inventaire général ; Dossier IA22005349
"La chapelle Kermaria-an-Isquit a été fondée au cours de la 1ère moitié du 13ème siècle par Henry d'Avaugour, comte de Goëlo. Elle a été agrandie au 15ème siècle...
— THIBOUT (Marc), 1949, « La chapelle de Kermaria-Nisquit et ses peintures murales », Congrès archéologique de France. 107e session. Saint-Brieuc. 1949, Société française d'archéologie, 1950, p. 70-81.
Le porche sud de Kermaria est surmonté d'une secrétairerie, une chambre couverte d'un toit en auvent où se réunissait le conseil de fabrique qui y conservait ses archives ou celle de la seigneurie, et qui servait aussi d'auditoire où les seigneurs de Lizandré-Kermaria , à partir de 1548, rendaient la justice ou recevait l'hommage depuis la galerie ajourée. On y accède par un escalier du collatéral sud. "C'est là qu'au temps jadis, le dimanche après les offices, autour du sénéchal de la juridiction, se groupaient le Procureur et les Syndics chargés de rendre la haute justice. Les coupables et les plaideurs se tenaient au pied de la croix qui dresse encore son fût sur le parvis de la chapelle. Le jugement était ensuite lu, au peuple assemblé, du haut de la terrasse." (Aubert)
À l'extérieur, deux niches surmontées de dais recevaient encore au début du XXe siècle les statues de saint Pierre et saint Paul, très abimées par le temps : elle sont conservées à l'intérieur de la chapelle.
Le porche lui-même s'ouvre sur une large baie en ogive, supportée de part et d'autre par de fines colonnettes. À l'intérieur, les niches abritent les statues en bois polychrome de onze apôtres, mais aussi des statues en pierre d'anges porteurs des instruments de la Passion, tandis qu'une Vierge à l'Enfant domine la porte d'entrée. Enfin la voûte est peinte d'anges chantant des cantiques mariaux.
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Datation.
La construction de la chapelle avait débuté à la fin du XIIIe siècle par les quatre premières travées de la nef. Elle se poursuivit à la fin du XVe siècle, notamment par le porche.
Le décor sculpté des statues contenues dans les niches, de celles de la Vierge et des six culots aux personnages en buste est de style homogène malgré un matériau différent dans deux statues d'anges : il est vraisemblablement contemporain de la construction du porche lui-même.
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Restauration.
Une première tranche des travaux de restauration du porche, commencés en décembre 2022, s'est achevée en mai 2023 sous la direction de Nicolas Clairand, architecte du patrimoine, des élus et des entreprises A.R.T groupe Villemain, de Plélo, pour la maçonnerie, Moullec, de Lamballe, pour la charpente et Macé, de Trégueux, pour la couverture. L'auvent frontal, qui avait disparu, a été reconstitué.
Une seconde tranche de cinq mois doit débuter en septembre 2023.
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Plan.
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I. LA VIERGE À L'ENFANT AU DESSUS DE LA PORTE D'ENTRÉE, ET SON CULOT. Pierre polychrome, XVe siècle.
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La niche à fines colonnnes aux chapiteaux feuillagés est surmontée d'un gable encadré de pilastres.
La Vierge, couronnée, tient le livre des Écritures dans la main droite et porte sur l'avant-bras gauche son Fils, qui nous fait face. Le manteau bleu, qui voile sa chevelure, rassemble les plis de son pan vers la troussière du poignet puis retombe en plusieurs rangs de plis bouillonnants. Elle porte sur la poitrine un médaillon perlé.
L'Enfant, jambes croisées, est figuré en Sauveur, tenant la sphère du Monde.
La sculpture, dont la nature de la pierre ne peut être précisée (granite??), est peinte d'une polychromie qui s'écaille ; les lèvres carmin et les joues rose foncée ont été recouvertes jadis d'une couche blanche.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Sur le culot en granite polychrome, un buste d'un homme accroupi, au regard noir, est entouré d'un rinceau de vigne où persiste un très beau bleu.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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II. LE CÔTÉ EST : NICHES AUX ANGES PORTEURS D'INSTRUMENTS DE LA PASSION.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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1°) La première niche à partir du portail : ange tenant la croix sur le Golgotha. Granite, reste de polychromie ocre.
