La mineuse Phyllocnistis des Peupliers blancs des fourrés à Troène de l'arrière-dune de La Palue (Crozon).
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PRÉSENTATION.
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En position arrière-dunaire s’étend à la Palue un fourré à Troène (Ligustrum vulgare). Ces fourrés à Troène proviennent d’une introduction ancienne, en liaison avec les plantations de peupliers blancs (Populus alba) effectuées au début du XXème siècle.
Ces plantes importées, comme le Tamaris, font aujourd’hui partie du paysage mais sont des plantes invasives qu'il convient de contenir le plus possible. (Natura 2000). "Le Troëne, le Peuplier blanc et le Tamaris participent à la fermeture des zones arrière dunaires et seront régulées dans le cadre de l’entretien et de la réouverture de certains secteurs."
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Depuis la fin de l'été 2022, des traces sinueuses sont apparues sur les feuilles de Peuplier blanc. Elles ressemblent à un tracé de labyrinthe. En effet, ces empreintes blanches centrées par une ligne noire forment des boucles sans jamais se croiser. Ce couloir en épingles à cheveux se termine au bord de la feuille par une aire de stationnement, plus large, au centre sépia. Le rebord de la feuille s'y replie légèrement en auvent. Certaines feuilles ne sont couvertes qu'en partie par ces écritures cabalistiques, mais le scribe, ou je ne sais quel moine copiste, est parfois parvenu à couvrir l'ensemble de la surface et à en effacer totalement la coloration verte. Si bien que l'avers des feuilles du peuplier deviennent aussi blanches que leur envers.
C'est bien singulier, non ?
Le commissaire Lavieb est parvenu, après une longue enquête, à déterminer certains suspects, qui appartiennent tous à la même famille.
"Ces individus qui détériorent les espaces verts par leurs tags intempestifs sont bien connus par nos services, nous les nommons les "Mineuses". Ce sont en fait des larves d'insectes de quelques millimètres qui sont addicts de la chlorophylle, qu'ils chapardent en broutant des galeries dans l'épaisseur des feuilles en causant des dégâts parfois graves. Certaines de ces tagueuses sont des chenilles de micro-lépidoptères, certaines des fausses chenilles de tenthrèdes, d'autres des larves de Diptères (Mouches)."
"Mais mon enquête cible la famille des Gracillariidés, et plus particulièrement le genre Phyllocnistis. Je vous ai préparé un dossier de presse.
LES MINEUSES FOLIAIRES.
« Mineuse » ou insecte mineur (Leaf miner en anglais) est un nom vernaculaire ambigu désignant en français principalement des larves de mouches ou de papillons qui creusent dans les feuilles des galeries, entre les deux épidermes du limbe, formant ce que l'on appelle une mine en consommant le parenchyme chlorophyllien. Ces insectes endo-phytophages comprennent environ 10 000 espèces réparties dans 51 familles qui appartiennent dans leur grande majorité aux quatre principaux ordres d'insectes holométaboles (coléoptères, hyménoptères, diptères, lépidoptères).
Il en existe de très nombreuses espèces dont certaines seulement possèdent le nom usuel de « mineuse » en français. Ce sont des asticots de Diptères phytophages ou des chenilles de Lépidoptères. La géométrie de la mine (linéaire, ramifiée, en spirale, etc.) et la disposition des excréments permettent en général une détermination précise du ravageur. L'excavation s'élargit au fur et à mesure de leur croissance. Ces larves sont en général monophages." (Wikipedia)
LES PHYLLOCNISTIS.
Les adultes du genre Phyllocnistis sont de très petits papillons dont l'envergure ne dépasse généralement pas 5 mm. Les ailes antérieures et postérieures sont lancéolées et à prédominance blanche. Les ailes antérieures sont marquées de stries jaunes à orange, longitudinales et obliques, souvent bordées de gris ou de noir. Quelques espèces sont connues pour posséder des motifs de couleurs beaucoup plus sombres ou frappantes.
Larves
Les larves de Phyllocnistis font partie des Lépidoptères les plus spécialisés . Quatre stades semblent être la norme, les trois premiers stades possédant une morphologie et un comportement suceurs. Les stades suceurs créent une longue mine serpentine sous-épidermique sur les surfaces supérieures ou inférieures de la feuille hôte. Quelques espèces forment également des mines sous-épidermiques sur les tiges et divers fruits, dont l'avocatier . Une traînée d' excréments médiane caractéristique s'étend sur toute la longueur de la mine, généralement sous la forme d'une ligne sombre et ininterrompue.
Le quatrième stade est un stade hautement spécialisé, apodal et non nourricier dont la fonction principale est de faire tourner le cocon, à l'extrémité de la mine, avant la nymphose.
Phyllocnistis peut être trouvé sur de nombreuses plantes hôtes et a été observé sur des plantes d'au moins 20 familles. Une espèce bien connue est la mineuse des agrumes ( Phyllocnistis citrella ), un ravageur des plantes de la famille des Rutacées , en particulier des agrumes.
En 2012, environ 126 espèces de Phyllocnistis ont été décrites. C'est probablement une fraction de la véritable diversité du genre, en particulier sous les tropiques, où il peut y avoir des centaines d'espèces encore à collecter.
https://en.wikipedia.org/wiki/Phyllocnistis
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—Pouvez-vous nous en dire plus, commissaire ? Vous auriez placé deux de ces tagueuses en garde à vue.
— Effectivement, je suspecte très précisément Phyllocnistis labyrinthella, qui s'exerce souvent sur les peupliers trembles Populus tremula, et sa compagne, qui serait sa sœur jumelle Phyllocnistis xenia, M. Héring 1936. Je vous distribue sa fiche signalétique du BGB (Bureau du Grand Banditisme).
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"Phyllocnistis xenia est un papillon nocturne de la famille des Gracillariidae . On le trouve de la Grande-Bretagne à la Bulgarie et de la Pologne à la péninsule ibérique et à l' Italie .
L' envergure est de 6 à 7 mm. Les adultes volent de juillet à août puis de septembre à mai en deux générations.
Les larves se nourrissent de Populus alba , Populus canescens et Populus tremula . Ils minent les feuilles de leur plante hôte. La mine est constituée d'un long couloir assez large strictement épidermique qui s'incurve en boucles denses sur la face supérieure des feuilles, sans jamais se croiser. Les excréments se déposent en une vague ligne centrale continue. La galerie se termine sur la marge de la feuille, où elle s'élargit un peu, tandis que la marge de la feuille se replie quelque peu. Ici, la nymphose a lieu. Il n'y a pas de cocon.
Phyllocnistis xenia pourrait être un synonyme de Phyllocnistis labyrinthella . Le papillon adulte et la chrysalide de xenia peuvent difficilement être distingués de ceux de labyrinthella . De nombreux auteurs considèrent donc les deux congénères. Il semble exister une différence constante dans la ligne d'excréments de xenia (qui est large, vague et verdâtre) et celle de labyrinthella (qui est étroite, pointue et noir brunâtre). De plus, la mine de P. labyrinthella s'étend souvent jusqu'à la face inférieure de la feuille, ce qui ne semble pas se produire chez Xenia ."https://en.wikipedia.org/wiki/Phyllocnistis_xenia
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Le site Lepiforum indique que P. xenia est inféodée au Peuplier blanc (ou à son hybride le Peuplier gris P. Canescens).
"Les larves des espèces de Phyllocnistis produisent des conduits de mines qui courent dans l'épiderme. Le tissu vert des feuilles n'est pas consommé, c'est pourquoi les mines n'apparaissent pas éclaircies en lumière transmise (contrairement à la plupart des autres mineuses).
Phyllocnistis xenia : uniquement chez le peuplier blanc ( Populus alba ). La mine apparaît vitreuse en lumière réfléchie en raison de la lame d'air sous l'épiderme détaché, avec une ligne centrale sombre caractéristique. Là, les excréments liquides de la larve ont recollé l'épiderme. Nymphe dans un petit cocon au bout de la mine, qui contracte fortement la surface foliaire. Si ce point se trouve au bord de la feuille, une petite enveloppe de feuille est créée." (traduit de l'allemand)
Et selon le même site Lepiforum :
"Huemer (2013:210) : "Le statut taxonomique de Phyllocnistis xenia a longtemps été considéré comme controversé, et l'espèce a été considérée par Huemer & Tarmann (1993) ainsi que d'autres auteurs comme un synonyme junior de P. labyrinthella , d'autant plus de sorte que les deux taxons sont morphologiquement incertains sont différenciables. Selon Karsholt (in litt.), P. xenia vit préférentiellement sur Populus alba , tandis que les chenilles de P. labyrinthella minent particulièrement les feuilles de Populus tremula . "
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Vous voyez que ma principale suspecte est P. xenia. Et maintenant, je vous présente les pièces à conviction prises sur le terrain par nos inspecteurs.
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