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Dans l'encadrement de l'ogive, une niche rectangulaire est aménagée dans l'appareillage des blocs de granite. Un ange s'y avance, grâce à un culot polygonal.
Il est vêtu d'une tunique longue à ceinture plate. Le visage est un peu fruste à cause des grands yeux et d'une bouche sommaire, ou des cheveux taillés très court, en casque.
Il tient une croix qui s'élève depuis un massif crénelé figurant le Golgotha.
La pierre est un granite gris dont la structure apparaît sur la brisure de la main droite. Son grain fin donne un poli aux reflets bleus.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Le culot : buste d'un homme, granite.
Nez épaté, cheveux en boucles formant couronne.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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2°) La deuxième niche à partir du portail : ange tenant les instruments de la Flagellation.
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Cette niche est semblable à la précédente, mais ses pans son évasés et son dais forme un éventail hexagonal. La statue est par contre bien différente par son matériau, un tuffeau clair, mais aussi par son socle : ces caractéristiques se retrouvent sur l'ange de la niche qui lui fait face, témoignant peut-être, dans le même atelier d'une "main" différente des deux anges de l'entrée, à droite et à gauche.
L'ange a perdu sa tête, mais non ses ailes, il est vêtu d'une tunique plissée, dont la ceinture plate laisse retomber une longue extrémité. À cette ceinture est suspendu un ustensile cannelé qui m'intrigue mais que je n'identifie pas ; il serait logique d'y voir un petit instrument de musique.
L'ange porte sur ses épaules les deux instruments de la Flagellation du Christ : le fouet ou flagellum aux lanières nouées (et plombées ?) et les verges.
La pierre est peinte d'ocre jaune clair, uniforme.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Le socle en tuffeau : deux têtes, une coupelle et des instruments de carrier.
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Nouvelle énigme, comment interpréter cette "roue" que présente ces deux têtes jumelles ? Une roue à sept rayons autour d'un essieu, mais qui est convexe comme une coupole et dont le cercle est crénelé d'édentations cubiques.
Et surtout, comment comprendre les deux instruments qui surmontent cet accessoire ? Je crois reconnaître là un marteau de tailleur de pierre, à deux tranchants différents, et un "niveau" en équerre.
Deux personnages en buste tiennent, en position jumelle et spéculaire, la roue (un tamis ???). Derrière celui de gauche se distinguent d'autres motifs sculptés.
Nous retrouverons ces jumeaux sous la statue d'ange qui fait face.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Le culot : buste d'un personnage, granite.
Nez épaté, tête recouverte d'une coiffe; il peut s'agir de l'épouse de l'homme du culot précédent.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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III. LE CÔTÉ OUEST : NICHES AUX ANGES PORTEURS D'INSTRUMENTS DE LA PASSION.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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3°) La première niche à partir du portail : ange tenant la Colonne de la Flagellation. Granite ?
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L'ange, semblable à celui qui porte la Croix, a les mains jointes. Sa colonne naît d'un buisson. La ceinture est plate avec une extrémité verticale renforcée en triangle. Les pieds semblent chaussés.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Le culot : personnage en buste.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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4°) La deuxième niche à partir du portail : ange tenant la lance et ?.
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L'ensemble sculpté est en tuffeau. L'ange a cette coupe de cheveu taillés très court et en casque et cette bouche particulière de l'ange n°1, la tunique plissée évasée du n°2, la ceinture plate de tous, les yeux en amande cernés d'un trait double et la tête carrée aux pommettes anguleuses qui se retrouve sur les jumeaux du socle.
Les doigts de la main gauche sont brisés, ils traçaient peut-être un geste de bénédiction. L'objet tenu par la main droite peut évoquer un calice, malgré un pied rectangulaire. Devant lui s'élève une lance brisée (elle montait jusqu'à sa poitrine), qui est tenue par les deux personnages du socle. Ce serait la lance de Longin, celle qui transperça le flanc droit du Christ lors de la Passion.
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Les traits du visage des deux jumeaux reproduisent ceux de l'ange : même forme carrée, mêmes pommettes saillantes, mêmes yeux, même bouche réduite à un trait en demi-sourire, même fossette du menton. Faut-il les assimiler à d'autres anges?
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Le culot est sculpté, comme les trois précédents, en buste, mais celui-ci se distingue par des cheveux bouclés.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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IV. LES CULOTS DE RETOMBÉE DES NERVURES DE LA VOÛTE.
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Du côté droit : au centre, un personnage en buste semblable aux précédents.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Du côté gauche : au centre, un ange chevauchant une tête. Granite.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Sur le côté : deux dragons affrontés. Granite.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
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Sur le côté : feuillages. Granite.
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Porche (fin XVe) de la chapelle de Kermaria an Iskuit. Photographie lavieb-aile.
—LÉVY (Tania), 2015, « La chapelle Kermaria-an-Isquist. Les peintures murales », Congrès archéologique de France. 173e session. Monuments des Côtes-d'Armor. « Le Beau Moyen Âge ». 2015, Société française d'archéologie, pp. 303-311 (ISBN 978-2-901837-70-1).
— PICHOURON ( Patrick) - L'HARIDON ( Erwana) 2005, La chapelle de Kermaria-an-Isquit Inventaire général ; Dossier IA22005349
"La chapelle Kermaria-an-Isquit a été fondée au cours de la 1ère moitié du 13ème siècle par Henry d'Avaugour, comte de Goëlo. Elle a été agrandie au 15ème siècle, puis au début du 18ème siècle par le chapelain de l'époque Jean Huet. Vendue le 16 fructidor de l'an IV (septembre 1796), elle a été rachetée par la fabrique et rendue au culte en 1812. Réputée pour sa danse macabre du 15ème siècle, elle a été classée au titre de la législation sur les monuments historiques le 6 juillet 1907 et restaurée de 1958 à 1976. Les quatre premières travées de la nef et de ses collatéraux remontent à la fondation de la chapelle. Au cours du 15ème siècle, la nef et ses collatéraux ont été prolongés de trois travées et l'édifice a été augmenté d'un porche et d'une aile au sud. L'étage du porche servait de secrétairerie à l'origine, puis il a servi d'auditoire à partir de 1547 pour la seigneurie de Lizandré-Kermaria. Enfin, Jean Huet, chapelain de Kermaria-an-Isquit, entrepris plusieurs travaux au cours du 1er quart du 18ème siècle, dont la construction de l'actuelle flèche en 1702, due au maître charpentier Pierre Le Clerc (d'après René Couffon), le percement d'une baie en 1720 (porte la date) et la reconstruction du choeur en 1721 (d'après inscription).
Chapelle de style gothique régional construite en moellons de granite, grès et schiste et grand et moyen appareil de granite. Elle comprend une nef à sept travées accostée de deux bas-côtés, sur cinq travées au sud et sur toute la longeur de la nef au nord, un porche à étage et une aile en retour d'équerre au sud et un chevet à trois pans. L'espace intérieur de la nef est couvert par une charpente lambrisée en berceau brisé avec entraits à engoulants apparents et les bas-côtés nord et sud sont couverts d'un lambris en demi-berceau lambrissé. Le couvrement du porche sud est formé par une voûte sur croisée d'ogives."
— THIBOUT (Marc), 1949, « La chapelle de Kermaria-Nisquit et ses peintures murales », Congrès archéologique de France. 107e session. Saint-Brieuc. 1949, Société française d'archéologie, 1950, p. 70-81.
:
1) Une étude détaillée des monuments et œuvres artistiques et culturels, en Bretagne particulièrement, par le biais de mes photographies. Je privilégie les vitraux et la statuaire. 2) Une étude des noms de papillons et libellules (Zoonymie) observés en Bretagne.
"Il faudrait voir sur chaque objet que tout détail est aventure" ( Guillevic, Terrraqué). "Les vraies richesses, plus elles sont grandes, plus on a de joie à les donner." (Giono ) "Délaisse les grandes routes, prends les sentiers !" (Pythagore)